Sur le moyen unique :
Attendu que M. Y... a été engagé le 16 septembre 1965 en qualité de dessinateur industriel par la société Abex équipements ; qu'il avait la qualité de délégué syndical et détenait, en outre, les mandats de délégué du personnel suppléant et de membre suppléant du comité d'établissement et du comité central d'entreprise ; qu'en mars 1986, à la suite d'une plainte déposée par la société, était découvert dans le bureau du directeur un système dissimulé d'écoutes relié à un matériel d'enregistrement installé dans un local syndical ; qu'en raison de ces faits, la société, après avoir obtenu l'autorisation de l'inspecteur du Travail, a licencié M. Y... le 15 avril 1986 pour faute lourde ; qu'après la publication de la loi d'amnistie du 20 juillet 1988, et en application de l'article 15-II de ladite loi, M. Y... a demandé sa réintégration dans l'entreprise et, après refus de l'employeur, a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Amiens, 15 mai 1990) de l'avoir débouté de sa demande de réintégration alors que, selon le moyen, d'une part, l'employeur reprochait à son salarié une complicité dans la pose d'un micro et l'enregistrement de conversations privées ainsi que l'utilisation à destination de l'extérieur d'informations confidentielles ; qu'en déduisant l'existence d'une faute lourde de la seule perte de confiance par l'employeur résultant du comportement équivoque d'un salarié, en l'absence de tout élément de fait précis de nature à établir de façon indiscutable la réalité des manquements imputés au salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 15-II de la loi du 20 juillet 1988 portant amnistie ; qu'à tout le moins, en statuant ainsi, la cour d'appel a commis une erreur de qualification au regard du même texte ; alors que, d'autre part, le salarié contestait formellement dans ses conclusions, avec des arguments précis et complets, avoir eu connaissance d'un matériel d'écoute déposé dans le local syndical ; qu'il soutenait à cet égard que ses propos avaient été déformés ; qu'il avait seulement reconnu avoir vu un lecteur de cassettes ainsi qu'un poste de radio des plus banals dont la présence ne pouvait en rien lui faire soupçonner l'existence d'écoutes clandestines ; qu'en s'abstenant de répondre à cette argumentation précise et péremptoire et en se contentant d'affirmations, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions, en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que, réfutant les allégations du salarié, les juges du fond ont relevé que, si la responsabilité de l'installation et du fonctionnement du système d'écoutes clandestines incombait à un autre salarié, M. X..., il était établi que M. Y... qui connaissait l'existence de ce système permettant de capter et d'enregistrer les conversations tenues dans le bureau du directeur, se rendait au local syndical afin d'avertir M. X... lorsque le directeur recevait des cadres dans son bureau et qu'ainsi il participait à l'utilisation des micros clandestins ; qu'en définitive, il avait sciemment couvert l'utilisation de micros clandestins ;
Et attendu que les juges du fond, qui ont fait ressortir l'intention du salarié de nuire à l'employeur ou à l'entreprise, ont pu décider qu'il avait commis une faute lourde exclusive du droit à réintégration ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.