REJET du pourvoi formé par :
- X... Chantal, épouse Y..., prévenue,
- l'entreprise de Transports Nex, civilement responsable,
- la Caisse mutuelle d'assurances et de prévoyance, partie intervenante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Nancy, chambre correctionnelle, du 5 mai 1992, qui, dans les poursuites exercées contre Chantal X... du chef d'homicide involontaire, a prononcé sur les réparations civiles.
LA COUR,
Vu le mémoire produit, commun aux trois demandeurs ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 1382 du Code civil, 29 et 33 de la loi du 5 juillet 1985, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a condamné l'auteur d'un accident (Mme X..., épouse Y...) in solidum avec l'assureur du civilement responsable (la CMA, assureur de la société Transports Nex), à payer à la veuve de la victime (Mme veuve Z...) une somme de 437 131, 78 francs en réparation de son préjudice économique, caractérisé par une perte de revenus ;
" aux motifs que la victime, retraitée de la SNCF, percevait à la date de son décès une pension de 68 515, 60 francs par an ; qu'en ce qui concernait les revenus du jardin, il y avait lieu de retenir une somme de 7 000 francs par an ; qu'au total les revenus du ménage devaient donc être évalués à 75 515, 60 francs ; que la part de revenus affectée à l'épouse pouvait être fixée à 65 % du total ; que, dès lors, la perte de revenus s'établissait à 49 085, 14 francs ; que la pension de réversion qui lui était servie par la SNCF avait été à tort déduite par le premier juge pour établir le montant du préjudice subi par la veuve de la victime et dont elle était en droit de demander le remboursement à l'auteur de l'accident ; qu'en effet, si la SNCF était bien un organisme ou établissement gérant un régime obligatoire de sécurité sociale, la pension de réversion ne pouvait être considérée comme une " prestation versée à la victime d'un dommage résultant d'une atteinte à la personne ", ouvrant droit, aux termes de l'article 29 de la loi du 5 juillet 1985, à un recours contre la personne tenue à réparation ou son assureur, puisque cette pension était versée par la SNCF en vertu d'une obligation statutaire ; qu'aux termes de l'article 33 de la loi, ces versements n'ouvraient droit à aucune action contre la personne tenue à réparation ou son assureur ;
" alors que si la réparation du dommage doit être intégrale, elle ne saurait excéder le préjudice réellement subi ; qu'en conséquence, l'indemnité destinée à réparer le préjudice patrimonial subi par la veuve de la victime d'un accident de la circulation devait être fixée en tenant compte des prestations qui remplacent le salaire ou la retraite prématurément perdue ; que tel est le cas de la pension de réversion ; que la suppression de tout recours subrogatoire, prévue par les articles 29 et 33 de la loi du 5 juillet 1985 à l'encontre de l'organisme ayant payé une prestation autre que celles visées l'article 29, ne signifie aucunement que la prestation versée serait dépourvue de caractère indemnitaire ; qu'il en résulte que ces articles ne peuvent avoir pour objet ni même pour effet de déroger au principe d'ordre public selon lequel le fait dommageable ne peut être pour la victime ou son ayant droit une source d'enrichissement ; qu'après avoir constaté que le préjudice économique subi par la veuve s'analysait en la perte des revenus que percevait le mari, composés notamment de sa pension de retraite, la cour d'appel ne pouvait refuser d'en déduire la pension de réversion qui remplaçait en partie la retraite versée à la victime " ;
Attendu que dans les poursuites exercées contre Chantal X..., épouse Y..., du chef d'homicide involontaire sur la personne de Paul Z..., retraité de la SNCF, la cour d'appel a fixé le préjudice économique de la veuve, partie civile, sans tenir compte de la pension de réversion servie à cette dernière par la SNCF, au motif qu'aux termes de l'article 33 de la loi du 5 juillet 1985, ces versements opérés en vertu d'une obligation statutaire n'ouvrent droit à aucune action contre la personne tenue à réparation ou son assureur ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision ;
Qu'en effet l'absence de recours subrogatoire au profit du tiers qui a versé des prestations à la victime d'un accident ou à ses ayants droit, implique que ces prestations ne sont pas imputables sur l'indemnité mise à la charge de la personne tenue à réparation ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.