La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/11/1992 | FRANCE | N°89-17472

France | France, Cour de cassation, Assemblee pleniere, 05 novembre 1992, 89-17472


ARRÊT N° 1

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu, selon l'arrêt infirmatif attaqué (Pau, 11 mai 1989) que M. Y... et Mlle X..., employés de la même société, ont tenu, sur l'ordre de leur employeur, un stand dans une foire-exposition ; que M. Y..., en utilisant son automobile, raccompagnait sa collègue chez elle, lorsqu'il a perdu le contrôle de son véhicule ; que, blessée, Mlle X... a exercé contre M. Y... une action en réparation, selon le droit commun, de la partie de son préjudice non couverte par les prestations de la sécurité sociale ;>
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli cette demande, alors...

ARRÊT N° 1

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu, selon l'arrêt infirmatif attaqué (Pau, 11 mai 1989) que M. Y... et Mlle X..., employés de la même société, ont tenu, sur l'ordre de leur employeur, un stand dans une foire-exposition ; que M. Y..., en utilisant son automobile, raccompagnait sa collègue chez elle, lorsqu'il a perdu le contrôle de son véhicule ; que, blessée, Mlle X... a exercé contre M. Y... une action en réparation, selon le droit commun, de la partie de son préjudice non couverte par les prestations de la sécurité sociale ;

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli cette demande, alors que, d'une part, l'accident au cours duquel Mlle X... a été blessée s'étant produit au retour d'un déplacement exceptionnel effectué sur les instructions de l'employeur, mission qui ne pouvait s'achever qu'au moment où la salariée aurait regagné son domicile, la cour d'appel aurait violé les articles L. 411-1 et L. 411-2 (anciennement L. 415 et L. 415-1) du Code de la sécurité sociale, en considérant qu'il s'agissait d'un accident de trajet ; alors que, d'autre part, la survenance de l'accident n'entrant pas dans les prévisions de l'article L. 411-2 du Code de la sécurité sociale sur les accidents de trajet, notamment quant au caractère habituel du trajet effectué, ce qui, par voie de conséquence, impliquait qu'il s'agissait d'un accident de travail stricto sensu, la cour d'appel aurait violé cet article en qualifiant l'accident d'accident de trajet permettant un recours de droit commun à l'encontre de M. Y... ; et alors qu'enfin, la cour d'appel aurait omis de répondre aux conclusions de M. Y... faisant état de la position prise par la caisse primaire d'assurance maladie des Landes (CPAM) qui avait considéré qu'il s'agissait d'un accident du travail ne pouvant être pris en charge au titre de l'accident de trajet, ce qui excluait tout recours de l'organisme social à l'encontre de M. Y..., préposé de l'employeur de Mlle X... ;

Mais attendu que constitue un accident de trajet tout accident dont est victime le travailleur à l'aller ou au retour entre le lieu où s'accomplit le travail et sa résidence dans des conditions où il n'est pas encore ou n'est plus soumis aux instructions de l'employeur ;

Et attendu que l'arrêt relève qu'ayant terminé leur travail à la foire-exposition, Mlle X... et M. Y... sont montés dans la voiture de celui-ci, qui a pris la route pour ramener sa collègue à son domicile et retient que l'accident s'est produit à un moment où ne s'exerçait pas l'autorité de l'employeur sur la victime qui avait le choix du mode de transport pour le retour à son domicile ;

Que de ces constatations, la cour d'appel, qui, n'étant pas liée par la position prise par la CPAM sur la nature de l'accident, n'était pas tenue de répondre à un simple argument, en a déduit à bon droit que cet accident constituait un accident de trajet au sens de l'article L. 411-2 du Code de la sécurité sociale ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi MOYEN ANNEXÉ

Moyen produit par la SCP Rouvière, Lepître et Boutet, avocat aux Conseils, pour M. Y....

MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que l'accident dont Mlle X... avait été victime, le 19 mai 1985, était un accident de trajet, et d'avoir en conséquence condamné M. Y... à prendre en charge l'intégralité du préjudice subi par la victime.

AU MOTIFS QU'il n'est pas contesté que M. Y... raccompagnait sa collègue de travail, Mlle X..., à son domicile à Saint-Paul-les-Dax ; que, cependant, une vendeuse, qu'un collègue ramène dans sa voiture personnelle à son domicile à l'issue d'une journée de travail exceptionnelle, mais après un certain laps de temps, en l'espèce une demi-heure, laps de temps pendant lequel l'on ignore quelle a été leur occupation, qui a été victime d'un accident de la circulation à un moment où ne s'exerçait pas l'autorité de l'employeur et qui avait le choix de son mode de transport de retour à son domicile, n'est pas victime d'un accident offrant le caractère d'un accident du travail proprement dit, mais bien d'un accident de trajet au sens de l'article L. 415-1 du Code de la sécurité sociale, et peut actionner en réparation du droit commun l'auteur de cet accident ;

1°) ALORS QUE ne peut être considéré comme accident de trajet que celui qui survient au cours du trajet habituellement effectué à l'aller et au retour entre la résidence principale ou secondaire du salarié et le lieu de son travail ; qu'il n'en est pas ainsi de l'accident qui survient au cours d'une mission commandée par l'employeur, peu important les conditions d'exécution et de prise en charge de ce parcours ; qu'en l'espèce, n'étant pas contesté que l'accident au cours duquel Mlle X... a été blessée s'est produit au retour d'un déplacement exceptionnel effectué sur les instructions de la société Shop salon, employeur des trois salariés, mission qui ne pouvait s'achever qu'au moment où ils auraient regagné leur domicile, la cour d'appel ne pouvait, sans violer les dispositions des articles L. 415 et L. 415-1 du Code de la sécurité sociale, considérer qu'il s'agissait pour la victime d'un accident de trajet ;

2°) ALORS QUE la cour d'appel ne pouvait qualifier l'accident dont Mlle X... avait été victime d'accident de trajet lui permettant un recours de droit commun à l'encontre de M. Y..., dès lors que la survenance du sinistre ne rentrait pas dans les prévisions de l'article L. 415-1 du Code de la sécurité sociale sur les accidents de trajet, ce qui, par voie de conséquence, impliquait qu'il s'agissait d'un accident du travail stricto sensu ; qu'ainsi l'arrêt est à nouveau entaché d'une violation de l'article L. 415-1 du Code de la sécurité sociale ;

3°) ALORS QUE la cour d'appel ne pouvait retenir la qualification d'accident de trajet sans répondre aux conclusions de M. Y... faisant valoir que la caisse primaire d'assurance maladie des Landes elle-même avait spécifié à Mlle X... qu'il s'agissait d'un accident du travail qui ne pouvait être pris en charge au titre accident de trajet, ce qui excluait que l'organisme social puisse exercer un recours à l'encontre de M. Y..., préposé de la société Shop salon, employeur de Mlle X... ; qu'ainsi l'arrêt est entaché d'une violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Assemblee pleniere
Numéro d'arrêt : 89-17472
Date de la décision : 05/11/1992
Sens de l'arrêt : Rejet

Analyses

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Temps et lieu du travail - Accident de trajet - Distinction avec l'accident du travail

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Temps et lieu du travail - Contestation - Décision de la Caisse - Portée - Portée à l'égard de l'auteur de l'accident

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Temps et lieu du travail - Définition - Salarié en mission - Retour de mission - Salarié ayant recouvré son indépendance

SPECTACLES - Artiste - Accident du travail - Temps et lieu du travail - Accident de trajet - Distinction avec l'accident du travail

Constitue un accident de trajet tout accident dont est victime le travailleur, à l'aller ou au retour, entre le lieu où s'accomplit le travail et sa résidence dans des conditions où il n'est pas encore ou n'est plus soumis aux instructions de l'employeur. Ainsi, c'est à bon droit que, sans être liés par la position prise par la caisse primaire d'assurance maladie, les juges du fond ont qualifié d'accident de trajet l'accident survenu à une salariée, blessée dans la voiture d'un de ses collègues qui la ramenait à son domicile, après avoir tenu avec elle, sur l'ordre de leur employeur, un stand dans une foire-exposition dès lors que l'accident s'est produit à un moment où ne s'exerçait pas l'autorité de l'employeur sur la victime qui avait le choix du mode de transport pour le retour à son domicile (arrêt n° 1). De même est à bon droit qualifié de trajet l'accident survenu aux membres d'un orchestre qui, engagés pour animer un bal nocturne dans une ville voisine, regagnaient leur domicile dans l'automobile de l'un d'eux, après l'exécution de leur prestation dès lors que le contrat ne comportait aucune indication quant à leur mode de déplacement pour lequel ils étaient libres de choisir l'itinéraire et le mode de locomotion et qu'ils ne se trouvaient plus sous l'autorité de leur employeur, ayant recouvré leur entière liberté (arrêt n° 2).


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, 11 mai 1989

A RAPPROCHER : Chambre criminelle, 1976-12-14 , Bulletin criminel 1976, n° 364, p. 927 (rejet) ; Chambre sociale, 1983-12-07 , Bulletin 1983, V, n° 596, p. 426 (cassation) ; Chambre criminelle, 1989-01-24 , Bulletin criminel 1989, n° 30, p. 91 (cassation) ; Chambre sociale, 1989-06-28 , Bulletin 1989, V, n° 489, p. 296 (cassation) ; Chambre sociale, 1990-10-11 , Bulletin 1990, V, n° 470, p. 284 (cassation), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Ass. Plén., 05 nov. 1992, pourvoi n°89-17472, Bull. civ. 1992 A.P. N° 11 p. 23
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1992 A.P. N° 11 p. 23

Composition du Tribunal
Président : Premier président : M. Drai
Avocat général : Avocat général :M. Kessous
Rapporteur ?: Rapporteur :Mme Dieuzeide
Avocat(s) : Avocats :la SCP Rouvière, Lepître et Boutet (arrêt n° 1), M. Parmentier, Mme Baraduc-Bénabent (arrêt n° 2).

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1992:89.17472
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award