Attendu que selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 juillet 1988), la société Marc X..., invoquant les lois des 14 juillet 1909 et 11 mars 1957 pour la protection d'un modèle de chemisier " Louvre " qu'elle avait acquis du créateur et avait déposé le 25 janvier 1985, a demandé la condamnation, pour contrefaçon et pour concurrence déloyale, de la société Axeline qui avait fabriqué et commercialisé un modèle de chemisier " Véronique " ;.
Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :
Attendu que la société Axeline fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré recevable la demande en contrefaçon et en concurrence déloyale alors que, selon le pourvoi, d'une part, la cession d'un dessin ou modèle, qu'il soit ou non déposé, ne peut résulter que d'un acte écrit qui en l'espèce faisait défaut, en sorte que Marc X..., qui n'était pas le créateur du modèle " Louvre " n'avait pas qualité pour agir en contrefaçon sur la base d'une simple attestation de la prétendue cédante en sa faveur ; que l'arrêt a donc violé les articles 3 de la loi du 14 juillet 1909 et au besoin les articles 31, alinéa 1er, de la loi du 11 mars 1957 et 3, alinéa 3, de la loi du 12 mars l952 relative aux créations saisonnières de l'habillement ; alors que, d'autre part, et en tous cas, dès lors qu'il résultait des constatations de l'arrêt que la prétendue cession du modèle Louvre serait intervenue avant l'acte de dépôt, cette cession ne pouvait donc s'inscrire dans le cadre de la loi du 14 juillet 1909 qui ne donne du reste ouverture à aucune action pour les faits antérieurs au dépôt, mais seulement dans le cadre des lois du 11 mars 1957 et 12 mars 1952 qui exigent explicitement un écrit pour constater la cession à peine de nullité ou en tout cas d'inopposabilité aux tiers ; que l'arrêt a donc violé encore les textes susvisés ; et alors, qu'enfin, et à tout le moins, l'arrêt a faussement appliqué en la cause la liberté des preuves en matière commerciale qui ne joue pas en cas de cession de droits de propriété artistique ou de propriété industrielle ; qu'il a donc violé l'article 109 du Code de commerce et au besoin les articles 1341 à 1348 du Code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, que les dispositions exceptionnelles édictées par les articles 31, alinéa 1er, et 2 de la loi du 11 mars 1957 et 3, alinéa 3, de la loi du 12 mars 1952, mais non par la loi du 14 juillet 1909, sont relatives à la preuve des contrats d'exploitation des droits patrimoniaux de l'auteur et ne concernent que les rapports de celui-ci et de son cocontractant ; qu'elles sont ainsi étrangères à un litige opposant deux commerçants dont l'un se prétend cessionnaire d'un droit de propriété intellectuelle ;
Attendu, en second lieu, que la loi du 14 juillet 1909, à la différence des lois sur les brevets d'inventions et sur les marques, n'a ni créé un registre national ni prescrit l'obligation d'un écrit pour les cessions des droits sur les modèles ;
Qu'il s'ensuit que la cour d'appel, qui pour retenir l'antériorité du modèle de la société Marc X..., s'est fondée sur une attestation du créateur de ce modèle précisant la date de la création et la cession de ses droits à cette société, a légalement justifié sa décision du chef critiqué ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Et sur le second moyen :
Attendu qu'il est également fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli la demande en contrefaçon et en concurrence déloyale alors, selon le pourvoi, que la contrefaçon s'apprécie selon les ressemblances et non pas en fonction de différences dont l'allégation de " minimes " est démentie par des constatations soulignant que trois des quatre éléments caractéristiques du modèle " Louvre " et en particulier celui relatif au positionnement des trois larges plis plats partant de l'épaule, ne sont pas reproduits " presque à l'identique ", d'autant que l'aspect d'ensemble relevé était celui de la mode des chemisiers avec une différence constatée à l'arrière ; que l'arrêt est donc entaché d'un défaut de base légale par violation des articles 70 et suivants de la loi du 11 mars 1957, 1er et suivants, l l de la loi du 14 juillet 1909, 1382 et 1383 du Code civil ;
Mais attendu qu'après avoir décrit les éléments caractéristiques du modèle " Louvre " et énoncé qu'ils étaient reproduits dans le chemisier Véronique presque à l'identique avec de simples différences de détail qu'elle a précisées, la cour d'appel a retenu la confusion provoquée par la même impression d'ensemble donnée par les deux modèles ; que par ces appréciations souveraines elle a légalement justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi