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Attendu, selon les juges du fond, que M. Y..., marchand de tableaux, a vendu à Jeanne X..., comme des oeuvres de Delacroix, le 28 juin 1956 et le 24 juin 1959, deux toiles intitulées Esquisse de chevaux et Arrivée de Marie de B... à Marseille ; que Jeanne X... est décédée le 14 avril 1966, laissant pour seule héritière sa fille, Mme Marceline X..., épouse Z... ; que, par acte du 14 août 1985, Mme Z..., soutenant que les deux peintures étaient, d'après le catalogue de M. Lee A..., apocryphes, a assigné M. Y... en paiement de dommages-intérêts, tout en sollicitant, à titre subsidiaire, une expertise ; que M. Y... a reconventionnellement demandé l'indemnisation du préjudice moral à lui causé par la procédure ; que l'arrêt attaqué a, sans ordonner d'expertise, rejeté la demande principale et partiellement accueilli la demande reconventionnelle ;
Sur les deux premiers moyens réunis :
Attendu qu'en un premier moyen, Mme Z... fait grief à l'arrêt de l'avoir déboutée, alors qu'en retenant que le simple avis, non appuyé sur des éléments scientifiques ni sur une étude de visu, d'un seul historien d'art, fût-il spécialiste de Delacroix, ne saurait détruire la longue notoriété des tableaux et en établir l'inauthenticité, l'arrêt aurait " escamoté " la question essentielle du débat, celle de savoir si, indépendamment de la non-authenticité proprement dite, la seule " authenticité douteuse ", ruinant la cote d'une oeuvre d'art, n'était pas de nature à faire jouer la garantie d'authenticité du vendeur professionnel envers l'acheteur profane, dont le consentement avait été déterminé par une authenticité certaine ; qu'en ne recherchant pas si l'avis de Lee A... n'était pas de nature à grever les tableaux vendus d'une authenticité douteuse, comme l'y invitaient les conclusions de Mme Z..., la cour d'appel aurait privé sa décision de base légale au regard de l'article 1110 du Code civil ; qu'en un second moyen, Mme Z... reproche encore à l'arrêt d'avoir écarté l'expertise sollicitée alors, d'une part, qu'il aurait présumé le caractère non déterminant de cette mesure d'instruction, laquelle, en fait, était susceptible de combler les carences constatées de l'opinion de M. Lee A... et, " en droit ", aurait pu, soit établir avec certitude, en confirmant cette opinion subjective, la non-authenticité des deux peintures, soit, en l'infirmant, enlever aux deux oeuvres leur caractère d'authenticité douteuse ; que la cour d'appel aurait donc violé les articles 145, 455 et 458 du nouveau Code de procédure civile ; et alors, d'autre part, qu'en condamnant l'opinion artistique d'un historien d'art sans recourir à une expertise, qui seule eût été à même de fournir un avis artistique autorisé, la cour d'appel se serait érigée en juge de qualités artistiques, étrangères à sa compétence, sans que son appréciation ait aucun effet pratique sur une authenticité demeurant douteuse en l'état ; qu'elle aurait donc violé les articles 2 de la loi du 11 mars 1957 et 232 et suivants du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que, Mme Z..., qui ne demandait pas l'annulation de la vente, pour erreur sur une qualité substantielle des tableaux litigieux, exerçait contre M. Y... une action en responsabilité, à l'appui de laquelle elle sollicitait une expertise " aux fins de juger si les tableaux étaient authentiques ou non " ; que la cour d'appel a discrétionnairement estimé qu'une telle expertise ne serait pas de nature à apporter sur ce point la certitude que recherchait Mme Z... ; que le doute survenu postérieurement à l'époque des deux ventes n'était pas susceptible d'engager la responsabilité du vendeur ; qu'ainsi la décision attaquée se trouve légalement justifiée ;
Mais sur le troisième moyen : (sans intérêt) ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a..., l'arrêt rendu le 29 septembre 1988, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai