Joint les pourvois n°s 91-11.770 et 91-11.362 ;
Attendu qu'une explosion suivie d'un incendie a endommagé un immeuble appartenant à l'office public d'habitations à loyer modéré (OPHLM) de la ville de Colmar ; qu'une expertise a établi que cette explosion avait été provoquée par une fuite de gaz de ville dans l'appartement pris en location par les époux X..., qui avaient ouvert par mégarde le robinet terminal de la conduite de gaz sur laquelle, depuis leur arrivée dans les lieux, ils n'avaient branché aucun appareil ; que la compagnie Hannover international France, assureur de l'OPHLM qu'elle a indemnisé, a assigné en remboursement M. X... et son assureur de responsabilité, l'Union des assurances de Paris (UAP), qui ont appelé en garantie la régie municipale de la ville de Colmar et ont invoqué, pour s'opposer à la demande dirigée contre eux, la clause de non-recours contre les locataires insérée non seulement dans le contrat de bail conclu entre les époux X... et l'OPHLM, mais encore dans le contrat d'assurance souscrit par celui-ci auprès de la compagnie Hannover international France ; que la cour d'appel a, par application de la clause de ce dernier contrat, déclaré irrecevable le recours de la compagnie Hannover international France contre M. X... puis, après avoir relevé que la clause insérée dans le contrat de bail, limitée au cas d'incendie, n'était pas applicable au dommage provoqué par une explosion et que, par suite, le locataire restait exposé au recours de l'OPHLM, a déclaré recevable et bien fondé le recours de la compagnie Hannover international France, subrogée dans les droits de son assuré, contre l'UAP, laquelle ne pouvait se prévaloir de la clause de renonciation insérée dans le contrat d'assurance, limitée au recours contre le seul locataire responsable ; qu'elle a, en conséquence, condamné l'UAP à rembourser à la compagnie Hannover international France l'indemnité que celle-ci avait versée à l'OPHLM, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date de son arrêt ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches, du pourvoi n° 91-11.770 de l'UAP :
Attendu que cet assureur fait grief à la cour d'appel d'avoir déclaré recevable le recours exercé contre lui par la compagnie Hannover international France alors, d'une part, qu'en déclarant inapplicable la clause de renonciation à recours du bailleur contre le preneur en cas d'incendie, stipulée dans le contrat de bail, au motif que le sinistre avait été provoqué par une explosion, la cour d'appel a dénaturé ladite clause qui n'excluait pas de son champ d'application les incendies résultant d'une explosion ; et alors, d'autre part, que l'assureur de dommage qui a renoncé, dans la police, à son recours contre le tiers responsable, ne peut agir davantage contre l'assureur de ce dernier, sauf stipulation spéciale lui ménageant cette possibilité ; qu'en déclarant recevable le recours de la compagnie, sans constater l'existence d'une telle stipulation dans le contrat d'assurance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 121-12 du Code des assurances ;
Mais attendu que la clause de renonciation à tout recours contre la personne responsable d'un dommage n'emporte pas, sauf stipulation contraire, renonciation à recourir contre l'assureur de cette personne ; qu'il s'en déduit qu'à la supposer applicable au dommage litigieux provoqué par une explosion, la clause du contrat de bail, par laquelle l'OPHLM avait renoncé à son recours contre M. X..., ne privait pas par elle-même l'office de son recours contre l'assureur du locataire ; qu'ayant constaté que ni l'OPHLM, dans le contrat de bail, ni son assureur, dans la police d'assurance, n'avaient renoncé expressément à leurs recours contre l'assureur de responsabilité du locataire, la cour d'appel a retenu, à bon droit, que la compagnie Hannover international France, subrogée dans les droits de son assuré, était recevable à agir contre l'UAP ; qu'elle a ainsi, par ce seul motif, légalement justifié sa décision et que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
Sur le second moyen du même pourvoi : (sans intérêt) ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi n° 91-11.362 de la compagnie Hannover international France :
Vu l'article 1153 du Code civil ;
Attendu que la créance d'une somme d'argent, née et déterminée dans son montant antérieurement à la décision du juge qui se borne à la constater, porte intérêts à compter de la sommation de payer ou, à défaut, de la demande en justice ;
Attendu que, pour faire courir à compter de la date de son arrêt les intérêts moratoires de la somme que l'UAP était condamnée à payer à la compagnie Hannover international France, l'arrêt attaqué énonce que la créance de cet assureur n'est pas contractuelle ;
Attendu, cependant, que, saisie d'une action en remboursement exercée contre l'assureur du responsable du dommage par la compagnie Hannover international France, subrogée dans les droits de son assurée qu'elle avait indemnisée, la cour d'appel n'a pas fixé le montant de la créance et s'est bornée à constater que l'indemnité réclamée n'était pas contestée dans son montant et que la compagnie justifiait l'avoir versée ; qu'en statuant comme elle a fait, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'il y a lieu, conformément à l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, de mettre fin au litige en appliquant la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions relatives au point de départ des intérêts moratoires de la somme de 2 161 150 francs, l'arrêt rendu le 19 décembre 1990, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
DIT que les intérêts aux taux légal de la somme de 2 161 150 francs sont dus à compter de la sommation de payer cette somme ou, à défaut, de la demande en justice.