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15/04/1992 | FRANCE | N°90-17704

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 15 avril 1992, 90-17704


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Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 7 juin 1990), que, par acte authentique du 2 octobre 1978, les époux X... ont vendu à l'Etat une propriété de 64 hectares, dont quarante-deux se trouvaient dans la zone d'emprise délimitée par la déclaration d'utilité publique relative à l'extension du camp militaire du plateau du Larzac ; que, par suite de l'abandon de ce projet, les époux X... ont demandé, pour la totalité de leur terrain, une rétrocession qui leur a été accordée pour la parcelle primitivement incluse dans l'emprise ; qu'une

vente amiable ayant été projetée pour la partie restante, la Société d'aména...

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Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 7 juin 1990), que, par acte authentique du 2 octobre 1978, les époux X... ont vendu à l'Etat une propriété de 64 hectares, dont quarante-deux se trouvaient dans la zone d'emprise délimitée par la déclaration d'utilité publique relative à l'extension du camp militaire du plateau du Larzac ; que, par suite de l'abandon de ce projet, les époux X... ont demandé, pour la totalité de leur terrain, une rétrocession qui leur a été accordée pour la parcelle primitivement incluse dans l'emprise ; qu'une vente amiable ayant été projetée pour la partie restante, la Société d'aménagement foncier Aveyron-Lot-Tarn (SAFALT) a notifié à l'Etat sa décision d'exercer son droit de préemption ;

Attendu que les époux X... reprochent à l'arrêt de les débouter de leur demande en annulation de la préemption exercée par la SAFALT, alors, selon le moyen, 1°) qu'il résulte de l'article L. 12-6, dernier alinéa, du Code de l'expropriation que le droit de rétrocession, institué en faveur des anciens propriétaires, n'est écarté que pour les immeubles acquis sur réquisition du propriétaire " qui resteraient disponibles après exécution des travaux " ; qu'après avoir constaté que la demande de rétrocession des époux X... avait été formée " après abandon du projet d'extension du camp militaire ", ce dont il se déduisait nécessairement que les travaux prévus n'avaient pas été exécutés, la cour d'appel, qui a cependant dénié à la clause de rétrocession litigieuse un caractère prioritaire pour les parcelles acquises sur réquisition des époux X..., a violé, par fausse application, l'article L. 12-6, dernier alinéa, du Code de l'expropriation ; 2°) que nul ne peut être contraint de céder sa propriété si ce n'est pour cause d'utilité publique ; qu'en considérant que la clause de la convention d'acquisition, selon laquelle " le droit de rétrocession expressément réservé à M. X... et Mme X... (...) pour les biens cédés dans l'hypothèse où ils ne seraient pas utilisés par l'Etat ", n'avait " aucun caractère prioritaire du fait de la loi ", quand celle-ci créait nécessairement, à la charge de l'Etat, l'obligation de rétrocéder les terres acquises à leurs anciens propriétaires, dès lors que la demande de rétrocession était fondée sur l'abrogation de la déclaration d'utilité publique, la cour d'appel a violé, par refus d'application, les dispositions de l'article 545 du Code civil ; 3°) qu'en considérant que pour les biens n'ayant pas fait l'objet de l'expropriation, la clause de rétrocession ne constituait qu'un simple pacte de préférence, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ladite clause, laquelle n'opérait aucune distinction parmi les biens cédés ; que la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu qu'ayant, par motifs propres et adoptés, retenu, sans dénaturation, que les époux X... n'avaient obtenu, lors de la cession amiable de l'ensemble de leur domaine rural à l'Etat le 2 octobre 1978, qu'un simple pacte de préférence pour ce qui concerne la partie des biens cédés se situant hors de l'emprise concernée par l'expropriation, la cour d'appel en a exactement déduit que cette convention ne pouvait faire obstacle à l'exercice par la SAFALT de son droit de préemption, institué par la loi ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le second moyen :

Attendu que les époux X... reprochent à l'arrêt de les débouter de leur demande en annulation de la préemption exercée par la SAFALT, alors, selon le moyen, qu'une SAFER ne peut diviser une propriété équilibrée pour agrandir ou équilibrer d'autres exploitations ; qu'en se bornant à constater que la mise à disposition d'une surface complémentaire de 22 hectares en faveur de Mlle Y..., déjà exploitante d'un domaine d'une superficie de 232 hectares, " pouvait être de nature à rentabiliser ses activités ", sans rechercher si, en supprimant une surface de 22 hectares à une propriété d'une superficie de 64 hectares seulement, la SAFALT ne divisait pas ainsi une propriété équilibrée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 7-1 de la loi du 8 août 1962 ;

Mais attendu que la loi du 8 août 1962, en sa rédaction issue de la loi du 29 décembre 1977, n'interdisant pas le démembrement d'une exploitation par l'exercice du droit de préemption de la SAFER, quand bien même cette exploitation s'en trouverait déséquilibrée, la cour d'appel a légalement justifié sa décision, de ce chef, en retenant que les données de la mise en valeur du plateau du Larzac, au travers des exigences de l'élevage ovin extensif, qui peut seul s'y pratiquer, correspondaient aux énonciations de la notification de la décision de préemption, les exploitations devant y atteindre une surface suffisante, et que le souci de permettre l'agrandissement d'un domaine rural et le maintien d'un agriculteur en place autorisait l'opération ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 90-17704
Date de la décision : 15/04/1992
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

1° SOCIETE D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT RURAL - Préemption - Exercice - Obstacle à cet exercice - Bien faisant l'objet d'un pacte de préférence - Bien se situant hors de l'emprise concernée par l'expropriation (non).

1° Ne peut faire obstacle à l'exercice par une SAFER de son droit de préemption institué par la loi un simple pacte de préférence obtenu lors de la cession amiable à l'Etat de l'ensemble d'un domaine rural, pour la partie des biens cédés se situant hors de l'emprise concernée par l'expropriation.

2° SOCIETE D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT RURAL - Préemption - Exercice - Démembrement d'une exploitation équilibrée - Obstacle à une préemption (non).

2° La loi du 8 août 1962, en sa rédaction issue de la loi du 29 décembre 1977, n'interdit pas le démembrement d'une exploitation, par l'exercice du droit de préemption de la SAFER, quand bien même cette exploitation s'en trouverait déséquilibrée.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 07 juin 1990


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 15 avr. 1992, pourvoi n°90-17704, Bull. civ. 1992 III N° 132 p. 82
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1992 III N° 132 p. 82

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Senselme
Avocat général : Avocat général :M. Vernette
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Deville
Avocat(s) : Avocats :MM. Parmentier, Cossa.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1992:90.17704
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