CASSATION sur les pourvois formés par :
- le procureur général près la cour d'appel de Paris,
- X... Hervé,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de ladite cour d'appel, en date du 16 février 1989, qui, dans la procédure suivie contre Christophe Y... et Hervé X... du chef d'infraction à la législation sur les stupéfiants, a dit n'y avoir lieu à annulation de pièces.
LA COUR,
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle du 16 mars 1989 prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit dans l'intérêt de Y... ;
Sur le moyen unique de cassation proposé par le procureur général, relevé d'office en ce qui concerne X... et pris de la violation de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et des articles 81 et 151 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué a refusé de constater la nullité d'une écoute téléphonique réalisée lors de l'enquête préliminaire ;
Vu lesdits articles, ensemble les articles 171, 173 et 206 du Code de procédure pénale ;
Attendu que, selon l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; qu'il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi ; que si les articles 81 et 151 du Code de procédure pénale permettent au juge d'instruction d'ordonner, sous certaines conditions, des écoutes ou enregistrements d'entretiens téléphoniques, aucune disposition légale n'autorise les officiers de police judiciaire à y procéder dans le cadre d'une enquête préliminaire ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu'ayant été avisés de ce que Christian Y... se serait livré à un trafic de stupéfiants et aurait eu, notamment, pour client André Z..., les services de police, agissant d'initiative, ont invité Z... à téléphoner à Y... en vue de prendre rendez-vous pour une livraison de drogue et ont enregistré la conversation téléphonique sur radiocassette, dressant ensuite un procès-verbal de cette opération ; qu'à l'heure convenue pour le rendez-vous, les policiers ont pu ainsi pénétrer, à la suite de Z..., dans le domicile de Y..., interpeller les occupants et procéder à perquisition ;
Attendu qu'en refusant de prononcer la nullité du procès-verbal relatant l'enregistrement de l'entretien téléphonique, obtenu par artifice ou stratagème, et de tirer les conséquences qui découlaient de cette nullité, la chambre d'accusation a méconnu le principe ci-dessus rappelé ; que son arrêt encourt donc la censure ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris, en date du 16 février 1989, et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris, autrement composée.