Sur le moyen unique :
Vu l'article 3, alinéa 1, de la loi du 5 juillet 1985 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y... a sauté en marche d'un ensemble routier conduit par M. X... et propriété de la société Guigon ; que, blessé, il a assigné en réparation de son préjudice M. X..., la société Guigon et leur assureur, la Mutuelle d'assurance des professions alimentaires ; que la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Savoie a été appelée à l'instance ;
Attendu qu'après avoir, à bon droit, qualifié d'inexcusable le comportement de la victime, qui avait commis une faute volontaire d'une exceptionnelle gravité l'exposant sans raison valable à un danger dont elle aurait dû avoir conscience, l'arrêt, pour estimer que cette faute n'était pas la cause exclusive de l'accident et juger que M. Y... avait donc droit à complète réparation de son préjudice, se borne à énoncer que M. Y... ne s'est pas précipité hors de la cabine en un trait de temps, qu'il lui a fallu, avant, menacer le conducteur de le faire, ouvrir la porte de la cabine, se lever et prendre son élan pour sauter, que, même si ces mouvements n'ont, en fait, duré que quelques secondes, M. X... se devait, devant un tel danger, de freiner énergiquement à l'effet de limiter au maximum les conséquences évidentes de l'acte que M. Y... avait décidé d'accomplir, qu'il n'en a rien fait et que cette absence de réaction de sa part devant un péril évident et immédiat constituait une faute ; que M. X... se devait également, une fois M. Y... hors de la cabine, de tenter une manoeuvre de sauvetage consistant en un coup de volant sur la gauche propre à écarter le semi-remorque du corps de M. Y..., entraîné et roulé sur la chaussée, et qu'il avait continué imperturbablement sa route avant de ne revenir sur les lieux que plusieurs minutes après ;
Qu'en énonçant que la faute inexcusable de la victime n'était pas la cause exclusive de l'accident, sans caractériser un lien de causalité entre le comportement du conducteur et l'accident, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 mars 1992, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble.