CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- X... Aimé,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, 7e chambre, en date du 17 avril 1991, qui l'a condamné, pour exécution de travaux de construction en méconnaissance des prescriptions du permis de construire, à 50 000 francs d'amende et pour défaut d'affichage dudit permis à 5 000 francs d'amende, a ordonné la mise en conformité de la construction, sous astreinte, ainsi que la publicité de la décision et a prononcé sur les réparations civiles.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles L. 480-5 du Code de l'urbanisme, 593 du Code de procédure pénale, refus d'application du règlement NC1 du plan d'occupation des sols de la commune de Château-Gaillard approuvé le 19 mai 1989, insuffisance de motifs, manque de base légale, excès de pouvoir, en ce que l'arrêt attaqué, rejetant l'exception de sursis à statuer tirée de l'existence d'un recours pendant devant le tribunal administratif et tendant à l'annulation de la décision du maire de Château-Gaillard, notifiée le 16 janvier 1990, portant refus du permis de construire modificatif demandé par le prévenu le 18 juillet 1989, a déclaré ce dernier coupable d'avoir exécuté des travaux non conformes aux obligations imposées par le permis de construire délivré le 12 septembre 1988 et a ordonné la mise en conformité des lieux avec ce permis :
" aux motifs que le recours allégué, formé postérieurement aux poursuites et non suspensif, n'était pas de nature à enlever aux faits constatés leur caractère punissable et que le prévenu avait poursuivi en toute illégalité la construction litigieuse ;
" alors qu'aux termes de l'article NC1 du plan d'occupation des sols de la commune, il n'est fixé aucune hauteur pour les ouvrages d'intérêt général liés aux infrastructures et que c'est à la juridiction administrative qu'il appartenait de dire si les constructions litigieuses relevaient ou non de ce règlement ; qu'ainsi par sa décision, l'arrêt attaqué a excédé ses pouvoirs ;
" alors, d'autre part, que la jurisprudence du Conseil d'Etat admet de façon constante qu'un permis de construire puisse légalement régulariser des travaux déjà entrepris et même terminés ; qu'en ordonnant la mise en conformité sans avoir eu égard aux pouvoirs exclusifs de la juridiction administrative saisie du recours du prévenu fondé sur un moyen sérieux pris de l'article NC1 du plan d'occupation des sols de Château-Gaillard, la cour d'appel, qui d'ores et déjà a fait obstacle à la régularisation, a une nouvelle fois empiété sur les attributions du juge administratif et, sous couvert d'une application stricte de l'article L. 480-5, a commis un nouvel excès de pouvoir " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'Aimé X... a été autorisé à construire un bâtiment à usage de station multi-services, restauration et aire de repos d'une hauteur de 7 mètres ; qu'il a édifié un bâtiment d'une hauteur de 9 mètres comportant un étage supplémentaire, et a été poursuivi notamment pour avoir exécuté des travaux de construction ne respectant pas les obligations du permis de construire ;
Attendu que pour écarter la demande du prévenu tendant à ce qu'il soit sursis à statuer au motif qu'il avait formé un recours contre l'arrêté rejetant sa demande de permis modificatif, la juridiction du second degré retient que les poursuites sont fondées sur la méconnaissance d'un arrêté qui n'a pas été frappé de recours et que l'existence d'un recours contre une décision ultérieure ne peut avoir pour effet d'enlever aux faits constatés leur caractère punissable ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Mais sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles L. 480-5 du Code de l'urbanisme, R. 480-4 du même Code, de l'article 593 du Code de procédure pénale, en ce que l'arrêt attaqué a ordonné la mise en conformité des lieux avec le permis de construire délivré le 12 septembre 1988 ainsi que la publication d'un extrait de l'arrêt aux frais du condamné, sans que le maire ou le fonctionnaire compétent ait présenté des observations écrites ou orales :
" alors qu'aux termes des articles L. 480-5 et R. 480-4 du Code de l'urbanisme, le Tribunal statue sur la mise en conformité des ouvrages au vu des observations écrites ou après audition du maire ou du fonctionnaire compétent ; et que, par cette inobservation d'une formalité substantielle, l'arrêt attaqué a violé les textes précités " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu qu'il résulte des dispositions de l'article L. 480-5 du Code de l'urbanisme qu'en cas de condamnation pour une infraction prévue par l'article L. 480-4 du même Code, la juridiction correctionnelle statue sur la mise en conformité de l'ouvrage, sa démolition ou le rétablissement des lieux en leur état antérieur au vu des observations écrites ou après audition du maire ou du fonctionnaire compétent ;
Attendu que la cour d'appel a déclaré le prévenu coupable d'avoir exécuté des travaux de construction immobilière en méconnaissance des obligations que lui imposait le permis de construire et a ordonné sous astreinte la mise en conformité de la construction ;
Mais attendu qu'aucune mention de l'arrêt ou du jugement ni aucune pièce de procédure n'établit que le maire, le préfet ou son représentant aient été entendus ou aient fourni leurs observations écrites, la simple audition de l'avocat de la commune, partie civile, ne pouvant satisfaire aux exigences de l'article L. 480-5 du Code de l'urbanisme ; qu'ainsi a été méconnu une prescription essentielle dont l'inobservation a constitué une atteinte aux intérêts de la personne poursuivie ;
Que la cassation est, dès lors, encourue de ce chef ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens proposés :
CASSE ET ANNULE l'arrêt de la cour d'appel de Lyon du 17 avril 1991, mais seulement en ce qu'il a ordonné la mise en conformité de la construction, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi dans la limite de la cassation ainsi prononcée :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Lyon autrement composée.