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11/02/1992 | FRANCE | N°91-86066

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 11 février 1992, 91-86066


REJET des pourvois formés par :
- X...,
- Y...,
- Z...,
inculpés de complicité d'abus de blanc-seing et de complicité de tentative d'escroquerie, contre l'arrêt n° 449-91 de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Colmar, en date du 26 septembre 1991, qui a confirmé l'ordonnance par laquelle le juge d'instruction s'est déclaré territorialement compétent.
LA COUR,
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, du 16 décembre 1991, ordonnant la jonction des pourvois et prescrivant leur examen immédiat ;
Vu les mémoires produits ;
Sur le moyen

unique de cassation propre à X... et pris de la violation des articles 4, 43, 52, 80,...

REJET des pourvois formés par :
- X...,
- Y...,
- Z...,
inculpés de complicité d'abus de blanc-seing et de complicité de tentative d'escroquerie, contre l'arrêt n° 449-91 de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Colmar, en date du 26 septembre 1991, qui a confirmé l'ordonnance par laquelle le juge d'instruction s'est déclaré territorialement compétent.
LA COUR,
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, du 16 décembre 1991, ordonnant la jonction des pourvois et prescrivant leur examen immédiat ;
Vu les mémoires produits ;
Sur le moyen unique de cassation propre à X... et pris de la violation des articles 4, 43, 52, 80, 85, 86, 382 et 593 du Code de procédure pénale, 405, 407 et 408 du Code pénal, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a retenu la compétence du juge d'instruction de Mulhouse pour instruire sur la plainte déposée le 23 mars 1987 par la société anonyme A... contre personne non dénommée des chefs d'abus de blanc-seing et de tentative d'escroquerie ;
" aux motifs que l'action publique a été mise en mouvement des chefs d'abus de blanc-seing et de tentative d'escroquerie ; que si l'infraction d'abus de blanc-seing, à la supposer caractérisée, ressortit à la compétence du tribunal de Paris, certaines des manoeuvres de la tentative d'escroquerie poursuivie auraient été commises dans le ressort de la juridiction de Mulhouse ;
" alors, d'une part, que le juge d'instruction ne peut informer qu'en vertu d'un réquisitoire du procureur de la République, même lorsque ces réquisitions sont prises ensuite d'une plainte avec constitution de partie civile ; que les réquisitions du Parquet, en date du 24 avril 1987, ne visaient que l'infraction d'abus de blanc-seing pour l'instruction de laquelle la juridiction de Mulhouse était territorialement incompétente ; qu'ainsi, à défaut de réquisitions régulières portant sur des faits entrant dans sa compétence, le juge d'instruction ne pouvait pas instruire du chef de la tentative d'escroquerie également visée par la plainte ;
" alors, d'autre part, que la règle non bis in idem s'oppose à ce que le même fait soit poursuivi sous deux qualifications différentes ; que l'abus de blanc-seing se réalisant non seulement par la fabrication de l'acte écrit sur le blanc-seing mais encore par l'usage frauduleux qui en a été ultérieurement fait, les poursuites ne pouvaient valablement être engagées du double chef visé par la partie civile puisqu'aux termes de sa plainte, la tentative d'escroquerie n'aurait consisté qu'à produire le blanc-seing ; que, dès lors, seule l'infraction d'usage abusif de blanc-seing pouvant être examinée par la juridiction d'instruction, la chambre d'accusation aurait dû, comme le lui recommandaient les réquisitions du Parquet général, constater que le magistrat instructeur près le tribunal de grande instance de Mulhouse était radicalement incompétent pour instruire sur cette plainte " ;
Et sur le moyen unique de cassation commun à Y... et à Z... et pris de la violation des articles 60, 405 et 407 du Code pénal, 43, 52, 382, 591 et 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que la chambre d'accusation a reconnu la compétence territoriale du juge d'instruction ;
" aux motifs, sur la compétence, que l'action publique a été mise en mouvement des chefs d'abus de blanc-seing et de tentative d'escroquerie ; que la première infraction, à la supposer établie, résulterait aussi bien de la fabrication des mentions de l'acte imputée à B... que de l'usage qui a été fait des rajouts ; que ce premier fait aurait été commis à Genève par un citoyen helvétique, lequel serait justiciable des tribunaux répressifs français non sur le fondement des articles 689 et suivants du Code de procédure pénale mais seulement parce qu'il serait coauteur ou complice à l'étranger de l'usage fait en France de la pièce incriminée et, aussi, en raison de la connexité ; que cet usage ne s'est manifesté d'une manière caractérisée que dans le ressort du tribunal de Paris ; qu'en ce qui concerne la tentative d'escroquerie qu'on ne saurait reprocher à la plaignante de poursuivre sous deux qualifications différentes puisqu'il est fait grief aux inculpés d'avoir utilisé en justice non seulement un blanc-seing mais surtout un engagement dépourvu de cause effective, il y a lieu d'observer que la tentative de ce délit est considérée comme le délit lui-même et qu'en matière d'escroquerie, sont compétents pour connaître des poursuites et le Tribunal dans le ressort duquel ont été commises tout ou partie des manoeuvres frauduleuses et celui dans la circonscription duquel la remise a été effectuée ; que, s'agissant de la remise, elle devait avoir pour objet, en dernière analyse, non l'acte d'engagement ni, non plus, un jugement de condamnation rendu sur la base de cet acte mais les fonds mêmes dont la partie civile avait promis le paiement ; qu'en l'état de l'information, il peut être affirmé que si ce paiement avait été obtenu, il aurait eu lieu dans le ressort de la juridiction de Mulhouse où la plaignante possède des comptes bancaires sur lesquels son ou ses chèques auraient été tirés ; que, s'agissant des manoeuvres frauduleuses, la toute première de celles-ci consistait, aux dires de C..., dans les appels téléphoniques qu'elle aurait reçus à son siège à Kembs pour la déterminer à se rendre chez X... ; que c'est encore à Kembs que la plaignante s'est vue adresser la mise en demeure de D... d'honorer son engagement et où il lui a été délivré l'assignation de cette société tendant au paiement de la somme litigieuse dont, au demeurant, la défenderesse s'est acquittée à concurrence de 50 000 francs ; que, pour l'ensemble de ces motifs tant de droit que de fait, associés dans la mesure utile aux considérations développés par le premier juge, il convient de confirmer la décision entreprise (arrêt pp. 5 et 6, add : ordonnance du 15 mai 1991 pp. 1 et 2) ;
" 1°/ alors que, d'une part, les faits prétendus d'abus de blanc-seing à Paris et Genève ne justifient pas la compétence territoriale du juge d'instruction près le tribunal de grande instance de Mulhouse, ressort dans lequel est seulement située la résidence du plaignant ordinaire ;
" 2°/ alors que, d'autre part, lesdits faits qualifiés de tentative d'escroquerie, en l'absence de remise de fonds et en l'état d'une transaction ultérieurement signée à Paris ne ressortissent pas à la compétence territoriale du juge d'instruction près le tribunal de grande instance de Mulhouse, ressort dans lequel se trouveraient les comptes bancaires de la plaignante " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour reconnaître la compétence territoriale du juge d'instruction, saisi de faits que la partie civile qualifiait à la fois d'abus de blanc-seing et de tentative d'escroquerie, la chambre d'accusation, après avoir observé que l'abus de blanc-seing aurait été commis hors du ressort de ce juge, retient que la tentative d'escroquerie se serait manifestée par des manoeuvres frauduleuses dont les premières auraient consisté en des communications téléphoniques reçues par la partie civile à Kembs, dans le ressort du juge d'instruction de Mulhouse ;
Attendu qu'en l'état de ces seuls motifs, la chambre d'accusation a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ; qu'est compétent territorialement le juge d'instruction dans le ressort duquel a été accompli un acte caractérisant l'un des éléments des manoeuvres frauduleuses qui auraient été perpétrées ; qu'il n'importe que le réquisitoire introductif n'ait visé que le délit d'abus de blanc-seing, dès lors que la plainte avec constitution de partie civile qui saisit le juge des faits dénoncés, les qualifie également de tentative d'escroquerie et que le juge d'instruction n'est pas lié par la qualification provisoire donnée aux faits par le procureur de la République ; qu'enfin la qualification définitive ne pouvant être donnée aux faits poursuivis qu'à la fin de l'information, il ne peut être reproché aux juges de ne pas avoir écarté d'ores et déjà l'une des deux qualifications précitées ;
D'où il suit que les moyens ne peuvent être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 91-86066
Date de la décision : 11/02/1992
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° COMPETENCE - Compétence territoriale - Délit complexe - Lieu où s'est accompli un acte caractérisant un des éléments constitutifs.

1° Le juge d'instruction est territorialement compétent lorsqu'un des éléments constitutifs du délit est commis dans son ressort. En matière d'escroquerie, il suffit que soit perpétré dans ce ressort un acte caractérisant un des éléments des manoeuvres frauduleuses retenues (1).

2° INSTRUCTION - Partie civile - Plainte avec constitution - Obligation pour le juge d'informer - Examen des chefs d'inculpation visés.

2° Le juge d'instruction est tenu d'instruire sur tous les faits dénoncés par la plainte avec constitution de partie civile et d'examiner tous les chefs d'inculpation visés dans cette plainte, quelles que soient les réquisitions du procureur de la République (2).

3° INSTRUCTION - Saisine - Etendue - Faits visés dans le réquisitoire introductif ou dans la plainte avec constitution de partie civile - Qualification donnée aux faits - Portée.

3° Le juge d'instruction peut qualifier librement les faits dont il est saisi, soit par la plainte avec constitution de partie civile, soit par le réquisitoire introductif, et à l'égard desquels il a l'obligation d'informer. Il n'importe qu'il ait pu provisoirement donner à un même fait deux qualifications différentes, dès lors que l'information permettra d'établir celle qui devra être retenue (3).


Références :

Code de procédure pénale 52
Code de procédure pénale 80, 85, 86

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar (chambre d'accusation), 26 septembre 1991

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1983-04-19 , Bulletin criminel 1983, n° 108, p. 247 (cassation partielle). CONFER : (2°). (2) Cf. Chambre criminelle, 1906-12-08 , Bulletin criminel 1906, n° 443, p. 816 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1980-10-28 , Bulletin criminel 1980, n° 278, p. 708 (cassation). CONFER : (3°). (3) Cf. Chambre criminelle, 1972-03-20 , Bulletin criminel 1972, n° 111, p. 276 (cassation) ;

Chambre criminelle, 1980-10-28 , Bulletin criminel 1980, n° 277, p. 706 (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 11 fév. 1992, pourvoi n°91-86066, Bull. crim. criminel 1992 N° 63 p. 158
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1992 N° 63 p. 158

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Le Gunehec
Avocat général : Avocat général :M. Amiel
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Dumont
Avocat(s) : Avocats :la SCP Waquet, Farge et Hazan, M. Bouthors

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1992:91.86066
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