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17/12/1991 | FRANCE | N°89-18302

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 17 décembre 1991, 89-18302


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Attendu, selon le jugement déféré, que la société de fabrication et de vente de produits pharmaceutiques Beaufour (société Beaufour) a constitué, avec cinq de ses filiales, un groupement d'intérêt économique dénommé Ibesis (le GIE) ; qu'elle a vendu au GIE un matériel informatique et des logiciels de production, de gestion du personnel, de gestion commerciale et de gestion financière, au moyen desquels elle assurait antérieurement sa propre gestion et fournissait des prestations aux filiales ; que le prix stipulé a été compensé partiellement avec le droit d'entrée

de la société Beaufour dans le GIE ; que l'administration des Impôts a co...

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Attendu, selon le jugement déféré, que la société de fabrication et de vente de produits pharmaceutiques Beaufour (société Beaufour) a constitué, avec cinq de ses filiales, un groupement d'intérêt économique dénommé Ibesis (le GIE) ; qu'elle a vendu au GIE un matériel informatique et des logiciels de production, de gestion du personnel, de gestion commerciale et de gestion financière, au moyen desquels elle assurait antérieurement sa propre gestion et fournissait des prestations aux filiales ; que le prix stipulé a été compensé partiellement avec le droit d'entrée de la société Beaufour dans le GIE ; que l'administration des Impôts a considéré que cette opération dissimulait une convention entrant dans les prévisions de l'article 720 du Code général des impôts et a émis un avis de mise en recouvrement des droits et pénalités estimés dus ; que le GIE a saisi le tribunal de grande instance ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le GIE fait grief au jugement de ne pas mentionner que les débats s'étaient déroulés en audience publique, alors, selon le pourvoi, qu'aux termes de l'article L. 199 B du Livre des procédures fiscales, les affaires portées devant les juridictions de l'ordre judiciaire ou de l'ordre administratif, relatives au contentieux des impôts, taxes et redevances prévues par le Code général des impôts, ainsi que les amendes fiscales correspondantes, sont jugées en séance publique ; qu'en s'abstenant de constater que les débats s'étaient déroulés publiquement, le Tribunal a violé le texte susvisé ;

Mais attendu que, par application de l'article 446 du nouveau Code de procédure civile, la nullité fondée sur l'inobservation des dispositions relatives à la publicité des débats doit être invoquée avant leur clôture ; que, n'étant pas établi qu'il ait été ainsi procédé, le moyen est irrecevable ;

Mais sur le second moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 720 du Code général des impôts ;

Attendu qu'en vertu de ce texte, les dispositions fiscales applicables aux mutations de propriété à titre onéreux de fonds de commerce ou de clientèles sont étendues à toute convention à titre onéreux ayant pour effet de permettre à une personne d'exercer une profession, une fonction ou un emploi occupé par un précédent titulaire ;

Attendu que, pour rejeter l'opposition de la société Beaufour à l'avis de mise en recouvrement, le jugement retient que, " lors de la création du GIE, la société anonyme Laboratoires Beaufour a, dans un premier temps, mis gratuitement à la disposition de celui-ci son service informatique, c'est-à-dire le personnel et les contrats de location IBM ; dans un deuxième temps, soit le 3 septembre 1979, les logiciels d'application ont été cédés pour la somme de 1 500 000 francs ; que ces logiciels doivent être considérés comme des éléments incorporels représentant l'activité même du service et non comme de simples biens meubles corporels, qu'en effet, les logiciels, qui sont qualifiés par le demandeur " comme les seuls biens nécessaires à l'exercice de l'activité du service informatique transféré ", ne sauraient être assimilés à de simples supports matériels ; qu'ils représentent, en raison de leur prix et de leur

valeur, le contenu du service transféré gratuitement un an auparavant ; qu'en conséquence, il s'agit donc bien d'un transfert d'activité à titre onéreux " ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ces constatations que le prix de cession du matériel et des logiciels était stipulé entre la société Beaufour et le GIE, tandis que le droit d'entrée était stipulé par les statuts du GIE constitué par la société Beaufour et ses filiales, d'où il suit qu'il n'était pas possible de retenir, pour établir le caractère onéreux de l'opération, des stipulations convenues entre parties différentes, et, dès lors, que ses motifs étaient inopérants, sans rechercher si l'opération litigieuse n'avait pas eu pour objet la réorganisation des relations entre la société mère et ses filiales, et, en conséquence, n'était pas à titre onéreux, le Tribunal n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et sur le second moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 720 du Code général des impôts ;

Attendu que ce texte n'est applicable qu'à des conventions ayant pour effet, par le seul accord des parties, de permettre l'exercice d'une activité identique à celle du précédent titulaire, fût-elle partielle, à proportion de la cessation d'activité volontaire de celui-ci ;

Attendu que, pour rejeter l'opposition du GIE à l'avis de mise en recouvrement, le jugement retient aussi qu'il y a identité partielle d'activité transférée entre la société Beaufour et le GIE ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la société Beaufour utilisait, antérieurement à la cession, le matériel informatique et les logiciels cédés, d'un côté, pour sa propre gestion, activité sans caractère professionnel au sens de la loi, et, d'un autre côté, pour fournir des prestations à ses filiales, tandis que le GIE utilisait le même matériel et les logiciels pour fournir des prestations aux sociétés du groupe, et que son activité était ainsi professionnelle pour le tout, le Tribunal a violé le texte susvisé ;

Et attendu qu'en application de l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, la Cour en mesure, en cassant sans renvoi, de mettre fin au litige en appliquant aux faits constatés la règle de droit appropriée ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 23 mars 1989, entre les parties, par le tribunal de grande instance de Chartres ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

ANNULE l'avis de mise en recouvrement du 29 août 1986


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 89-18302
Date de la décision : 17/12/1991
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

1° COURS ET TRIBUNAUX - Débats - Publicité - Inobservation - Nullité - Nécessité de l'invoquer avant la clôture des débats.

1° IMPOTS ET TAXES - Procédure (règles communes) - Débats - Publicité - Inobservation - Nullité - Nécessité de l'invoquer avant la clôture des débats 1° IMPOTS ET TAXES - Procédure (règles communes) - Débats - Publicité - Inobservation - Nullité - Règles générales de procédure civile - Application.

1° La nullité fondée sur l'inobservation des dispositions relatives à la publicité des débats devant être invoquée, selon l'article 446, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, avant leur clôture, le moyen tiré de l'absence de mention dans le jugement du caractère public des débats est irrecevable faute d'établir qu'il a ainsi été procédé.

2° IMPOTS ET TAXES - Enregistrement - Droits de mutation - Mutation à titre onéreux de meubles - Convention permettant d'exercer une fonction occupée par un précédent titulaire - Caractère onéreux - Preuve - Eléments ne permettant pas de fonder la décision - Stipulations convenues entre parties différentes.

2° IMPOTS ET TAXES - Enregistrement - Droits de mutation - Mutation à titre onéreux de meubles - Convention permettant d'exercer une fonction occupée par un précédent titulaire - Caractère onéreux - Réorganisation des relations entre une société mère et ses filiales - Recherche nécessaire.

2° Une société ayant constitué avec ses filiales un groupement d'intérêt économique auquel elle a vendu du matériel informatique et des logiciels qui lui permettaient auparavant d'assurer sa propre gestion et de fournir des prestations à ses filiales, et le prix de cession de ces matériels et logiciels ayant été compensé avec le montant du droit d'entrée de la société dans le groupement, fixé par les statuts de celui-ci, le Tribunal ne pouvait déduire le caractère onéreux, au sens de l'article 720 du Code général des impôts, de cette convention de stipulations arrêtées entre parties différentes (société mère et groupement, d'un côté, société mère et filiales ayant constitué le groupement, de l'autre), et devait rechercher, pour retenir ce caractère onéreux, si l'opération litigieuse n'avait pas eu pour objet la réorganisation des relations entre la société mère et ses filiales.

3° IMPOTS ET TAXES - Enregistrement - Droits de mutation - Convention permettant d'exercer une fonction occupée par un précédent titulaire - Identité des activités successives - Absence - Cédant ayant utilisé le matériel en partie pour sa propre gestion - Cessionnaire l'utilisant exclusivement à titre professionnel.

3° IMPOTS ET TAXES - Enregistrement - Droits de mutation - Convention permettant d'exercer une fonction occupée par un précédent titulaire - Identité des activités successives - Nécessité.

3° L'article 720 du Code général des impôts n'est applicable qu'à des conventions ayant pour effet, par le seul accord des parties, de permettre l'exercice d'une activité identique à celle du précédent titulaire, fût-elle partielle, à proportion de la cessation d'activité volontaire de celui-ci. Viole le texte précité le Tribunal qui retient l'identité partielle d'activité transférée entre une société et un groupement, alors que la société utilisait, pour partie, avant la cession, le matériel et les logiciels pour sa propre gestion, activité sans caractère professionnel au sens du texte précité, tandis que le groupement utilise les mêmes matériels et logiciels pour fournir des prestations à ses membres, son activité étant ainsi professionnelle pour le tout.


Références :

CGI 720
nouveau Code de procédure civile 446 al. 2

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Chartres, 23 mars 1989

A RAPPROCHER : (1°). Chambre commerciale, 1987-02-24 , Bulletin 1987, IV, n° 51, p. 37 (cassation) . (2°). Chambre commerciale, 1978-10-02 , Bulletin 1978, IV, n° 205, p. 174 (rejet) . (3°). Chambre commerciale, 1988-04-19 , Bulletin 1988, IV, n° 131, p. 92 (cassation), et les arrêts cités ; Chambre commerciale, 1990-02-20 , Bulletin 1990, IV, n° 48, p. 32 (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 17 déc. 1991, pourvoi n°89-18302, Bull. civ. 1991 IV N° 390 p. 270
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1991 IV N° 390 p. 270

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Bézard
Avocat général : Avocat général :M. Jéol
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Vigneron
Avocat(s) : Avocats :la SCP Defrénois et Levis, M. Goutet.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1991:89.18302
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