Attendu que la société Filatures d'Ouville ayant été déclarée en liquidation des biens par jugement du 15 mai 1979, le juge-commissaire, par ordonnances des 4 et 12 avril 1980, a autorisé le syndic à vendre aux enchères publiques et par le ministère de M. A..., notaire, les biens immobiliers dépendant de l'actif de la liquidation ; qu'après mise en vente des immeubles en sept lots le 17 octobre 1980, M. Z... a surenchéri dans le délai légal sur l'ensemble des lots et a été déclaré adjudicataire de trois lots le 27 novembre 1980 ; que le même jour, il a fait assigner le syndic devant le tribunal de grande instance en nullité de la vente, celle-ci n'ayant pas eu lieu, comme le prévoit l'article 84 de la loi du 13 juillet 1967, suivant les formes prescrites en matière de saisie immobilière ; que l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi de cassation, l'a déclaré irrecevable en son action ;.
Sur la demande de mise hors de cause présentée par M. A... :
Attendu que le pourvoi ne formule aucune critique contre le chef de l'arrêt qui a mis hors de cause M. A... ; qu'il y a donc lieu d'accueillir la demande de ce dernier tendant à être maintenu hors de cause ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 84 de la loi du 13 juillet 1967 applicable en la cause ;
Attendu que les ventes d'immeubles prévues par ce texte ont lieu suivant les formes prescrites en matière de saisie immobilière ; que cette règle est d'ordre public ;
Attendu que pour déclarer irrecevable la demande de nullité présentée par M. Z..., la cour d'appel énonce que l'adjudicataire d'un immeuble est irrecevable à critiquer, quels qu'en soient les vices, les opérations préalables à l'adjudication dans laquelle il a enchéri ou surenchéri ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la nullité absolue résultant de la violation des formes prescrites par la loi pouvait être invoquée par tout intéressé, sans qu'il fût tenu de justifier d'un grief, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur la seconde branche du moyen :
Vu l'article 1351 du Code civil, ensemble les articles 8 et 84 de la loi du 13 juillet 1967 applicable en la cause ;
Attendu que pour déclarer l'action irrecevable, l'arrêt retient encore que les ordonnances du juge-commissaire autorisant, à la requête du syndic, la vente des immeubles aux enchères publiques en l'étude d'un notaire, ont acquis, faute d'opposition ou de tierce opposition, l'autorité de la chose jugée ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'autorisation donnée par le juge-commissaire ne pouvait faire obstacle à l'action de M. Z..., la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
MET hors de cause M. A... ;
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 décembre 1988, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens MOYEN ANNEXE
Moyen produit par Me X..., avocat aux Conseils, pour MM. Z..., Yon, Baullier et Senecal ;
" Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué, statuant sur renvoi de cassation, d'avoir déclaré irrecevable la demande en nullité de la vente et de l'adjudication sur surenchère d'immeubles d'une société en liquidation des biens, effectuée en dehors des formes prévues par l'article 84, alinéa 3, de la loi du 13 juillet 1967, présentée par M. Z..., surenchérisseur et adjudicataire ;
Aux motifs que " l'adjudicataire d'un immeuble vendu au cours de la réalisation de l'actif d'une liquidation des biens est irrecevable à critiquer, quels qu'en soient les vices, les opérations préalables à l'adjudication, dans laquelle il a enchéri ou surenchéri en dépit même de l'intérêt qu'il prétendrait avoir à se préserver de l'action en nullité à laquelle il s'estime exposé, puisqu'il s'est volontairement porté surenchérisseur sur un cahier des charges dont la lecture suffisait à lui révéler les vices de la procédure ;
Que cette irrecevabilité est d'autant plus certaine que les ordonnances du juge-commissaire des 4 et 12 avril 1980, autorisant Me Y..., syndic à la liquidation des biens, à vendre en sept lots, aux enchères publiques et par le ministère de Me A..., notaire à Ouville-la-Rivière, les biens de la société Filature d'Ouville, ainsi que l'ordonnance du 30 octobre 1980, acceptant la surenchère de M. Z... et autorisant Me A..., notaire, à procéder à une nouvelle adjudication après exécution des formalités, ne pouvaient être attaquées que par la voie d'une opposition ou d'une tierce opposition, formée dans les délais impérativement prescrits par l'article 17 du décret du 22 décembre 1967 sur le règlement judiciaire, sans qu'il y ait lieu de distinguer selon que le juge-commissaire ait ou non statué dans les limites de ses attributions " ;
" Qu'en l'absence d'opposition ou de tierce opposition, ces trois ordonnances ont acquis l'autorité de la chose jugée et doivent donc être exécutées " ;
Et que " M. Z..., qui prétend avoir un intérêt manifeste pour agir en sa qualité d'adjudicataire susceptible d'éviction, avait toute possibilité de demander au tribunal de grande instance de confirmer ses droits de propriété, plutôt que de demander la nullité de la vente " ;
ALORS, D'UNE PART, QUE, selon l'article 84, alinéa 3, de la loi du 13 juillet 1967, les ventes des immeubles dépendant des liquidations des biens doivent avoir lieu suivant les formes prescrites en matière de saisie immobilière ; que la vente d'un immeuble effectuée par le syndic, au mépris de cette règle de fond substantielle, est affectée d'une nullité absolue qui peut être invoquée par tout intéressé, même en l'absence de grief prouvé et même par l'acquéreur dont le titre se trouve entaché d'un vice ; qu'en affirmant que l'adjudicataire ne pouvait pas dénoncer la nullité de la vente effectuée devant notaire, nullité insusceptible de régularisation, pour avoir surenchéri sur un cahier des charges dont la lecture suffisait à lui révéler ce vice, la cour d'appel a, en méconnaissance de l'arrêt de cassation qui la saisissait, violé les articles 84, alinéa 3, de la loi du 13 juillet 1967, et 715 du nouveau Code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, que l'autorité de la chose jugée ne s'applique qu'aux décisions judiciaires rendues en matière contentieuse, tranchant une contestation débattue entre les parties ; qu'en attribuant une telle autorité aux ordonnances du juge-commissaire rendues sur requête, en l'absence de toute contradiction et de toute contestation, la cour d'appel a violé les articles 1351 du Code civil, 25 et 480 du nouveau Code de procédure civile "