Sur le moyen unique :
Vu l'article 868 du Code civil ;
Attendu, selon ce texte, que l'indemnité équivalente à la portion excessive d'une libéralité réductible en valeur, se calcule d'après l'état des objets donnés ou légués au jour où la libéralité a pris effet, et leur valeur à l'époque du partage ; que cette valeur doit être déterminée, compte tenu des plus values du bien donné provenant d'une cause étrangère au gratifié ;
Attendu que Gabriel X... est décédé le 22 octobre 1974 en ayant fait donation, le 7 mars 1973, de terres en nue-propriété à ses deux filles, Mmes Y... et Z..., par préciput et hors part et à titre de partage anticipé, avec dispense expresse de rapport en nature à sa succession ; que ces terres, louées lors de la donation, ont été libérées en 1980 et en 1986 ; que la veuve de Gabriel X..., usufruitière des mêmes biens, est décédée le 16 janvier 1986 ; que sa troisième fille, Mme A... a demandé en justice que, pour le partage des biens dépendant de la communauté de ses parents et de la succession de son père, les terres attribuées à ses soeurs soient évaluées comme libres de toute location, en vue de la réduction en valeur de cette libéralité et du calcul de l'indemnité due de ce chef ;
Attendu que l'arrêt attaqué, constatant que les terres données étaient grevées d'un bail au jour de la libéralité, a décidé que, par application de l'article 868 du Code civil, elles devaient être évaluées en cet état à l'époque du partage bien que libérées de la location qui les grevait au jour de la donation ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 mai 1988, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Reims