La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/06/1992 | FRANCE | N°91-16797

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 02 juin 1992, 91-16797


.

Vu l'article 177 du Traité instituant la Communauté économique européenne ;

Attendu que, selon ce texte, la Cour de justice des Communautés européennes est compétente pour statuer à titre préjudiciel sur l'interprétation de ce Traité ; que, lorsqu'une telle question est soulevée dans une affaire pendante devant une juridiction nationale dont les décisions ne sont pas susceptibles d'un recours juridictionnel de droit interne, cette juridiction est tenue de saisir la Cour de justice ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 avril 1991), que la société La

boratoires de prothèses oculaires (LPO) commercialise sur prescriptions médicales,...

.

Vu l'article 177 du Traité instituant la Communauté économique européenne ;

Attendu que, selon ce texte, la Cour de justice des Communautés européennes est compétente pour statuer à titre préjudiciel sur l'interprétation de ce Traité ; que, lorsqu'une telle question est soulevée dans une affaire pendante devant une juridiction nationale dont les décisions ne sont pas susceptibles d'un recours juridictionnel de droit interne, cette juridiction est tenue de saisir la Cour de justice ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 avril 1991), que la société Laboratoires de prothèses oculaires (LPO) commercialise sur prescriptions médicales, par l'intermédiaire de ses agences ou de distributeurs liés avec elle par des contrats de franchise, des lentilles de contact, des implants intra-oculaires et leurs produits connexes ; que, s'estimant victime des agissements exercés à son encontre par plusieurs syndicats d'opticiens-lunetiers qui ont demandé aux juridictions judiciaires de lui interdire la vente de ces produits en invoquant les dispositions des articles L. 505, L. 508 et L. 509 du Code de la santé publique, elle a saisi les juges du fond pour qu'ils sanctionnent de telles pratiques qu'elle considère comme anticoncurrentielles ; que la cour d'appel a débouté la société LPO de sa demande, et, faisant droit à la demande reconventionnelle des syndicats appelés dans la cause, a interdit sous astreinte à cette entreprise de poursuivre la commercialisation des lentilles de contact auprès des particuliers dans les points de vente contrôlés par elle et exploités par des responsables non titulaires du diplôme d'opticien-lunetier ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que la société LPO fait grief à l'arrêt de lui avoir interdit de livrer des lentilles de contact et leurs produits d'entretien, alors que, selon le pourvoi, d'une part, toute réglementation des Etats membres susceptible d'entraver directement ou indirectement, actuellement ou potentiellement, le commerce intra-communautaire est à considérer comme mesure d'effet équivalent à des restrictions quantitatives même si elle affecte aussi bien la vente des produits nationaux que celle des produits importés ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 30 du traité de Rome ; alors que, d'autre part, en l'absence d'une réglementation commune de la commercialisation d'un produit, quelle que soit la qualification de celui-ci en droit national, il appartient à la juridiction nationale de vérifier si le monopole conféré aux titulaires d'un diplôme déterminé pour sa commercialisation est nécessaire à la protection de la santé ou des consommateurs et si ces deux objectifs ne peuvent pas être atteints par des mesures moins restrictives du commerce intra-communautaire ; qu'en s'abstenant de rechercher si le monopole dont se prévalent les opticiens-lunetiers pour vendre en l'état les lentilles de contact est nécessaire à la protection de la santé et si ce dernier impératif ne peut pas être atteint par des mesures moins restrictives, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des dispositions des articles 30 et 34 du traité de Rome ;

Attendu que le Code de la santé publique édicte : article L. 505 :

" nul ne peut exercer la profession d'opticien-lunetier détaillant s'il n'est pourvu du brevet professionnel d'opticien-lunetier, du diplôme d'élève breveté des écoles nationales professionnelles, section d'optique-lunetterie, du certificat d'études de l'Ecole des métiers d'optique, ou de tout autre titre désigné par arrêté du ministre de l'Education nationale, du ministre du Commerce, du ministre de la Santé publique et de la population et du ministre des Affaires économiques " ; article L. 508 : " les établissements commerciaux dont l'objet principal est l'optique-lunetterie, leurs succursales et les rayons d'optique-lunetterie des magasins ne pourront être dirigés ou gérés que par une personne remplissant les conditions requises pour l'exercice de la profession d'opticien-lunetier ; le colportage des verres correcteurs d'amétropie est interdit ; aucun verre correcteur ne pourra être délivré à une personne âgée de moins de 16 ans sans ordonnance médicale " ; que les infractions à ces dispositions sont réprimées par des sanctions pénales prévues par l'article L. 509 du même Code ; qu'il importe de savoir si l'article 30 du Traité disposant que toutes mesures d'effet équivalent à des restrictions quantitatives à l'importation sont interdites entre les Etats membres, sous réserve que ces restrictions ne soient pas justifiées par divers motifs visés par l'article 36 du Traité concernant, notamment, la protection de la santé et de la vie des personnes, doit être interprété en ce sens qu'il serait applicable à des situations semblables à celles entrant dans les prévisions des textes précités ;

PAR CES MOTIFS ;

SURSEOIT à statuer jusqu'à ce que la Cour de justice se soit prononcée à titre préjudiciel sur l'interprétation des articles suivants du Traité et de tout autre texte applicable ;

1°) L'article 30 du Traité doit-il être interprété en ce sens qu'il serait applicable à des ventes de lentilles de contact et de leurs produits connexes, soumises à des conditions semblables à celles prescrites par les articles L. 505 et L. 508 du Code de la santé publique réservant aux seuls titulaires du diplôme d'opticien-lunetier la vente d'optique-lunetterie et de verres correcteurs ?

2°) Une telle législation peut-elle être jusifiée par des exigences impératives tenant à la protection des consommateurs ou par des raisons de protection de la santé et de la vie des personnes telles qu'elles figurent à l'article 36 du Traité instituant la Communauté économique européenne ?

RENVOIE à la Cour de justice des Communautés européennes siégeant à Luxembourg


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 91-16797
Date de la décision : 02/06/1992
Sens de l'arrêt : Sursis à statuer et renvoi devant la cour de justice des communautés européennes
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

COMMUNAUTE ECONOMIQUE EUROPEENNE - Libre circulation des marchandises - Restrictions quantitatives à l'importation - Mesure d'effet équivalent - Opticien-lunetier - Vente de matériels d'optique-lunetterie - Monopole - Interprétation du traité de Rome

PROFESSIONS MEDICALES ET PARAMEDICALES - Médecin chirurgien - Auxiliaires médicaux - Opticien-lunetier - Vente de matériels d'optique-lunetterie - Monopole - Articles 30 et 36 du traité de Rome - Interprétation - Sursis à statuer

En l'état d'un litige opposant une société, commercialisant sur prescriptions médicales par l'intermédiaire de ses agences ou de distributeurs des lentilles de contact, des implants intra-oculaires et leurs produits connexes, et plusieurs syndicats d'opticiens-lunetiers, il y a lieu de demander à la Cour de justice des Communautés européennes sur le fondement de l'article 177 du Traité instituant la Communauté économique européenne : 1° Si l'article 30 du Traité doit être interprété en ce sens qu'il serait applicable à des ventes de lentilles de contact et de leurs produits connexes soumises à des conditions semblables à celles prescrites par les articles L. 505 et L. 508 du Code de la santé publique réservant aux seuls titulaires du diplôme d'opticien-lunetier la vente d'optique lunetterie et de verres correcteurs ?. 2° Une telle législation peut-elle être justifiée par des exigences impératives tenant à la protection des consommateurs ou par des raisons de protection de la santé et de la vie des personnes telles qu'elles figurent à l'article 36 dudit Traité ?.


Références :

Code de la santé publique L505, L508
traité de Rome du 25 mars 1957 art. 30, art. 36, art. 177

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 15 avril 1991


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 02 jui. 1992, pourvoi n°91-16797, Bull. civ. 1992 IV N° 216 p. 151
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1992 IV N° 216 p. 151

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Bézard
Avocat général : Avocat général :Mme le Foyer de Costil
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Léonnet
Avocat(s) : Avocats :la SCP Defrénois et Levis, la SCP Lemaitre et Monod, la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1992:91.16797
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award