Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 19 avril 1991), que les époux X..., ayant, le 20 février 1988, conclu avec la société civile immobilière Windsor Poissy (la SCI) un contrat préliminaire de réservation d'un appartement, ont, en raison de la modification apportée aux plans par la suppression de deux fenêtres, refusé de signer l'acte de vente en l'état futur d'achèvement et ont assigné la SCI en restitution du dépôt de garantie et en indemnisation ;
Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de la condamner à payer des dommages-intérêts en sus de la restitution du dépôt de garantie, alors, selon le moyen, 1°) que, conformément aux articles L. 261-15 et R. 261-25, R. 261-30 et R. 261-31 du Code de la construction et de l'habitation, la conclusion d'un contrat préliminaire de réservation, contrat qui ne doit comporter que les indications essentielles relatives à la consistance de l'immeuble, à la qualité de la construction et aux délais ainsi qu'à la consistance, à la situation et au prix du local réservé, n'interdit pas au réservant d'apporter des modifications à ces caractéristiques mais lui impose de notifier au réservataire le projet d'acte de vente un mois avant sa signature et de restituer à celui-ci le dépôt de garantie s'il refuse d'accepter ces modifications ; que la cour d'appel, qui a constaté que M. et Mme X..., informés par la notification du projet d'acte de vente des modifications que la SCI Windsor Poissy avait été contrainte d'apporter à certaines des ouvertures du local qu'elle leur avait réservé, avaient refusé de les accepter et que la SCI Windsor Poissy leur avait restitué le dépôt de garantie mais qui a, néanmoins, condamné la SCI Windsor Poissy au paiement de dommages-intérêts, faute pour elle d'avoir informé les réservataires dès qu'elle en avait eu connaissance des modifications apportées au projet initial, a méconnu la nature et l'étendue des obligations du réservant et a ainsi violé les dispositions susvisées ; 2°) que, par application de l'article R. 261-31 du Code de la construction et de l'habitation, l'exercice de la faculté offerte au réservataire par cette disposition, dans des hypothèses qu'elle énumère expressément, de ne pas accepter les modifications apportées par le réservant ou des caractéristiques essentielles du local qu'il s'est engagé à lui réserver, de refuser de réaliser la vente et d'obtenir la restitution sans retenue ni pénalité du dépôt de garantie, s'oppose à ce que le réservataire obtienne réparation du préjudice que lui aurait causé la non-réalisation de la vente ; qu'en décidant qu'en l'espèce les réservataires étaient fondés à demander réparation du préjudice que leur aurait causé la non-réalisation de la vente dans un délai déterminé, la cour d'appel a violé la disposition susvisée ; 3°) qu'enfin, conformément à l'article 1149 du Code civil, les dommages-intérêts dus au créancier sont, en général de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé, ce qui exclut de réparer la perte d'une chance qui résulterait, non de la réalisation d'un événement futur et incertain, mais de l'attitude même du créancier ; qu'en se déterminant, pour condamner la SCI Windsor Poissy au paiement de dommages-intérêts, par le fait que M. et Mme X... auraient perdu une chance quant à la possibilité de mettre en oeuvre un nouveau projet compatible à la fois avec leurs disponibilités financières et une fiscalité avantageuse légalement ouverte jusqu'au 31 décembre 1989, la cour d'appel n'a pas caractérisé le préjudice réparable mais a retenu un préjudice purement éventuel dont la réalisation ne dépendait que de l'attitude éventuelle des réservataires ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de la disposition susvisée ;
Mais attendu qu'ayant constaté que le contrat préliminaire stipulant que " des modifications de détail d'ordre technique " pourraient être apportées à la construction projetée, les époux X... ne pouvaient s'attendre à des changements aussi graves que la suppression de la fenêtre de la chambre et d'une fenêtre de la salle de séjour de l'appartement de deux pièces, découverte sur les plans annexés au projet de vente définitif lors de la notification de celui-ci, la cour d'appel, qui a retenu que la SCI aurait dû prévenir les réservataires lors de la découverte de l'erreur de conception de l'architecte, origine des suppressions de fenêtres, et avait manqué à son obligation de renseignement et d'exécution de bonne foi du contrat, et qui a souverainement relevé que cette faute, retardant l'exercice du droit de retrait des époux X..., leur avait fait perdre une chance de mise en oeuvre d'un nouveau projet compatible à l'époque avec leurs disponibilités financières et une fiscalité avantageuse, a, par ces motifs, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.