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09/10/1991 | FRANCE | N°90-12476

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 09 octobre 1991, 90-12476


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Attendu, que la société Robert and partners, conseils en publicité, a conclu, en décembre 1983, avec la société Joker, un contrat dit de " collaboration ", qui stipulait notamment l'apport de créations publicitaires pour les jus de fruits " tous droits compris " ; que cette convention, " valable pour l'année 1984 et renouvelable par tacite reconduction ", a été " dénoncée " par la société Joker le 16 septembre 1986, avec le préavis convenu, mais que les parties ont poursuivi leurs rapports d'affaires pendant l'année 1987, au cours de laquelle la société Robert and pa

rtners fit réaliser un film dénommé Le Fruit nu ; qu'en septembre 1987 ...

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Attendu, que la société Robert and partners, conseils en publicité, a conclu, en décembre 1983, avec la société Joker, un contrat dit de " collaboration ", qui stipulait notamment l'apport de créations publicitaires pour les jus de fruits " tous droits compris " ; que cette convention, " valable pour l'année 1984 et renouvelable par tacite reconduction ", a été " dénoncée " par la société Joker le 16 septembre 1986, avec le préavis convenu, mais que les parties ont poursuivi leurs rapports d'affaires pendant l'année 1987, au cours de laquelle la société Robert and partners fit réaliser un film dénommé Le Fruit nu ; qu'en septembre 1987 la société Joker mit un terme définitif à ces rapports, mais prétendit qu'en vertu du contrat de 1983, elle avait acquis l'intégralité des droits d'exploitation des créations publicitaires produites par Robert and partners ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que la société Robert and partners fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli la demande de la société Joker, alors, selon le moyen, d'une part, que la cour d'appel ne pouvait, sans dénaturer la convention des parties, juger que la " dénonciation " d'un contrat n'avait pas la valeur d'une rupture ; alors, d'autre part, que la poursuite des relations d'affaires des parties n'était pas " antinomique " d'une rupture de leur convention initiale et n'en impliquait pas le maintien ; et alors, enfin, qu'en l'absence de tout contrat relatif à une " oeuvre de commande utilisée pour la publicité ", l'arrêt, qui décide que les droits d'exploitation de cette oeuvre ont été cédés, viole l'article 14 de la loi du 3 juillet 1985 ;

Mais attendu que la cour d'appel n'a pas fondé sa décision sur la présomption de cession instituée par ce dernier texte, qui est donc sans application en la cause ; que, recherchant la commune volonté des parties, elle a, interprétant leur comportement et les termes de leur correspondance, souverainement retenu que, malgré la dénonciation intervenue, elles avaient entendu soumettre aux règles stipulées en 1983 les rapports d'affaires provisoirement maintenus par elles en 1987 dans des conditions identiques à celles des années précédentes ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

Mais sur le second moyen, pris en ses deux branches :

Vu les articles 30 et 31 de la loi du 11 mars 1957 ;

Attendu que, selon le premier de ces textes, lorsqu'un contrat comporte cession du droit de représentation ou du droit de reproduction, la portée en est limitée aux modes d'exploitation prévus au contrat ; qu'aux termes du second, la transmission des droits de l'auteur est subordonnée à la condition que leur domaine d'exploitation soit délimité quant à son étendue et à sa destination, quant au lieu et quant à la durée ;

Attendu qu'après avoir énoncé que la clause de cession " tous droits compris " comprenait nécessairement le droit de représentation du film Le Fruit nu, l'arrêt retient, malgré l'absence de toute autre prévision conventionnelle, que la société Joker a acquis " l'intégralité des droits d'exploitation des créations publicitaires réalisées par la société Robert and partners " ; qu'en donnant ainsi une portée illimitée à une clause que sa généralité rendait inopérante, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 décembre 1989, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 90-12476
Date de la décision : 09/10/1991
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

1° CONTRATS ET OBLIGATIONS - Interprétation - Intention commune des parties - Dénonciation du contrat - Poursuite provisoire des rapports d'affaires - Application des règles stipulées au contrat - Appréciation souveraine.

1° POUVOIRS DES JUGES - Appréciation souveraine - Contrats et obligations - Dénonciation - Poursuite provisoire des rapports d'affaires - Application des règles stipulées au contrat dénoncé.

1° C'est par une interprétation souveraine du comportement des parties et des termes de leurs correspondances qu'une cour d'appel retient qu'en dépit de la dénonciation de la convention qui les liait, les rapports d'affaires maintenus à titre provisoire restent soumis aux règles stipulées par l'accord précédent résilié.

2° PROPRIETE LITTERAIRE ET ARTISTIQUE - Droits d'auteur - Cession - Acte de cession - Mention distincte de chacun des droits cédés - Nécessité.

2° PROPRIETE LITTERAIRE ET ARTISTIQUE - Droits d'auteur - Cession - Délimitation des droits cédés - Clause générale de cession - Validité (non) 2° PROPRIETE LITTERAIRE ET ARTISTIQUE - Droits d'auteur - Cession - Droit de reproduction - Etendue - Limitation - Nécessité.

2° Selon l'article 30 de la loi n° 57-298 du 11 mars 1957, lorsqu'un contrat comporte cession du droit de représentation ou du droit de reproduction, la portée en est limitée aux modes d'exploitation prévus au contrat.. Aux termes de l'article 31 de la loi précitée, la transmission des droits de l'auteur est subordonnée à la condition que leur domaine d'exploitation soit délimité quant à son étendue et à sa destination, au lieu et à la durée.. Dès lors, viole ces textes la cour d'appel qui donne une portée illimitée à une clause de cession que sa généralité rendait inopérante.


Références :

Loi 57-298 du 11 mars 1957 art. 30, art. 31

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 07 décembre 1989

A RAPPROCHER : (2°). Chambre civile 1, 1989-12-13 , Bulletin 1989, I, n° 391, p. 262 (cassation) ; Chambre civile 1, 1990-07-17 , Bulletin 1990, I, n° 203, p. 144 (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 09 oct. 1991, pourvoi n°90-12476, Bull. civ. 1991 I N° 253 p. 167
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1991 I N° 253 p. 167

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Massip, conseiller doyen faisant fonction
Avocat général : Avocat général :M. Sadon
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Grégoire
Avocat(s) : Avocats :la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, la SCP Célice et Blancpain.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1991:90.12476
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