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22/02/1994 | FRANCE | N°92-14160

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 22 février 1994, 92-14160


Sur les deux moyens, pris en leurs diverses branches et réunis :

Attendu, selon l'ordonnance attaquée (premier président de la cour d'appel de Caen, 3 mars 1992), rendue en matière de référé, que, par jugement du 18 décembre 1991, le Tribunal a arrêté le plan de cession des actifs de la société L'Iliade, mise en redressement judiciaire, à la société Eagles Imhotep (la société Eagles) pour le prix de 2 500 000 francs, payable à concurrence de la somme de 500 000 francs dès le prononcé du jugement et du solde à la signature des actes de réalisation de la cession ; qu

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Sur les deux moyens, pris en leurs diverses branches et réunis :

Attendu, selon l'ordonnance attaquée (premier président de la cour d'appel de Caen, 3 mars 1992), rendue en matière de référé, que, par jugement du 18 décembre 1991, le Tribunal a arrêté le plan de cession des actifs de la société L'Iliade, mise en redressement judiciaire, à la société Eagles Imhotep (la société Eagles) pour le prix de 2 500 000 francs, payable à concurrence de la somme de 500 000 francs dès le prononcé du jugement et du solde à la signature des actes de réalisation de la cession ; que la société Eagles ayant prétendu que le plan ainsi arrêté ne correspondait pas à son offre de reprise, et notamment aux réserves qui l'accompagnaient, le Tribunal, saisi par l'administrateur de la procédure collective de cette difficulté d'exécution, a, par jugement du 22 janvier 1992, constaté que le plan n'avait pas modifié les termes de l'offre de la société Eagles, toutes réserves ayant été levées à la barre, et qu'il était devenu exécutoire ; que le jugement du 22 janvier 1992 a, en conséquence, condamné la société Eagles à verser au commissaire à l'exécution du plan, dans les 15 jours, la somme de 500 000 francs et a " ordonné l'exécution du jugement en date du 18 décembre 1991 en toutes ses dispositions " ; que la société Eagles, tout en demandant au premier président de la cour d'appel d'être relevée de la forclusion résultant de l'expiration du délai d'appel ayant couru contre le jugement du 18 décembre 1991, a sollicité du même magistrat l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement du 22 janvier 1992 ;

Attendu que la société Eagles fait grief à l'ordonnance de l'avoir déboutée de cette dernière demande alors, selon le pourvoi, d'une part, que le juge est tenu de statuer dans les " termes " du litige, tels qu'ils se trouvent fixés par les écritures des parties ; qu'en énonçant qu'il était appelé à statuer sur l'arrêt de l'exécution provisoire des dispositions du jugement du 18 décembre 1991 ayant arrêté le plan de cession, le premier président, qui était appelé, en réalité, à statuer sur l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement, en date du 22 janvier 1992, ayant refusé de prononcer la résolution du plan de cession et ayant constaté que ce plan était devenu exécutoire, a méconnu les " termes " du litige dont il était saisi, en violation de l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ; alors, d'autre part, que le pouvoir dévolu au premier président par l'article 155, alinéa 2, du décret du 27 décembre 1985 ne concerne que les seuls jugements visés au deuxième alinéa de l'article 177 de la loi du 25 janvier 1985, notamment les jugements qui arrêtent le plan de cession ; qu'en énonçant, dès lors, sur le fondement de ce texte, que seuls des moyens sérieux invoqués à l'appui de l'appel pouvaient justifier qu'il soit fait droit à la demande d'arrêt de l'exécution provisoire, le premier président, qui n'était pas saisi d'une demande d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement ayant arrêté le plan de cession, a violé, par fausse application, l'article 155 du décret du 27 décembre 1985 ; alors, en outre, que l'article 524 du nouveau Code de procédure civile confère au premier président le pouvoir d'arrêter l'exécution provisoire dans le cas où elle risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives ; qu'en refusant d'ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement du 22 janvier 1992 sans rechercher, comme il y était invité par la société Eagles, si l'exécution de ce jugement n'aurait pas, pour cette société, des conséquences manifestement excessives, le premier président a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 524 du nouveau Code de procédure civile ; alors, au surplus, que les dispositions de l'article 155 du décret du 27 décembre 1985 ne sont pas exclusives de celles de l'article 524 du nouveau Code de procédure civile qui confère au premier président statuant en référé, en cas d'appel, le pouvoir d'arrêter l'exécution provisoire lorsqu'elle est interdite par la loi ; que, selon l'article 516 du nouveau Code de procédure civile, l'exécution provisoire ne peut être ordonnée que par la décision qu'elle est destinée à rendre exécutoire ; que le premier président, qui a estimé qu'il devait statuer sur l'arrêt de l'exécution provisoire des dispositions du jugement du 18 décembre 1991 ayant arrêté le plan de cession et qui a néanmoins refusé d'arrêter l'exécution provisoire de ce jugement prononcée, contrairement à l'exigence qui précède, par un jugement distinct, du 22 janvier 1992, a excédé ses pouvoirs, en violation de l'article 524 du nouveau Code de procédure civile et de l'article 155 du décret du 27 décembre 1985 ; et alors, enfin, que l'article 155 du décret du 27 décembre 1985 confère au premier président de la cour d'appel, statuant en référé, le pouvoir d'arrêter l'exécution provisoire du jugement arrêtant le plan de cession si les moyens invoqués à l'appui de l'appel apparaissent sérieux ; que le premier président n'a pas le pouvoir de refuser d'arrêter l'exécution provisoire en se fondant sur le fait que la

décision assortie de l'exécution provisoire n'a pas été frappée d'appel lorsqu'il se trouve saisi d'une demande de l'une des parties tendant à être relevée de la forclusion résultant de l'expiration du délai d'appel ; qu'en énonçant, dès lors, que les moyens invoqués par la société Eagles critiquaient le jugement dont elle n'avait pas relevé appel, le premier président, qui se trouvait saisi par la société Eagles d'une demande tendant à être relevée de la forclusion résultant de l'expiration du délai d'appel contre le jugement du 18 décembre 1991, a, là encore, excédé ses pouvoirs, en violation de l'article 155 du décret du 27 décembre 1985 ;

Mais attendu que, sauf exceptions, qui ne sont pas en cause en l'espèce, les jugements rendus en matière de redressement et de liquidation judiciaires sont, selon l'article 155, alinéa 1er, du décret du 27 décembre 1985, exécutoires de plein droit à titre provisoire ; que c'est, dès lors, par dérogation aux dispositions du dernier alinéa de l'article 524 du nouveau Code de procédure civile, qui autorise l'aménagement mais non l'arrêt de l'exécution provisoire de droit, que l'article 155, alinéa 2, du décret du 27 décembre 1985 permet au premier président de la cour d'appel d'arrêter l'exécution provisoire de certains jugements rendus en matière de redressement ou de liquidation judiciaires, dont ceux arrêtant le plan de cession de l'entreprise ; que la société Eagles soutenant elle-même n'avoir demandé l'arrêt de l'exécution provisoire que du seul jugement du 22 janvier 1992, lequel, d'après son argumentation devant les juges du fond et la Cour de Cassation, n'est pas visé par le second alinéa de l'article 155 précité, est irrecevable à reprocher à l'ordonnance d'avoir refusé d'arrêter l'exécution provisoire de droit de ce jugement, hors les exceptions prévues par ce texte, et ne peut critiquer, non plus, cette ordonnance pour avoir refusé d'arrêter l'exécution provisoire du jugement du 18 décembre 1991 ; d'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 92-14160
Date de la décision : 22/02/1994
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement et liquidation judiciaires - Procédure - Exécution provisoire - Arrêt - Disposition dérogatoire à celles du dernier alinéa de l'article 524 du nouveau Code de procédure civile .

EXECUTION PROVISOIRE - Exécution provisoire de plein droit - Redressement et liquidation judiciaires - Arrêt de l'exécution - Disposition dérogatoire à celles du dernier alinéa de l'article 524 du nouveau Code de procédure civile

C'est par dérogation aux dispositions du dernier alinéa de l'article 524 du nouveau Code de procédure civile, qui autorise l'aménagement mais non l'arrêt de l'exécution provisoire de droit, que l'article 155, alinéa 2, du décret du 27 décembre 1985 permet au premier président de la cour d'appel d'arrêter l'exécution provisoire de certains jugements rendus en matière de redressement ou de liquidation judiciaires, dont ceux arrêtant le plan de cession de l'entreprise.


Références :

Décret 85-1387 du 27 décembre 1985 art. 155, al. 2
Loi 85-98 du 25 janvier 1985
nouveau Code de procédure civile 524

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 03 mars 1992


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 22 fév. 1994, pourvoi n°92-14160, Bull. civ. 1994 IV N° 74 p. 57
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1994 IV N° 74 p. 57

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Bézard .
Avocat général : Avocat général : M. Curti.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Rémery.
Avocat(s) : Avocats : MM. Parmentier, Foussard.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1994:92.14160
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