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17/03/1993 | FRANCE | N°90-41556

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 17 mars 1993, 90-41556


Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 10 janvier 1990), que la société Sag chaussures a pris acte le 17 février 1987 de la rupture du contrat de travail de M. X... salarié protégé et de son épouse, gérants d'une succursale de commerce de détail de chaussures, qui ont refusé leur mutation de Bordeaux au Havre nonobstant la clause de mobilité figurant au contrat ;

Sur le premier moyen :

Attendu que, la société Sag Chaussures fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée à payer une certaine somme à titre de dommages-intérêts à M. X

..., alors, selon le moyen, que prend la responsabilité de la rupture de son contrat...

Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 10 janvier 1990), que la société Sag chaussures a pris acte le 17 février 1987 de la rupture du contrat de travail de M. X... salarié protégé et de son épouse, gérants d'une succursale de commerce de détail de chaussures, qui ont refusé leur mutation de Bordeaux au Havre nonobstant la clause de mobilité figurant au contrat ;

Sur le premier moyen :

Attendu que, la société Sag Chaussures fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée à payer une certaine somme à titre de dommages-intérêts à M. X..., alors, selon le moyen, que prend la responsabilité de la rupture de son contrat de travail, qui ne s'analyse donc pas comme un licenciement, le salarié protégé qui refuse une mutation prévue par les dispositions tant de son contrat de travail que de la convention collective applicable et insusceptible d'entraver l'exercice de son mandat de caractère national, et qu'en qualifiant la rupture, consécutive au refus de M. X... d'accepter sa mutation au Havre, de licenciement imposant le respect des formalités protectrices, sans constater que cette mutation était substantielle ou était de nature à entraver son mandat syndical, la cour a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 1134 du Code civil et L. 412-18 du Code du travail ;

Mais attendu que la protection exceptionnelle et exorbitante du droit commun instituée par la loi au profit de salariés investis de fonctions représentatives interdit à l'employeur de poursuivre par d'autres moyens que ceux qu'elle institue, la rupture du contrat de travail ; que la clause de mobilité figurant au contrat de travail ne pouvait priver M. X..., délégué syndical et représentant syndical au comité d'entreprise, des mesures spéciales instituées par la loi et qu'il appartenait à l'employeur de demander l'autorisation de l'inspecteur du Travail de licencier ce salarié à la suite de son refus de la modification de son contrat, que celle-ci fût substantielle ou non ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Et sur le second moyen :

Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt d'avoir alloué des dommages-intérêts à Mme X... ; alors, selon le moyen, que, d'une part, ne constitue pas un licenciement, la rupture du contrat de travail consécutif au refus du salarié d'accepter une mutation prévue tant par les dispositions contractuelles que conventionnelles, le salarié prenant alors la responsabilité de la rupture et qu'en s'abstenant de rechercher si Mme X... n'avait pas pris la responsabilité de la rupture de son contrat en refusant sa mutation au Havre, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 1134 du Code civil et L. 122-14 et suivants du Code du travail ; alors que, d'autre part et subsidiairement, à supposer même que la rupture du contrat de travail de M. X..., délégué syndical, ait nécessité le respect des formalités protectrices prévues par la loi, l'indivisibilité du contrat des époux X... n'a pu avoir pour effet de conférer à Mme X... la protection exceptionnelle et exorbitante du droit commun instituée par le législateur au profit de salariés investis de fonctions représentatives, et qu'en déduisant de la nullité du licenciement de M. X... l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement de son épouse la cour a violé l'article 1134 du Code civil et L. 412-18 du Code du travail ;

Mais attendu, d'une part, que constitue un licenciement, la décision par laquelle l'employeur considére que le contrat est rompu, fût-ce à l'occasion d'un manquement par le salarié à ses obligations contractuelles ; que, d'autre part, la cour d'appel a relevé que le licenciement des époux X... procédait de la même cause, que les conjoints avaient été affectés ensemble à Bordeaux et que le projet de mutation leur était commun en sorte que le contrat qui les liait à l'employeur consacrait l'indivisibilité de leurs engagements ; qu'ayant fait ressortir que la rupture de l'engagement de Mme X... dépendait de la rupture de celui de son mari et qu'elle ne pouvait, à défaut d'autre motif, être prononcée en raison de son refus, compte tenu de l'irrégularité du licenciement de M. X..., la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE Le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 90-41556
Date de la décision : 17/03/1993
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

1° REPRESENTATION DES SALARIES - Règles communes - Contrat de travail - Licenciement - Mesures spéciales - Domaine d'application - Modification du contrat par l'employeur - Mutation - Mutation prévue au contrat de travail - Refus du salarié.

1° CONTRAT DE TRAVAIL - RUPTURE - Licenciement - Salarié protégé - Mesures spéciales - Conditions - Modification du contrat par l'employeur - Mutation - Mutation prévue au contrat de travail - Refus du salarié 1° CONTRAT DE TRAVAIL - RUPTURE - Imputabilité - Modification du contrat par l'employeur - Mutation - Mutation prévue au contrat de travail - Refus du salarié - Salarié protégé - Licenciement - Mesures spéciales - Nécessité 1° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Modification - Modification imposée par l'employeur - Mutation - Mutation prévue au contrat de travail - Refus du salarié - Salarié protégé - Licenciement - Mesures spéciales - Nécessité.

1° La protection exceptionnelle et exorbitante du droit commun instituée par la loi au profit de salariés investis de fonctions représentatives interdit à l'employeur de poursuivre par d'autres moyens que ceux qu'elle institue la rupture du contrat de travail. Il s'ensuit que la clause de mobilité figurant au contrat de travail ne peut priver un délégué syndical et représentant syndical au comité d'entreprise, des mesures spéciales instituées par la loi et il appartient à l'employeur de demander l'autorisation de l'inspecteur du Travail de licencier ce salarié à la suite de son refus de la modification de son contrat, que celle-ci fût substantielle ou non.

2° CONTRAT DE TRAVAIL - RUPTURE - Licenciement - Cause - Cause réelle et sérieuse - Epoux - Epoux salariés du même employeur - Licenciements procédant de la même cause - Epoux salarié protégé - Irrégularité de son licenciement - Effet.

2° CONTRAT DE TRAVAIL - RUPTURE - Indivisibilité - Epoux - Epoux salariés du même employeur - Licenciements procédant de la même cause - Epoux salarié protégé - Irrégularité de son licenciement - Effet 2° CONTRAT DE TRAVAIL - RUPTURE - Licenciement - Cause - Cause réelle et sérieuse - Epoux - Interdépendance des fonctions - Licenciement du mari - Mari salarié protégé - Irrégularité de son licenciement - Effet.

2° Constitue un licenciement la décision par laquelle l'employeur considère que le contrat est rompu, fût-ce à l'occasion d'un manquement par le salarié à ses obligations contractuelles. Dès lors que le licenciement de deux époux salariés procède de la même cause et que le projet de mutation leur est commun, le contrat qui les lie à l'employeur consacre l'indivisibilité de leur engagement. Il s'ensuit que dès lors que la rupture de l'engagement de l'un des époux dépend de la rupture de celui de l'autre, elle ne peut, à défaut d'autre motif, être prononcée en raison de son refus de mutation, compte tenu de l'irrégularité du licenciement de ce dernier.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 10 janvier 1990

A RAPPROCHER : 2° Chambre sociale, 1986-05-07, Bulletin 1986, V, n° 204, p. 160 (rejet), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 17 mar. 1993, pourvoi n°90-41556, Bull. civ. 1993 V N° 93 p. 63
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1993 V N° 93 p. 63

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Kuhnmunch .
Avocat général : Avocat général : M. de Caigny.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Boubli.
Avocat(s) : Avocat : M. Delvolvé.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1993:90.41556
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