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22/01/1992 | FRANCE | N°90-84368

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 22 janvier 1992, 90-84368


REJET des pourvois formés par :
- X... Roland et Y... Claudine,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes, chambre correctionnelle, en date du 12 juin 1990, qui, pour organisation frauduleuse d'insolvabilité et abandon de famille, a condamné le premier à 1 an d'emprisonnement avec sursis et 30 000 francs d'amende, la seconde à 6 mois d'emprisonnement avec sursis pour complicité d'organisation frauduleuse d'insolvabilité et qui a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits ;
Sur le pr

emier moyen de cassation proposé par Claudine Y... : (sans intérêt) ;
Sur le d...

REJET des pourvois formés par :
- X... Roland et Y... Claudine,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes, chambre correctionnelle, en date du 12 juin 1990, qui, pour organisation frauduleuse d'insolvabilité et abandon de famille, a condamné le premier à 1 an d'emprisonnement avec sursis et 30 000 francs d'amende, la seconde à 6 mois d'emprisonnement avec sursis pour complicité d'organisation frauduleuse d'insolvabilité et qui a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits ;
Sur le premier moyen de cassation proposé par Claudine Y... : (sans intérêt) ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé par Claudine Y... et pris de la violation des articles 41, 59, 60, 404-1 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, défaut de réponse à conclusions, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la demanderesse coupable du délit de complicité d'organisation frauduleuse d'insolvabilité ;
" aux motifs que les dispositions de la loi n° 83-608 du 8 juillet 1983, incriminant l'organisation d'insolvabilité, sont applicables à toutes les infractions d'organisation d'insolvabilité commises postérieurement à son entrée en vigueur quand bien même les condamnations pécuniaires protégées seraient intervenues antérieurement à cette entrée en vigueur ; qu'en l'espèce, X... a été condamné :
"- par la cour d'appel de Nîmes, le 27 avril 1982, à payer à Anita Z... une pension alimentaire de 1 000 francs par mois, indexée à titre de part contributive à l'entretien de son enfant Sabrina Z...,
"- par la cour d'appel de Nîmes, le 14 avril 1983, à payer une indemnité de 3 000 francs ainsi qu'une somme de 2 000 francs, par application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, à Anita Z... pour abandon de famille,
"- par le tribunal correctionnel de Nîmes, le 8 novembre 1985, à payer à Anita Z... une indemnité de 5 000 francs pour abandon de famille ; que toutes ces condamnations pécuniaires sont protégées par l'article 404-1 du Code pénal ;
" que l'examen des différents comptes bancaires qui ont été ouverts au nom de X... révèle que d'importantes sommes ont été régulièrement versées sur ces comptes pour être retirées par l'intéressé presque aussitôt ; que la méthode utilisée a pour conséquence de maintenir la balance du compte à un niveau proche de l'équilibre ; que X... ne fournit aucune explication justifiée à ces importants mouvements de sommes ; que la demanderesse a acquis avec son père, Ferdinand Y..., la totalité des parts de la société Brasserie moderne, détenues par X... selon les actes suivants passés en l'étude de Me A..., notaire à Bessèges (30) :
"- le 11 janvier 1984, 500 actions par Claudine Y... au prix de 200 000 francs, outre 15 800 francs de frais, payés en espèces à hauteur de 51 000 francs, par des fonds provenant de son livret de Caisse d'épargne et de son livret épargne populaire à hauteur de 78 000 francs et du livret de Caisse d'épargne de sa fille à hauteur de 15 000 francs, par un chèque bancaire de 7 800 francs et par la remise de titres au porteur pour un prix de 64 000 francs,
"- le 25 février 1984, 300 actions par Claudine Y... au prix de 80 000 francs outre les frais réglés par chèque bancaire,
"- le 14 décembre 1984, 199 actions par Ferdinand Y... au prix de 20 000 francs réglés le jour même entre les mains du notaire ;
" que les rapprochements de ces actes et des justifications d'origine des fonds ayant servi à la réalisation des opérations révèle que les diverses opérations n'ont eu d'autre but, par des mouvements de capitaux incontrôlables, que de diminuer en apparence le patrimoine de X... ; qu'en effet, non seulement, ces mouvements révèlent le caractère fictif du prix payé, mais encore que X... ne justifie en rien de l'emploi des sommes retirées après les opérations ; que, dès lors, non seulement X... ne peut se prévaloir de son insolvabilité prétendue pour échapper à ses obligations alimentaires, son attitude caractérisant la volonté de ne pas régler intégralement la pension mise à sa charge et ce, depuis le mois de juillet 1985, mais encore le délit d'organisation d'insolvabilité est parfaitement caractérisé ; que ces manoeuvres tendant à dissimuler le patrimoine de X... nécessitaient obligatoirement l'assistance active de Mme Y..., les pièces régulièrement versées aux débats par la partie civile devant les premiers juges révélant au surplus que, dès l'année 1984, X... partageait le domicile de la demanderesse ... à Alès ;
" alors que, d'une part, aux termes de l'article 4 du Code pénal, nulle contravention, nul délit, nul crime ne peuvent être punis de peines qui n'étaient pas prononcées par la loi avant qu'ils fussent commis ; que, par suite, la cour d'appel ne pouvait déclarer établi le délit d'organisation frauduleuse d'insolvabilité prévu par l'article 404-1 du Code pénal, entré en vigueur le 1er septembre 1983, en visant des décisions antérieures qui ne bénéficiaient pas, lors de leurs prononcés, d'une protection pénale d'autant que ces décisions judiciaires constituaient un élément constitutif de l'infraction ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé l'article susvisé ;
" alors, d'autre part, que l'acte poursuivi au titre de la complicité suppose une infraction principale elle-même punissable ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a omis de répondre aux chefs péremptoires des conclusions d'appel de la demanderesse faisant valoir que l'infraction d'organisation frauduleuse d'insolvabilité n'était pas établie, dès lors que la demanderesse a acquis les actions de la SARL Brasserie moderne, détenues par X..., à un prix normal en sorte que le patrimoine de celui-ci n'a pas été amoindri par la vente de la Brasserie moderne ;
" alors, en outre, que ni le fait que, dès l'année 1984, X... partageait le domicile de Mme Y..., ni la circonstance que celle-ci ait acquis des parts de la société Brasserie moderne, ne sauraient constituer un acte de complicité par aide et assistance, en l'absence de tout motif propre à caractériser de tels actes ; qu'ainsi, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
" alors, enfin, qu'en matière de complicité, l'intention coupable doit exister au moment où l'aide a été apportée ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui ne relève aucun fait propre à caractériser l'intention, n'a pas légalement justifié sa décision " ;
Sur le premier moyen de cassation proposé par Roland X... et pris de la violation des articles 404-1 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Roland X... coupable du délit d'organisation frauduleuse d'insolvabilité pour la période du 15 novembre 1983 au 14 janvier 1985 ;
" aux motifs que les dispositions de la loi n° 83-608 du 8 juillet 1983 incriminant l'organisation d'insolvabilité est applicable à toutes les infractions d'organisation d'insolvabilité commises postérieurement à son entrée en vigueur quand bien même les condamnations pécuniaires protégées seraient intervenues antérieurement à cette entrée en vigueur ; qu'en l'espèce, Roland X... a été condamné :
"- par la cour d'appel de Nîmes, le 27 avril 1982, à payer à Anita Z... une pension alimentaire de 1 000 francs par mois (...),
"- par la chambre correctionnelle de la cour d'appel de Nîmes, le 14 avril 1983, à payer une indemnité de 3 000 francs (...) pour abandon de famille,
"- par le tribunal correctionnel de Nîmes, le 6 novembre 1985, à payer à Anita Z... une indemnité de 5 000 francs pour abandon de famille ;
" que toutes ces condamnations sont protégées par l'article 404-1 du Code pénal ;
" alors, d'une part, que l'existence d'une condamnation pécuniaire étant un élément constitutif du délit d'organisation d'insolvabilité, ce délit ne peut être constitué lorsque la condamnation est intervenue antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi réprimant l'organisation d'insolvabilité, soit le 1er septembre 1983, comme c'est le cas pour les condamnations susvisées du 27 avril 1982 et 14 avril 1983 ; qu'ainsi la cour d'appel a violé le texte de répression ;
" alors, d'autre part, que l'arrêt attaqué, ne précisant pas si les condamnations qu'il vise étaient devenues définitives à la date des faits reprochés au prévenu, n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour déclarer applicable aux faits de la cause l'article 404-1 du Code pénal dans sa rédaction issue de la loi du 8 juillet 1983 incriminant l'organisation de l'insolvabilité, la cour d'appel énonce, à bon droit, que ce texte concerne les infractions commises postérieurement à son entrée en vigueur, quand bien même les condamnations pécuniaires protégées seraient intervenues antérieurement à cette entrée en vigueur ; que le grief fait aux juges par X..., de n'avoir pas recherché si lesdites condamnations étaient définitives à la date des faits reprochés, est nouveau, mélangé de fait et de droit, dès lors qu'il ne résulte d'aucune mention de l'arrêt attaqué ni d'aucunes conclusions régulièrement déposées que ce moyen ait été soulevé devant eux ;
Attendu, par ailleurs, que pour analyser en une diminution de l'actif du patrimoine de X... la cession des parts de la SARL Brasserie moderne faite par lui à Claudine Y..., l'arrêt attaqué relève que le rapprochement des dates de cession avec l'origine des fonds ayant servi à l'opération et l'impossibilité par X... de justifier de l'emploi des sommes retirées de cette vente, démontrent le caractère fictif du paiement du prix ;
Attendu enfin que, pour caractériser la complicité, la juridiction du second degré énonce que les manoeuvres tendant à dissimuler le patrimoine de X... avaient nécessité l'assistance active de Claudine Y... avec laquelle X... cohabitait ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, exempts d'insuffisance, la cour d'appel a donné une base légale à sa décision ;
Qu'il s'ensuit que les moyens doivent être écartés ;
Sur le second moyen de cassation développé par X... : (sans intérêt) ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé par Claudine Y... : (sans intérêt) ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 90-84368
Date de la décision : 22/01/1992
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

INSOLVABILITE FRAUDULEUSE - Eléments constitutifs - Elément légal - Condamnation pécuniaire ou de nature patrimoniale - Condamnation antérieure à l'entrée en vigueur de la loi du 8 juillet 1983

ABANDON DE FAMILLE - Condamnation - Effet - Condamnation antérieure à l'entrée en vigueur de la loi du 8 juillet 1983 réprimant l'insolvabilité frauduleuse

L'article 404-1 du Code pénal, dans sa rédaction issue de la loi n° 83-608 du 8 juillet 1983 incriminant l'organisation de l'insolvabilité, s'applique aux infractions commises postérieurement à son entrée en vigueur quand bien même les condamnations pécuniaires protégées seraient antérieures à cette entrée en vigueur.


Références :

Code de procédure pénale 404-1

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes (chambre correctionnelle), 12 juin 1990


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 22 jan. 1992, pourvoi n°90-84368, Bull. crim. criminel 1992 N° 21 p. 47
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1992 N° 21 p. 47

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Le Gunehec
Avocat général : Avocat général :M. Libouban
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Massé
Avocat(s) : Avocats :M. Choucroy, la SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1992:90.84368
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