Attendu, selon la procédure, que M. X..., médecin conseil régional de la caisse mutuelle régionale du Nord, à la suite d'une altercation avec une assurée sociale, a été condamné par le tribunal correctionnel de Lille, le 21 mai 1984, pour violences légères ; que le 23 mai 1984, un journal local a fait état de cette décision ; qu'en application de l'article 21 du décret du 28 mars 1977 portant statut des médecins conseils, M. X... a été suspendu de ses fonctions avec maintien de son salaire ; que la commission paritaire a proposé de sanctionner le salarié par un blâme avec inscription au dossier ; que le conseil d'administration ayant prononcé un licenciement pour faute grave avec effet immédiat sans préavis ni indemnité, cette décision a été notifiée le 7 décembre 1984 au salarié ; qu'à la demande de celui-ci, la caisse mutuelle régionale du Nord, a énoncé, par lettre du 14 décembre 1984, les motifs du licenciement ;.
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Douai, 8 janvier 1987) d'avoir rejeté sa demande d'annulation de la mesure de suspension et de sa demande annexe en paiement de dommages-intérêts, alors, selon le moyen, qu'en statuant de la sorte sans préciser en quoi la présence de M. X... dans l'entreprise, neuf mois après les faits incriminés, risquait d'entraîner des perturbations dans la marche du service, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'urgence, n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 21 du décret n° 77-347 du 28 mars 1977 ;
Mais attendu qu'ayant relevé que M. X... avait été condamné par le tribunal correctionnel le 21 mai et que les faits avaient été rendus publics le 23 mai 1984, les juges du fond, qui ont retenu que la réputation de la Caisse était susceptible d'être mise en cause, ont caractérisé l'urgence autorisant une mesure de suspension en application de l'article 21 du décret du 28 mars 1977 ;
Sur le second moyen :
Attendu que M. X... fait encore grief à l'arrêt d'avoir dit que son licenciement était motivé par une faute grave, et de l'avoir en conséquence débouté de ses demandes en paiement des indemnités de rupture, alors, selon le moyen, d'une part, qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a manifestement dénaturé le procès-verbal de la séance du conseil d'administration en date du 19 novembre 1984, dont les termes clairs et précis révélaient sans équivoque que la caisse n'avait pas voulu aggraver la sanction proposée par la commission paritaire de discipline mais avait, en revanche, estimé opportun de mettre fin au contrat de travail du docteur X... et de procéder à son licenciement ; que, ce faisant, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1134 du Code civil et 19 et 29 du décret du 28 mars 1977 ; alors, d'autre part, qu'en toute hypothèse, en vertu de la note d'information n° 02/82 de la CANAM, le conseil d'administration de la caisse régionale ne peut se prononcer en cas de sanction qu'en restant dans les limites de l'avis de la commission paritaire nationale ; que, dès lors, en retenant que le conseil d'administration avait manifesté la volonté de prononcer la révocation, tout en relevant que la commission paritaire avait proposé, à titre de sanction, un blâme, la
cour d'appel, qui a méconnu les règles de la procédure disciplinaire prévues en la cause, a violé, par fausse application, les textes susvisés ; alors, en outre, et retenant la révocation, et affirmant cependant que le docteur X... avait été licencié pour faute grave, la cour d'appel a entaché son arrêt d'une contradiction entre les motifs et le dispositif et ainsi violé de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, au surplus, que la faute grave privative des indemnités de rupture est celle qui, par sa nature, rend impossible, sans risque de compromettre les intérêts légitimes de l'employeur, la continuation des rapports de travail, même pendant le temps limité du préavis ; qu'en revanche, la faute professionnelle commise par le salarié, bien que constituant une cause réelle et sérieuse de rupture, peut ne pas présenter le caractère d'une faute grave privative des indemnités de rupture ; que, dès lors, en statuant comme elle l'a fait, au seul motif que les voies de fait commises par le docteur X... constituaient de l'avis de la commission paritaire disciplinaire et du médecin conseil, une faute professionnelle devant entraîner une sanction, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé la faute grave, a violé par fausse application les articles L. 122-6, L. 122-9 du Code du travail, et 19 et 29 du décret du 23 mars 1977 susvisé ; alors, enfin, que la faute grave implique la constatation immédiate d'un fait rendant impossible la continuation du contrat du travail ; qu'en ne sanctionnant pas immédiatement la faute, l'employeur la tient nécessairement pour insuffisamment grave ; dès lors, en statuant comme elle l'a fait, tout en relevant que le conseil d'administration n'avait sanctionné que le 19 novembre 1984 des faits commis le 8 août 1983, soit quinze mois plus tôt, ce qui ôtait tout caractère de gravité à la faute, la cour d'appel a commis une erreur manifeste d'appréciation et faussement appliqué les textes susvisés ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'une note d'information du directeur du service médical de la caisse nationale d'assurance maladie et du médecin conseil national ne peut avoir pour effet d'imposer au conseil d'administration de la Caisse intéressée, auquel le statut des praticiens conseils donne le pouvoir de prononcer les sanctions disciplinaires, une règle de procédure non prévue par ce texte qui est un acte réglementaire ;
Attendu, en second lieu, qu'aux termes de l'article 21 du décret du 28 mars 1977, lorsque le praticien conseil est l'objet de poursuites pénales, sa situation n'est définitivement réglée qu'après que la décision rendue par la juridiction saisie soit devenue définitive ; que la cour d'appel, hors toute dénaturation et contradiction, a pu décider que les voies de fait exercées par le salarié sur la personne d'une assurée au lieu et au cours du travail constituaient une faute grave ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi