REJET du pourvoi formé par :
- X... Bernard,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Caen, chambre correctionnelle, en date du 27 janvier 1992, qui, pour délit de blessures involontaires et pour infractions aux règles d'hygiène et de sécurité du travail, l'a condamné à une amende de 11 000 francs, ainsi qu'à l'affichage et la publication de la décision.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation : (sans intérêt) ;
Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 4, 5, 6, 7, 11, 20 du décret du 29 novembre 1977, L. 263-2 et L. 263-6 du Code du travail, 320 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, défaut de réponse à conclusions :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable d'avoir omis de procéder à l'inspection préalable des lieux en vue de déterminer les mesures de sécurité à prévoir, d'avoir omis de dresser procès-verbal détaillé de la visite commune d'inspection, et du délit de blessures involontaires ;
" aux motifs que le procès-verbal du 18 août 1986 qui ne répond pas aux exigences réglementaires ne faisait pas la preuve de ce que MM. X... et Z... avaient procédé à l'inspection commune des lieux ; que la plate-forme du filtre qui n'était munie d'aucune protection et débouchait sur le vide, même si elle était conforme aux normes de construction des filtres, présentait un danger pour le personnel de l'entreprise intervenant qui devait y travailler ; qu'en n'informant pas MM. Z... et A... des risques professionnels que comportait cette installation, en ne prévoyant aucune mesure particulière de sécurité et en ne mentionnant pas cette zone dangereuse dans le procès-verbal d'inspection commune, Bernard X... avait contrevenu aux dispositions du décret du 29 novembre 1977 ; que la fourniture d'un harnais par l'employeur de la victime n'était pas de nature à garantir celle-ci des risques de chute dans la mesure où les travaux nécessitaient des changements de place fréquents et où n'existait sur l'installation aucun point d'ancrage véritable, ainsi que le contrôleur du Travail l'avait relevé ; que la faute commise par le prévenu était en relation directe avec la chute de Patrice Y... et les blessures causées par cette chute ;
" alors, d'une part, que l'article 11 du décret du 29 novembre 1977 porte que, lorsqu'une entreprise intervenante fait exécuter une partie des travaux dans l'entreprise utilisatrice par un sous-traitant, ce sont le chef de l'entreprise intervenante et le sous-traitant qui sont tenus de se conformer aux dispositions du décret ; que, dès lors qu'en l'espèce, l'entreprise Z... intervenait dans l'usine en exécution d'un contrat permanent d'entretien qui la liait à la SCEE et que l'intervention de l'entreprise A... résultait d'un contrat de sous-traitance entre cette entreprise et l'entreprise Z..., c'était au chef de l'entreprise intervenante et au sous-traitant de se conformer aux prescriptions du décret du 29 novembre 1977 pour effectuer une visite commune et dresser procès-verbal des mesures de sécurité arrêtées, à l'exclusion du chef de la SCEE, l'entreprise utilisatrice avec laquelle ce dernier n'avait aucun lien ; qu'en déclarant, cependant, le prévenu coupable d'avoir omis de procéder à l'inspection commune des lieux et de dresser procès-verbal de cette visite prévoyant les mesures de sécurité à mettre en oeuvre à propos des travaux confiés au sous-traitant par l'entreprise intervenante, la cour d'appel a prononcé une condamnation illégale ;
" alors, d'autre part, que le procès-verbal en date du 18 août 1986 signé par le directeur de la SCEE et le chef de l'entreprise Z... qui mentionne, de façon détaillée, la nature des interventions de la seconde-en particulier intervention sur le filtre-et précise que les mesures de protection à prendre pour prévenir les risques sont le balisage de la zone d'intervention et sa protection répond, sans insuffisance, aux exigences de l'article 20 du décret du 29 novembre 1977 ; qu'ainsi, c'est à tort que la cour d'appel a retenu le prévenu dans les liens de la prévention ;
" alors, enfin, que les constatations d'un contrôleur du Travail font foi jusqu'à preuve du contraire ; qu'en l'espèce, le prévenu faisait valoir qu'il résultait d'un constat d'huissier en date du 9 janvier 1989 que le filtre et sa plate-forme possédaient de multiples points d'ancrage pour un arrimage ; qu'en se bornant à énoncer que, selon le contrôleur du Travail, il n'existait sur la plate-forme aucun point d'ancrage véritable, sans répondre à ce moyen péremptoire de défense qui établissait que le prévenu n'avait pas à signaler ce risque particulier, la cour d'appel n'a pas légalement justifié la déclaration de culpabilité " ;
Attendu, d'une part, que l'obligation imposée par l'article 11 du décret précité au chef de l'entreprise intervenante qui a sous-traité une partie des travaux ne dispense pas le chef de l'entreprise utilisatrice de prendre avec le chef de l'entreprise intervenante les mesures prévues par ledit décret ainsi qu'il résulte de l'alinéa 2 dudit article ;
Attendu, d'autre part, qu'il n'importe que les juges n'aient pas répondu à des conclusions inopérantes relatives à la protection individuelle des salariés de l'entreprise intervenante, dès lors que Bernard X... n'était pas poursuivi pour avoir omis de fournir des protections individuelles mais pour avoir omis de procéder à une inspection qui aurait révélé les dangers d'une plate-forme débouchant sur le vide et d'une trappe dont les ferrures saillantes comportaient un risque de chute pour les ouvriers de l'entreprise intervenante ;
Attendu enfin que les juges ont souverainement apprécié que le procès-verbal d'inspection produit par le prévenu ne constituait pas le procès-verbal détaillé exigé par l'article 20 du décret du 29 novembre 1977 ;
Que le moyen doit donc être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.