REJET du pourvoi formé par :
- X... Hamid,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 12e chambre, en date du 6 novembre 1990, qui l'a condamné pour délivrance indue de documents administratifs à la peine de 10 000 francs d'amende.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et des articles 153, 154 et 155 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, violation de la loi :
" en ce que l'arrêt affirmatif attaqué a déclaré le prévenu coupable d'avoir délivré indûment à quatre personnes des documents administratifs, et l'a condamné à une peine de 10 000 francs d'amende ;
" aux motifs propres et adoptés qu'en raison de sa qualité et de son grade, il n'a pas prouvé sa bonne foi ; il ne saurait être admis que X... ne pouvait invoquer une erreur d'interprétation de la circulaire du ministre de l'Intérieur, en date du 25 octobre 1978, qui visait en termes clairs un cas bien précis de délivrance de documents d'identité française, à ceux des étrangers qui ont épousé une personne française et ont souscrit une déclaration de nationalité française, que les employés de son bureau lui ayant fait remarquer que les dossiers n'étaient pas conformes, il aurait répondu s'être renseigné auprès du service des naturalisations de la préfecture de Bobigny ; que ces demandes de renseignements n'ont pas été confirmées par les divers services ; qu'il est regrettable que Mme Y... n'ait pas été entendue à son retour de vacances et qu'un exemplaire du procès-verbal, concernant les questions d'acquisition ou de perte de nationalité, n'ait pas été joint au dossier ; que le dernier élément, établissant la mauvaise foi du prévenu, résulte encore de ce qu'il a délivré, à Mme Z..., un passeport au seul vu de son certificat d'instance de naturalisation, sans qu'il puisse se prévaloir de l'existence d'un certificat de nationalité, dont il savait qu'il était contestable ;
" alors que, d'une part, l'alinéa 3 de l'article 154 du Code pénal n'institue pas une présomption de culpabilité, mais exige que soit établi à l'encontre du prévenu, l'élément intentionnel de l'infraction ; qu'en énonçant, tant par motifs propres qu'adoptés, que X... n'a pas prouvé sa bonne foi, qui ne saurait dès lors être admise, faisant ainsi peser sur le prévenu la charge de la preuve de l'élément intentionnel du délit, la cour d'appel a violé, outre le texte susvisé, l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
" alors que, d'autre part, il résulte des énonciations des juges du fond, qui ont déploré sous la forme de regrets, l'absence au dossier du procès-verbal du mois de janvier 1986 du ministre de l'Intérieur, traitant des questions d'acquisition et de perte de nationalité, et surtout que Mme Y..., attachée au services des naturalisations, n'ait pas été entendue, ce qui implique que l'instruction était insuffisante, comme le faisait valoir le prévenu dans ses conclusions, de sorte qu'en se contentant de confirmer le jugement entrepris, sans ordonner une mesure d'information complémentaire, dont la nécessité était ainsi implicitement reconnue, la cour d'appel n'a pas suffisamment motivé sa décision au regard des textes susvisés " ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et du jugement dont il adopte les motifs que, pour déclarer Hamid X... coupable d'avoir fait délivrer des documents constatant un droit, une identité ou une qualité à des personnes qu'il savait n'y avoir pas droit, les juges énoncent que le prévenu, alors chargé de mission à la direction du service de la réglementation à la préfecture de la Seine-Saint-Denis, a fait établir des cartes nationales d'identité et des passeports au profit de quatre personnes de nationalité cambodgienne ou vietnamienne sur le vu de certificats d'instance en naturalisation malgré les objections des employées chargées de préparer ces pièces sur le caractère incomplet des dossiers ; que les juges relèvent que X... savait qu'il délivrait des documents français à des étrangers occupant des emplois dans un restaurant d'Aubervilliers qu'il fréquentait régulièrement à l'époque ; qu'il n'est pas fondé à invoquer une erreur d'interprétation grossière de sa part en raison de sa qualité et de son grade à propos de la circulaire du ministre de l'Intérieur du 25 octobre 1978 concernant une situation bien précise ; que, compte tenu de tous ces éléments, il n'est pas possible d'admettre la bonne foi du prévenu ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, abstraction faite de motifs inopérants, la cour d'appel a fait l'exacte application de la loi ;
Que l'élément intentionnel du délit prévu par l'article 154, alinéa 3, du Code pénal est caractérisé dès qu'il est constaté que l'auteur a délivré, en connaissance de cause, des documents administratifs à des personnes qui n'y avaient pas droit ;
Que le moyen ne peut donc être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.