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05/01/1993 | FRANCE | N°92-81942

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 05 janvier 1993, 92-81942


REJET du pourvoi formé par :
- X... Jean-Louis,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Limoges, chambre correctionnelle, du 6 mars 1992, qui a validé une ordonnance du juge de l'application des peines sauf à fixer à 5 000 francs le montant de la somme mensuelle que devra verser le condamné au Trésor public.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation du principe de l'interprétation stricte de la loi pénale, des articles 739, R.53, R.54, R.58.7°, 591 et 593 du Code de procédure pénale, de l'article 41 du Code pénal, défaut

de réponse à conclusions, défaut de motifs et manque de base légale :
" en c...

REJET du pourvoi formé par :
- X... Jean-Louis,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Limoges, chambre correctionnelle, du 6 mars 1992, qui a validé une ordonnance du juge de l'application des peines sauf à fixer à 5 000 francs le montant de la somme mensuelle que devra verser le condamné au Trésor public.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation du principe de l'interprétation stricte de la loi pénale, des articles 739, R.53, R.54, R.58.7°, 591 et 593 du Code de procédure pénale, de l'article 41 du Code pénal, défaut de réponse à conclusions, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré valable l'ordonnance du juge de l'application des peines imposant à X... d'acquitter mensuellement une somme au Trésor public et fixé celle-ci à 5 000 francs ;
" aux motifs adoptés que l'obligation particulière découlant de la décision de condamnation en cause ici, est celle, prise en application de l'article R.58.7° du Code de procédure pénale, de justifier qu'il acquitte en fonction de ses facultés contributives, les sommes dues au Trésor public à la suite de la condamnation, lesquelles incluent nécessairement l'amende prononcée par la juridiction de jugement ; que le fait que la décision ne reprenne pas mot pour mot le texte de l'article R.58.7° du Code de procédure pénale n'altère en rien la source légale de l'obligation ; qu'à cet égard, le délai de 2 ans visé à l'arrêt n'est jamais qu'une modalité particulière de la faculté ouverte par l'article 41 du Code pénal, à toute juridiction de jugement, d'aménager le paiement de la peine d'amende qu'elle prononce ; qu'à compter du 2 juin 1991 la peine d'amende est devenue exigible en sa totalité ;
" alors de première part que le jugement de condamnation ne peut assortir le sursis avec mise à l'épreuve que d'une ou plusieurs des obligations limitativement énumérées à l'article R.58 du Code de procédure pénale, au nombre desquelles figure l'obligation faite au probationnaire de justifier qu'il acquitte, en fonction de ses facultés contributives, les sommes dues au Trésor public à la suite de la condamnation, mais non celle de régler la totalité des sommes dues au Trésor public dans un délai imparti par le jugement et antinomique, par nature, avec les facultés contributives du condamné qui doivent être appréciées au cours de la probation ; qu'en l'espèce, l'arrêt du 2 juin 1989, qui a condamné X... à 5 ans d'emprisonnement et à 1 500 000 francs d'amende et dit qu'il sera sursis à la peine d'emprisonnement avec mise à l'épreuve pour une durée de 5 ans " sous réserve du règlement, dans le délai de 2 ans à compter du présent arrêt de la totalité des sommes dues au Trésor, y compris l'amende ", a subordonné le sursis avec mise à l'épreuve à une obligation non prévue par le texte susvisé ; que dès lors, le juge de l'application des peines ne pouvait légalement modifier cette mesure ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 739, R.53, R.54, et R.58.7° du Code de procédure pénale ;
" alors de deuxième part que, le fractionnement de l'amende prévu par l'article 41 du Code pénal ne pouvant être accordé que par une décision précisant le nombre, les dates et le montant des échéances au vu des facultés contributives du condamné, l'arrêt du 2 juin 1989, qui ne comporte ni ces précisions ni cette appréciation, ne pouvait être regardé comme ayant fait application de ce texte ; que dès lors, en considérant que le délai de 2 ans imparti à X... par cet arrêt pour régler l'intégralité de la totalité des sommes dues au Trésor public n'était jamais qu'une modalité particulière de la faculté ouverte à toute juridiction de jugement par l'article 41 du Code pénal, laquelle faculté est en toute hypothèse une mesure distincte de celles énumérées limitativement à l'article R.58 du Code de procédure pénale, la cour d'appel s'est fondée sur un motif inopérant et a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
" alors de troisième part que l'exposant faisait valoir dans ses conclusions régulièrement déposées, que le délai de grâce ne constituait pas un fractionnement du paiement de l'amende et était alloué sans la moindre référence aux facultés contributives du débiteur ; qu'en se référant aux dispositions de l'article 41 du Code pénal sans répondre à ce moyen péremptoire, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs ;
" alors de quatrième part que l'exposant faisait également valoir dans ses conclusions régulièrement déposées que la jurisprudence et la doctrine étaient unanimes à considérer que le juge de l'application des peines ne pouvait modifier une obligation particulière assortissant le sursis avec mise à l'épreuve, qu'à la suite de la survenance d'un fait nouveau et que tel n'était pas le cas en l'espèce, le probationnaire ayant au surplus versé au Trésor une somme de 30 000 francs correspondant au maximum de ses facultés contributives ; qu'en s'abstenant de répondre à ces moyens péremptoires la cour d'appel a de nouveau entaché sa décision d'un défaut de motifs " ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, des articles 738 et 742 et suivants du Code de procédure pénale, des articles 591 et 593 du même Code, défaut de réponse à conclusions, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré valable l'ordonnance du juge de l'application des peines imposant à X... d'acquitter mensuellement une somme au Trésor public et fixé celle-ci à 5 000 francs ;
" aux motifs qu'il y a lieu de considérer que la contribution mise à la charge du condamné trouve directement son origine dans la sanction qui lui a été infligée à la suite du délit d'abus de confiance aggravé dont il a été reconnu coupable et elle présente nécessairement un aspect coercitif puisque sa non-observation entraînera la révocation du sursis avec mise à l'épreuve ;
" alors qu'il résulte de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales que toute personne a droit à un procès équitable et des articles 742 et suivants du Code de procédure pénale que la révocation du sursis avec mise à l'épreuve pour inexécution des obligations particulières dont il est assorti n'est qu'une possibilité pour le tribunal correctionnel saisi spécialement par le juge de l'application des peines ; que dès lors, en décidant d'ores et déjà, dans le cadre d'une instance en contestation de l'ordonnance du juge de l'application des peines, que l'inobservation de la contribution mise à la charge du demandeur entraînera la révocation du sursis avec mise à l'épreuve, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que par arrêt du 2 juin 1989, devenu définitif, Jean-Louis X..., déclaré coupable d'abus de confiance aggravé, a été condamné à une amende de 1 500 000 francs ainsi qu'à la peine de 5 ans d'emprisonnement assortie d'un sursis avec mise à l'épreuve pendant 5 ans " sous réserve du règlement, dans le délai de 2 ans à compter de l'arrêt, de la totalité des sommes dues au Trésor, y compris l'amende pénale " ;
Attendu que le montant de l'amende n'ayant pas été payé, le juge de l'application des peines, par ordonnance du 31 octobre 1991, a soumis le condamné, en application de l'article R.58.7° du Code de procédure pénale, à l'obligation de justifier du versement de la somme mensuelle de 7 000 francs au Trésor public sous peine d'encourir la révocation du sursis probatoire ;
Attendu que, pour valider cette ordonnance, sauf à fixer à 5 000 francs le montant des versements mensuels, l'arrêt attaqué énonce, par motifs adoptés, que le juge de l'application des peines tient de l'article 739 du Code de procédure pénale le pouvoir d'imposer au condamné, au cours du délai d'épreuve, l'observation d'une ou plusieurs obligations prévues à l'article R. 58 du même Code ; qu'il peut en outre aménager ou supprimer les obligations auxquelles celui-ci a été soumis ;
Attendu qu'en statuant ainsi, abstraction faite de motifs surabondants relatifs au fractionnement de l'amende, ou justement critiqués par le deuxième moyen, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre le condamné dans le détail de son argumentation, a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
D'où il suit que les moyens doivent être écartés ;
Et sur le troisième moyen subsidiaire de cassation pris de la violation des articles 739 et R.58 du Code de procédure pénale, 591 et 593 du même Code, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a fixé à 5 000 francs la somme que X... devra acquitter mensuellement au Trésor public ;
" aux motifs qu'il résulte du dossier que X... dispose d'un revenu brut mensuel de 18 000 francs et qu'il a des charges mensuelles incompressibles de 4 500 francs ;
" alors que le jugement dont appel avait relevé que l'exposant dispose d'un revenu brut mensuel d'environ 15 000 francs et, au terme d'une analyse minutieuse des différentes charges mensuelles incompressibles invoquées, avait évalué celles-ci à 7 300 francs ; qu'en ne s'expliquant aucunement ni sur ce qui l'a conduite à majorer de 3 000 francs le revenu brut mensuel ni sur ce qui l'a conduite à réduire de 7 300 francs à 4 500 francs le montant des charges mensuelles incompressibles et à réfuter ainsi la motivation circonstanciée des premiers juges, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle et a entaché sa décision d'une insuffisance de motifs " ;
Attendu que le moyen qui, sous le couvert de défaut de motifs et manque de base légale, remet en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des facultés contributives du condamné placé sous le régime de la mise à l'épreuve, ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 92-81942
Date de la décision : 05/01/1993
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

PEINES - Sursis - Sursis avec mise à l'épreuve - Obligations spécialement imposées - Juge de l'application des peines - Pouvoirs.

Le juge de l'application des peines tient de l'article 739 du Code de procédure pénale le pouvoir d'imposer au condamné placé sous le régime du sursis probatoire, au cours du délai d'épreuve, une ou plusieurs obligations prévues à l'article R. 58 du même Code. En outre, il peut à tout moment aménager ou supprimer les obligations auxquelles celui-ci a été soumis.


Références :

Code de procédure pénale 739, R58

Décision attaquée : Cour d'appel de Limoges (chambre correctionnelle), 06 mars 1992


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 05 jan. 1993, pourvoi n°92-81942, Bull. crim. criminel 1993 N° 5 p. 9
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1993 N° 5 p. 9

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Jean Simon, conseiller le plus ancien faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. Galand.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Ferrari.
Avocat(s) : Avocat : M. Cossa.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1993:92.81942
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