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08/04/1991 | FRANCE | N°90-80079

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 08 avril 1991, 90-80079


CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... Paul,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Colmar, chambre correctionnelle, en date du 20 novembre 1989, qui, dans la procédure suivie contre lui du chef de tentative d'escroquerie, après sa relaxe définitive, a prononcé sur les réparations civiles.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 104, 105, 591 et 593 du Code de procédure pénale, violation des droits de la défense, défaut de motif et manque de base légale :
" en ce que l'

arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité soulevée par X... concernant son ...

CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... Paul,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Colmar, chambre correctionnelle, en date du 20 novembre 1989, qui, dans la procédure suivie contre lui du chef de tentative d'escroquerie, après sa relaxe définitive, a prononcé sur les réparations civiles.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 104, 105, 591 et 593 du Code de procédure pénale, violation des droits de la défense, défaut de motif et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité soulevée par X... concernant son inculpation tardive ;
" aux motifs que, si X... a été entendu comme témoin par le juge d'instruction le 18 septembre 1986 dans le cadre d'une confrontation avec la partie civile assistée de son avocat sans que le juge d'instruction ne mentionne sur le procès-verbal lui avoir donné connaissance des dispositions de l'article 104 du Code de procédure pénale, il est certain néanmoins que X... connaissait ces dispositions et que c'est en toute connaissance de cause qu'il a accepté de ne pas s'en prévaloir ; qu'en effet, il avait été entendu sur commission rogatoire par un policier du SRPJ le 8 juillet 1986, lequel l'avait averti de son droit à refuser d'être entendu comme témoin alors que la plainte de Y... le visait nommément, et qu'il avait déjà refusé de s'en prévaloir ; qu'il n'y a dès lors pas lieu d'annuler le procès-verbal dressé le 18 septembre 1986 et la procédure subséquente ;
" alors que, d'une part, aux termes de l'article 104 du Code de procédure pénale dans sa rédaction antérieure à la loi du 30 décembre 1987, le juge d'instruction ne pouvant entendre comme témoin une personne nommément visée par la plainte avec constitution de partie civile sans lui donner connaissance de celle-ci et l'aviser qu'elle peut refuser de déposer, la Cour, qui a ainsi considéré que l'inobservation de ces dispositions par le juge d'instruction n'avait pas lieu d'être sanctionnée, motif pris de ce que, lors d'un interrogatoire antérieur, X... avait été informé de l'existence de ces dispositions et avait néanmoins accepté d'être entendu en qualité de témoin, a tout autant violé le texte susvisé que méconnu les droits de la défense, l'avertissement imposé par l'article 104 du Code de procédure pénale devant en effet nécessairement être renouvelé lors de chaque interrogatoire de la personne nommément visée par la plainte avec constitution de partie civile tant qu'elle n'a pas été inculpée, sans que par ailleurs l'acceptation par cette dernière d'être entendue comme témoin lors d'un précédent interrogatoire puisse être interprétée comme une nécessaire renonciation au bénéfice des dispositions de l'article 104 pour les éventuelles auditions ultérieures ;
" et alors que, d'autre part, en tout état de cause, le fait de procéder ainsi après une première audition de X... à la confrontation de celui-ci avec la partie civile, ce qui supposait nécessairement une conviction accrue du juge d'instruction quant au caractère sérieux des griefs allégués par le plaignant à l'encontre de X..., constituait inévitablement une violation des dispositions de l'article 105 du Code de procédure pénale " ;
Attendu que si la cour d'appel a cru devoir répondre, pour les rejeter, aux exceptions de nullité de procédure soulevées devant elle, alors qu'en l'absence d'appel du ministère public, les juges, saisis seulement du recours formé par la partie civile contre une décision de relaxe, ne pouvaient que rechercher si les éléments constitutifs de l'infraction étaient réunis afin de prononcer sur les réparations civiles et ne pouvaient plus statuer sur la validité des actes relatifs à l'action publique, le moyen qui reprend l'une de ces exceptions devant la Cour de Cassation est irrecevable ;
Mais sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 405 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de réponse à conclusion, défaut de motif et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré X... coupable de tentative d'escroquerie au jugement ;
" aux motifs que, contrairement aux énonciations du jugement, l'instruction n'a pas permis d'établir que Y... ait été redevable envers X... de sommes conséquentes ni même d'une somme quelconque comprise dans la reconnaissance de dette de 100 000 francs en raison des contradictions existant entre les dires des témoins dont aucun n'est indépendant de X... et entre ces dires et les versions successives de l'ex-prévenu ;
" que l'établissement de la reconnaissance de dette, après conseil demandé au directeur de la succursale bancaire, l'identité de date du cautionnement et de la reconnaissance, le fait que les 100 000 francs correspondent à la différence entre les 150 000 francs payés à la CFCI et le versement de 50 000 francs que X... a exigé de Y... sont autant de preuves du caractère fictif de la reconnaissance de dette qui faisait double emploi avec le cautionnement dont X... sollicitait consignation manifestant ainsi l'intention d'en poursuivre le remboursement ;
" alors que, d'une part, la seule production en justice, en dehors de toute autre circonstance, par une partie d'une pièce de nature à étayer le bien-fondé de ses prétentions ne saurait par elle-même constituer une manoeuvre frauduleuse au sens de l'article 405 du Code pénal, dès lors que son authenticité n'est pas contestée mais seulement sa portée qu'il incombe précisément au juge civil de déterminer ;
" alors que, d'autre part, la Cour, qui, pour considérer que cette reconnaissance de dette faisait double emploi avec le cautionnement, a écarté la totalité des témoignages produits par X... attestant de la réalité de remise de fonds par lui à Y..., en leur faisant grief de même qu'aux déclarations de X... d'être empreints de contradictions, nonobstant ses propres énonciations dont il ne ressort que quelques divergences portant sur des points de détail, n'a pas, en l'état de ces motifs entachés d'insuffisance, légalement justifié sa décision retenant le caractère fictif de la reconnaissance de dette souscrite par Y... ;
" et alors qu'enfin, à supposer même que cette reconnaissance de dette ait fait double emploi avec le cautionnement comme l'affirme la Cour, sa production en justice ayant été antérieure à l'action en consignation introduite le 21 avril 1986 laquelle, comme le soulignait X... dans ses conclusions délaissées par la Cour, avait un objet différent de l'action en paiement diligentée le 18 novembre 1985, ne pouvait en tout état de cause constituer à cette date une manoeuvre frauduleuse de nature à surprendre la religion du juge en le conduisant à faire droit à une demande en paiement indu parce que portant sur des sommes qui n'auraient plus été exigibles " ;
Et sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 1382 du Code civil, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué, après avoir déclaré le prévenu coupable de tentative d'escroquerie, l'a condamné à verser à la partie civile la somme de 120 000 francs à titre de dommages-intérêts ;
" au motif que la Cour a les éléments pour fixer à cette somme le préjudice souffert par la partie civile ;
" alors que la Cour, qui ne pouvait, sans contradiction, estimer qu'une tentative d'escroquerie, qui par définition même a manqué son effet, a pu causer à sa victime un préjudice supérieur au montant de la somme faisant l'objet de ladite tentative, n'a pas légalement justifié sa décision faute d'avoir précisé la consistance du préjudice qu'elle entendait réparer " ;
Les moyens étant réunis ;
Vu les articles précités ;
Attendu que le juge répressif ne peut déclarer le prévenu responsable des conséquences dommageables des faits qui lui sont imputés qu'à la condition de justifier le caractère délictueux de ces faits en relevant tous les éléments constitutifs de l'infraction reprochée ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que, le 3 avril 1985, Paul X... s'est porté caution auprès de la Banque de l'union européenne (BUE), à hauteur de 290 000 francs, du débit du compte ouvert au nom du laboratoire du centre que dirigeait Théo Y... ; que, le même jour, ledit débit incluant une dépense de 150 000 francs effectuée par Y..., ce dernier, après avoir déposé à la banque une somme de 50 000 francs, a signé en faveur de X... une reconnaissance de dette de 100 000 francs ; que, le 18 novembre suivant, X... a assigné Y... en paiement devant le tribunal de grande instance en faisant état de ce document ;
Attendu que, pour infirmer le jugement de relaxe entrepris sur le seul appel de la partie civile et pour déclarer X... responsable d'une tentative d'escroquerie commise au préjudice de Y..., l'arrêt attaqué se borne à énoncer, par les motifs reproduits aux moyens, que l'argumentation du prévenu n'est pas fondée et que la reconnaissance était fictive ;
Mais attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé à la charge du prévenu l'existence de manoeuvres frauduleuses au sens de l'article 405 du Code pénal, a méconnu le principe sus-rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la cour d'appel de Colmar, en date du 20 novembre 1989, et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Nancy.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 90-80079
Date de la décision : 08/04/1991
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

APPEL CORRECTIONNEL OU DE POLICE - Effet dévolutif - Limites - Acte d'appel - Saisine - Etendue - Jugement définitif de relaxe sur l'action publique - Appel de la partie civile - Exception de nullité de la procédure (non)

CASSATION - Moyen - Recevabilité - Action publique - Moyen tendant à faire revivre l'action publique éteinte

En l'absence d'appel de ministère public, la cour d'appel, saisie seulement du recours formé par la partie civile contre un jugement de relaxe, ne peut que rechercher si les éléments constitutifs de l'infraction sont réunis afin de prononcer sur les réparations civiles. Elle ne peut ainsi plus statuer sur la validité des actes relatifs à l'action publique (1). L'exception de nullité soulevée par le prévenu devant les premiers juges et rejetée par eux ne peut être reprise devant la cour d'appel. Le moyen qui reprend une telle exception devant la Cour de Cassation est lui-même irrecevable


Références :

Code de procédure pénale 104, 105

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar (chambre correctionnelle), 20 novembre 1989

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1986-10-22 , Bulletin criminel 1986, n° 297, p. 760 (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 08 avr. 1991, pourvoi n°90-80079, Bull. crim. criminel 1991 N° 165 p. 417
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1991 N° 165 p. 417

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Tacchella, conseiller le plus ancien faisant fonction. -
Avocat général : Avocat général :M. Perfetti
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Hébrard
Avocat(s) : Avocats :la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, la SCP Matteï-Dawance

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1991:90.80079
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