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Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que les divers défendeurs au pourvoi, tous producteurs de lait, ont assigné la coopérative des agriculteurs de Bretagne (Coopagri) le 15 octobre 1985 en nullité de la pratique dite du " forfait-arrêt " qu'elle a mise en place pour rémunérer le prix du lait ; qu'ils ont demandé au tribunal de lui enjoindre sous astreinte de mettre fin à cette pratique ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la Coopagri reproche à l'arrêt confirmatif attaqué (Rennes 16 février 1989) d'avoir fait droit à ces demandes, au motif que l'article 7 de l'arrêté du 10 juillet 1985, relatif à la détermination des quantités de référence des acheteurs de lait pour la période du 1er avril 1985 au 31 mars 1986, dispose " qu'il est interdit aux acheteurs de lait d'appliquer un système de rémunération conduisant à privilégier de manière directe ou indirecte les producteurs livrant les plus grandes quantités de lait ", alors, selon le moyen, que la cour d'appel, après avoir établi la licéité du coût de la collecte du lait fixé indépendamment des quantités livrées, et de l'augmentation du prix de base résultant de l'abandon des primes de quantités, a considéré que les deux mesures prises simultanément entraient dans le cadre de cette disposition, et a étendu celle-ci, qui ne concerne que la rémunération, au solde du compte producteur, et qu'en statuant comme elle l'a fait, elle a violé par fausse application le texte susvisé ;
Mais attendu que procédant à l'analyse du système dit du " forfait-arrêt " mis en place par la Coopagri, les juges du second degré ont constaté qu'il consistait, d'une part, à instaurer, au titre de frais de collecte, un prélèvement mensuel forfaitaire de 100 francs sur le prix du lait acheté à chaque producteur, et ce, quelle que soit la quantité de lait livrée, et, d'autre part, à augmenter de manière uniforme d'un centime le prix de base du litre de lait ; qu'ils ont relevé que la combinaison de ces deux mesures aboutissait à ce résultat que le producteur qui livre une quantité supérieure à 10 000 litres obtient le remboursement du prélèvement de 100 francs, puis une augmentation effective du prix de chaque litre dépassant cette quantité, ce qui constitue pour lui un avantage dont ne bénéficient pas les producteurs qui livrent des quantités inférieures ; que, dès lors, en statuant ainsi, la cour d'appel a fait une juste application du texte invoqué et que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que la Coopagri reproche encore à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la nullité du système de " forfait-arrêt " comme étant contraire à l'article 7 de l'arrêté du 10 juillet 1985, alors, selon le moyen, que dans les domaines couverts par une organisation commune du marché, les Etats membres de la Communauté économique européenne (CEE) ne peuvent plus intervenir par des dispositions nationales prises unilatéralement dans le mécanisme de formation des prix ; qu'en l'espèce, la cour d'appel qui, dans un domaine déjà couvert par une organisation commune du marché, a, cependant, fait application d'une disposition nationale relative à la formation des prix, a ainsi violé l'article 5, alinéa 2, du traité de Rome et le règlement CEE n° 804/68 ;
Mais attendu que l'arrêté du 10 juillet 1985 a été pris au visa du règlement communautaire n° 804/68 portant organisation commune des marchés du lait et des produits laitiers, et des règlements communautaires pris en 1984 et 1985 pour fixer les modalités de mise en oeuvre de cette organisation, notamment pour l'application des prélèvements ou " quotas laitiers " ; que son article 7 loin d'aller à l'encontre de ce règlement, dont il constitue une mesure d'application, a pour objet de renforcer l'effet des limitations de la production qu'ils instaurent, en interdisant l'incitation à la production par un système de rémunération avantageant les producteurs qui vendent les plus fortes quantités de lait ; que, dès lors, en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel n'a méconnu aucun des textes invoqués ; d'où il suit que le second moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi