La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/01/1991 | FRANCE | N°89-43442

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 janvier 1991, 89-43442


.

Sur le moyen unique :

Attendu qu'une importante manifestation s'est déroulée le 27 novembre 1981 à l'usine de La Martinerie des Fonderies Montupet, manifestation à l'issue de laquelle le président-directeur général de la société ainsi que le directeur de l'établissement ont été empêchés à la fin de la matinée, de sortir de la salle de conférences dans laquelle ils avaient réuni les cadres de l'usine ; que si ces derniers ont été autorisés par les manifestants à sortir un à un, la séquestration du président-directeur général et du directeur n'a pris fi

n qu'à 22 heures 50, après une ordonnance du président du tribunal de grande instance ...

.

Sur le moyen unique :

Attendu qu'une importante manifestation s'est déroulée le 27 novembre 1981 à l'usine de La Martinerie des Fonderies Montupet, manifestation à l'issue de laquelle le président-directeur général de la société ainsi que le directeur de l'établissement ont été empêchés à la fin de la matinée, de sortir de la salle de conférences dans laquelle ils avaient réuni les cadres de l'usine ; que si ces derniers ont été autorisés par les manifestants à sortir un à un, la séquestration du président-directeur général et du directeur n'a pris fin qu'à 22 heures 50, après une ordonnance du président du tribunal de grande instance ordonnant leur libération avec l'assistance de la force publique ;

Attendu que M. X..., qui travaillait comme soudeur dans l'usine depuis le 28 mai 1972 et qui avait les qualités de délégué du personnel, de membre du comité d'établissement et de secrétaire du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, ayant été licencié le 18 avril 1985 en raison de ces faits, après autorisation donnée par l'inspecteur du Travail, a réclamé sa réintégration en application de l'article 15-II de la loi du 20 juillet 1988 portant amnistie ; que cette demande ayant été rejetée par la Société des fonderies Montupet, il a saisi la juridiction prud'homale ;

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué (Bourges, 12 mai 1989), de l'avoir débouté de sa demande de réintégration, alors que, selon le moyen, de première part, la faute lourde visée par l'article 15-II de la loi du 20 juillet 1988, exclusive du bénéfice de la réintégration, est uniquement celle qui est imputable au salarié et est indépendante d'autres fautes qui ont pu ou peuvent être retenues à l'encontre de l'ensemble des salariés ayant participé à un mouvement collectif lors duquel le président-directeur général et le directeur de l'établissement ont été privés de liberté pendant plusieurs heures ; qu'en statuant ainsi qu'elle l'a fait, sans préciser les actes de participation personnelle de M. X... à cette privation de liberté, ni davantage les actes par lui personnellement commis, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 15-II de la loi du 20 juillet 1988 ; alors que, de deuxième part, l'article 15-II de la loi du 20 juillet 1988 donnant compétence exclusive à la juridiction prud'homale pour connaître du contentieux de la réintégration, celle-ci doit, pour apprécier si la faute ayant motivé le licenciement est ou non une faute lourde, tenir compte de l'attitude de l'employeur lors du licenciement, invoquée par le salarié protégé ; qu'en refusant d'en tenir compte, la cour d'appel a méconnu sa compétence et violé l'article 15-II de la loi du 20 juillet 1988 ; alors que, de troisième part, la circonstance que l'employeur ait, lors du licenciement, qualifié simplement de grave la faute reprochée au salarié protégé et lui ait versé les indemnités compensatrices de congés payés est exclusive de la qualification de faute lourde au sens de l'article 15-II de la loi du 20 juillet 1988 ; qu'en qualifiant de lourde la faute commise par M. X..., la cour d'appel a violé cet article ; alors que, de quatrième part, en ne précisant pas les actes commis par M. X...,

dont il résulterait que son rôle ait été davantage celui d'un meneur, ni davantage de quelles pièces du dossier et attestations, il ressortirait qu'il ait eu un tel rôle et en ne s'expliquant pas sur les faits précis invoqués par M. X... pour établir le rôle modérateur qu'il invoquait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 15-II de la loi du 20 juillet 1988 ; alors que, enfin, aux termes de l'article 15-II de la loi du 20 juillet 1988, la faute, non lourde, qui permet la réintégration doit avoir été commise " à l'occasion de l'exercice des fonctions " ; qu'au regard de cette condition, est sans incidence le fait qu'éventuellement le salarié protégé ne soit pas resté dans le cadre de l'exercice normal de ses fonctions ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 15-II de la loi du 20 juillet 1988 ;

Mais attendu qu'en relevant, sans encourir les griefs d'insuffisance articulés par les première, deuxième et quatrième branches du moyen, que M. X... avait pris une part active à une manifestation au cours de laquelle le président-directeur général de la société et le directeur de l'établissement avaient été séquestrés pendant environ 12 heures, qu'en outre, son rôle au cours de la séquestration avait été celui d'un meneur, la cour d'appel, à qui il revenait de qualifier les faits commis par le salarié sans être liée par les termes utilisés par l'employeur au moment du licenciement, a décidé à bon droit que l'intéressé avait commis une faute lourde exclusive du droit à réintégration ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 89-43442
Date de la décision : 16/01/1991
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

AMNISTIE - Sanctions professionnelles - Loi du 20 juillet 1988 - Salarié protégé - Réintégration - Faute lourde commise à l'occasion de l'exercice des fonctions - Rôle de meneur au cours de la séquestration du président du conseil d'administration lors d'une manifestation

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Salarié protégé - Réintégration - Réintégration en vertu de la loi d'amnistie du 20 juillet 1988 - Faute lourde commise à l'occasion de l'exercice des fonctions - Rôle de meneur au cours de la séquestration du président du conseil d'administration lors d'une manifestation

REPRESENTATION DES SALARIES - Règles communes - Licenciement - Réintégration - Réintégration en vertu de la loi d'amnistie du 20 juillet 1988 - Faute lourde commise à l'occasion de l'exercice des fonctions - Rôle de meneur au cours de la séquestration du président du conseil d'administration lors d'une manifestation

AMNISTIE - Sanctions professionnelles - Loi du 20 juillet 1988 - Salarié protégé - Réintégration - Faute lourde commise à l'occasion de l'exercice des fonctions - Faute initialement qualifiée de grave par l'employeur - Portée

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Salarié protégé - Réintégration - Réintégration en vertu de la loi d'amnistie du 20 juillet 1988 - Faute lourde commise à l'occasion de l'exercice des fonctions - Faute initialement qualifiée de grave par l'employeur - Portée

REPRESENTATION DES SALARIES - Règles communes - Licenciement - Réintégration - Réintégration en vertu de la loi d'amnistie du 20 juillet 1988 - Faute lourde commise à l'occasion de l'exercice des fonctions - Faute initialement qualifiée de grave par l'employeur - Portée

Constitue une faute lourde exclusive du droit à réintégration prévu par la loi d'amnistie du 20 juillet 1988, le comportement du salarié qui a pris une part active à une manifestation au cours de laquelle le président-directeur général de l'entreprise et le directeur de l'établissement ont été séquestrés pendant 12 heures et dont le rôle au cours de la séquestration a été celui d'un meneur.. Pour qualifier la faute, les juges saisis de la demande de réintégration ne sont pas liés par les termes employés par l'employeur au moment du licenciement.


Références :

Loi 88-828 du 20 juillet 1988

Décision attaquée : Cour d'appel de Bourges, 12 mai 1989

A RAPPROCHER : Chambre sociale, 1990-12-19 , Bulletin 1990, V, n° 676, p. 408 (rejet)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 jan. 1991, pourvoi n°89-43442, Bull. civ. 1991 V N° 11 p. 7
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1991 V N° 11 p. 7

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Cochard
Avocat général : Avocat général :M. Chauvy
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Waquet
Avocat(s) : Avocats :la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, la SCP Boré et Xavier.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1991:89.43442
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award