Vu la connexité, joint les pourvois n°s 90-40.970 à 90-40.974, 90-40.977, 90-40.978, 90-40.980 à 90-40.993, 90-40.996, 90-40.998, 90-41.000, 90-41.002 à 90-41.008, 90-41.010 à 90-41.013, 90-41.014 et 90-41.015, 90-41.019 à 90-41.056 ;
Sur les deux moyens réunis, identiques dans les soixante-quatorze pourvois :
Attendu qu'il résulte des pièces de la procédure qu'après l'entrée en vigueur du nouveau statut du personnel de la Société d'exploitation industrielle des tabacs et allumettes (SEITA), tel que défini par le décret du 8 août 1985 et l'accord d'entreprise du 13 août 1985, cette société a continué d'appliquer le régime antérieur concernant les horaires décalés, lequel comportait une rémunération majorée de 100 % pour les heures de travail effectuées entre 21 heures et 6 heures du matin ; qu'un certain nombre de salariés de la SEITA, estimant que le supplément de rémunération devait, en l'absence de dispositions contraires, s'appliquer à la nouvelle plage horaire fixée par l'accord d'entreprise et s'étendant de 20 heures à 7 heures, ont réclamé un rappel de salaire pour les heures décalées effectuées de 20 à 21 heures et de 6 à 7 heures qui n'avaient pas été rémunérées au taux majoré ;
Attendu que la SEITA fait grief à l'arrêt attaqué (Metz, 11 décembre 1989) d'avoir confirmé les jugements du conseil de prud'hommes qui l'avaient condamnée à payer à chacun des salariés demandeurs une certaine somme au titre des heures décalées et qui l'avaient en outre condamnée à continuer à " appliquer le paiement de ces heures suivant l'article 14 du décret du 8 août 1985 et les articles 6 et 32 avec effets au-delà de la date de dépôt de la demande ", alors, selon le premier moyen, que, d'une part, il est interdit aux juges de se prononcer, par voie de dispositions générales et réglementaires, sur les causes qui leur sont soumises, de sorte que viole l'article 5 du Code civil l'arrêt attaqué qui considère que, dans la présente espèce, les notions d'" heures décalées ", selon le décret du 6 juillet 1962 et d'" horaire décalé ", selon le décret du 8 août 1985, seraient identiques pour l'unique raison que, par un arrêt du 7 juin 1989, la Chambre sociale de la Cour de Cassation a rejeté la distinction entre ces deux notions ; que, d'autre part, en se bornant à se référer à une autre décision concernant des tiers et sans même en rappeler la motivation, l'arrêt attaqué a violé les dispositions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; que l'arrêt attaqué a encore violé ce même texte, faute d'avoir statué par des motifs propres ; qu'en outre, méconnaît son office, en violation des dispositions de l'article 12 du nouveau Code de procédure civile, la cour d'appel qui, au lieu de procéder par appréciations propres, s'en remet à une solution jugée dans une autre cause ; que, de plus, viole encore les dispositions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, l'arrêt attaqué qui admet l'assimilation des notions d'" heures décalées " du statut de 1962 et d'" horaire décalé " du statut de 1985, sans s'expliquer sur le moyen des conclusions d'appel de la société faisant valoir que les heures décalées du statut de 1962, prévues entre 21 heures et 6 heures et rémunérées d'une sur-rémunération à 100 % s'inscrivant dans le cadre d'une rémunération horaire et individuelle, que la
notion d'horaire décalé prévue par le statut de 1985, dans un contexte de mensualisation acquise, concerne en revanche des modalités collectives par catégories, après consultation des syndicats puis du comité d'établissement lorsqu'il en résulte un horaire empiétant sur tout ou partie de la plage de 20 heures à 7 heures, et qu'à la notion de sur-rémunération à l'heure décalée travaillée, comptabilisée a posteriori et individuellement, a été substituée la mise en place d'horaires en tout ou en partie collectifs par catégorie, après consultation des syndicats et du comité d'établissement, avec prime mensuelle connue à priori ; et alors, selon le second moyen, que, d'une part, le statut de 1962 prévoyait, dans le cadre d'une rémunération à l'heure, que les " heures décalées " et travaillées entre 21 heures et 6 heures faisaient l'objet, à titre individuel, d'une sur-rémunération à 100 %, tandis que le statut de 1985 a créé un système d'" horaire décalé ", dans le cadre de la mensualisation, adoptée de manière collective par catégories par le président-directeur général, après consultation des syndicats puis du comité d'établissement, pour l'horaire empiétant sur la plage de 20 heures à 7 heures, l'horaire décalé donnant droit à une prime mensuelle accordée par le président-directeur général après consultation des syndicats et du comité d'établissement ; que dans l'attente de la mise en place du nouveau régime d'horaire décalé, les textes qui l'ont institué (loi n° 84-603 du 13 juillet 1984, décret n° 85-844 du 8 août 1985, accord d'entreprise du 13 août 1985) ont seulement prévu le maintien du régime de rémunération antérieur des heures décalées sans aucune superposition des deux régimes ; qu'il s'ensuit que méconnaît ces nouveaux textes l'arrêt qui consacre le cumul des deux systèmes pendant la période transitoire en retenant, pour cette période, que la sur-rémunération horaire à 100 % du statut de 1962 devrait s'appliquer à la plage d'horaire décalé de 20 à 7 heures du statut de 1985 ; que, d'autre part, l'article 77 du décret n° 62-766 du 6 juillet 1962 n'ayant prévu une sur-rémunération à 100 % que pour les heures travaillées de 21 heures à 6 heures, viole ce texte, l'arrêt attaqué qui admet une sur-rémunération à 100 % des heures travaillées entre 6 et 7 heures et entre 20 et 21 heures pendant la période transitoire ; qu'en outre, viole l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, l'arrêt attaqué qui retient qu'auraient été pratiqués des horaires décalés pendant la période transitoire de 1985 à 1987, sans s'expliquer sur le moyen des conclusions d'appel de la SEITA faisant valoir que la possibilité d'horaire décalé prévu par le décret du 8 août 1985 était subordonnée à des consultations préalables et à la décision du président-directeur général, laquelle n'est intervenue que par directive du 18 novembre 1987 et n'a autorisé la pratique d'horaire décalé qu'à compter du 1er janvier 1988 ; que, de plus, viole encore les dispositions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, l'arrêt attaqué qui admet, pour la période transitoire, la sur-rémunération à 100 % des heures travaillées de 6 à 7 heures et de 20 à 21 heures, c'est-à-dire un accroissement du coût des heures décalées par rapport au système du statut de 1962, sans s'expliquer sur le moyen des conclusions d'appel de la SEITA faisant valoir que le nouveau statut de 1985 avait été adopté par le ministre des finances en vue
notamment de réduire pour l'entreprise le coût des heures décalées résultant dudit statut de 1972 ; qu'enfin, le juge devant trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, viole l'article 12 du nouveau Code de procédure civile, l'arrêt attaqué qui au lieu d'expliciter comment sa solution résulterait des différents textes en présence (décret n° 62-766 du 6 juillet 1962, loi n° 84-603 du 13 juillet 1984, décret n° 85-844 du 8 août 1985, accord d'entreprise du 13 août 1985, directives de la SEITA du 18 novembre 1987), justifie cette solution par un raisonnement " logique " ;
Mais attendu, qu'il ne peut être fait grief à la cour d'appel de s'être bornée à motiver sa décision par la simple référence à l'arrêt rendu par la Chambre sociale de la Cour de Cassation le 7 juin 1989, dès lors qu'elle est réputée avoir adopté les motifs non contraires des jugements qu'elle a confirmés ; qu'après avoir, ainsi, par motifs adoptés des premiers juges, relevé, d'une part, que l'article 32 du décret du 8 août 1985 faisait obligation à la SEITA d'indemniser les sujétions résultant de la mise en place des horaires décalés, et, d'autre part, que les nouvelles conditions de leur indemnisation n'avaient pas encore été fixées, elle a, répondant par là même aux conclusions invoquées, retenu à bon droit qu'en vertu de l'article 32 de l'accord d'entreprise du 13 août 1985, complétant le statut du personnel, le taux de majoration antérieur des heures de travail décalées était maintenu pendant la période transitoire et qu'il s'appliquait à la nouvelle plage horaire ;
D'où il suit qu'aucun des moyens n'est fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois