Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail ;
Attendu que le syndicat intercommunal de Lille - Roubaix - Tourcoing, établissement public dénommé Opéra du Nord, gérait le théâtre lyrique de Lille ; qu'il avait passé avec chaque musicien de l'orchestre un contrat qui faisait expressément référence, dans son article 4, à l'application du règlement général de l'Opéra du Nord ;
Attendu que cet établissement ayant été dissous le 31 août 1985, l'association Opéra de Lille a été créée pour assurer le fonctionnement du théâtre ; que cette association a signé avec chacun des musiciens qui travaillaient pour le syndicat une nouvelle convention déclarant la poursuite des droits et obligations résultant des articles 1, 2 et 3 du précédent contrat ; qu'en raison de difficultés économiques, l'association a procédé au licenciement de l'ensemble du personnel au mois de février 1987 ;
Attendu que M. X... et 58 autres musiciens, soutenant que l'association ne les avait pas fait profiter des avantages résultant pour eux du règlement général de l'Opéra du Nord, ont saisi la juridiction prud'homale pour obtenir des compléments de salaires et d'indemnités ;
Attendu que pour faire droit à ces demandes, l'arrêt attaqué énonce qu'il ne peut être contesté que l'activité du syndicat intercommunal Opéra du Nord a été reprise par l'association Opéra de Lille, dont l'objet était de promouvoir en France et à l'étranger des activités lyriques, artistiques et culturelles ; que tous les contrats de travail passés entre le syndicat intercommunal et les musiciens ont donc nécessairement été transférés à l'association Opéra de Lille, l'article L. 122-12 du Code du travail devant s'appliquer, dès lors que les salariés sont employés dans des conditions de droit privé, même si, comme en l'espèce, les employeurs sont de nature juridique différente, le syndicat intercommunal étant un établissement public et l'association Opéra de Lille étant une association de droit privé ;
Attendu, cependant, que lorsqu'un service public administratif disparait, la reprise de son activité par un organisme de droit privé n'entraîne pas le transfert d'une entité économique conservant son identité ;
D'où il suit qu'ayant constaté que l'Opéra du Nord était un établissement public à caractère administratif et qu'il avait été dissous le 31 août 1985, la cour d'appel, en appliquant les dispositions de l'article L. 122-12 du Code du travail à la reprise du théâtre lyrique et des musiciens, en vertu de contrats distincts, par une association de droit privé, a violé ce texte ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 31 janvier 1991, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens.