La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/03/1989 | FRANCE | N°86-17204

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 20 mars 1989, 86-17204


Attendu que la société de droit français IPI Trade International (Ipitrade) a été déclarée adjudicataire, à la suite d'un appel d'offres du service d'approvisionnement égyptien relatif à l'achat de volailles congelées ; que le marché comportait une clause prévoyant que les litiges seraient tranchés conformément aux règles de l'arbitrage Uncitral ; que la marchandise, chargée sur quatre navires frigorifiques, a été vérifiée au départ de la France tant par les services vétérinaires que par la société SGS, agréée par l'acheteur, laquelle a attesté qu'elle était confo

rme aux conditions du marché ; qu'aucune réserve sur la qualité marchande n'a...

Attendu que la société de droit français IPI Trade International (Ipitrade) a été déclarée adjudicataire, à la suite d'un appel d'offres du service d'approvisionnement égyptien relatif à l'achat de volailles congelées ; que le marché comportait une clause prévoyant que les litiges seraient tranchés conformément aux règles de l'arbitrage Uncitral ; que la marchandise, chargée sur quatre navires frigorifiques, a été vérifiée au départ de la France tant par les services vétérinaires que par la société SGS, agréée par l'acheteur, laquelle a attesté qu'elle était conforme aux conditions du marché ; qu'aucune réserve sur la qualité marchande n'a été faite, au déchargement en Egypte, par la société The Authority for Supply Commodities Cairo Estram (Estram), établissement public égyptien, mais qu'à l'expiration de quinze jours à un mois suivant la réception des différentes cargaisons, cet organisme s'est plaint, soit de la présence de " salmonelles " contaminant la volaille, soit d'un taux d'humidité anormal ; qu'Ipitrade s'étant vue imposer soit une réduction de prix, soit une reprise totale de la marchandise, a saisi le président du tribunal de commerce, juge des référés, d'une demande de provision, après expertise précédemment ordonnée ; que l'arrêt attaqué (Paris, 10 juin 1986) a confirmé l'ordonnance de référé rejetant les exceptions d'incompétence soulevées par Estram, qui se prévalait notamment de la clause compromissoire incluse dans le marché, et a alloué à Ipitrade, à titre de provision, la somme de 746 116,75 dollars des Etats-Unis d'Amérique ou sa contrevaleur en francs français au jour du paiement ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'Estram fait grief à la cour d'appel de l'avoir condamnée à payer une provision à Ipitrade, alors, selon le moyen, qu'il résulte de l'article 1458, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile que la présence dans un contrat d'une clause d'arbitrage exclut nécessairement la compétence du juge des référés pour allouer une provision, que l'instance arbitrale ait été ou non ouverte, de sorte qu'en statuant comme il a fait, l'arrêt attaqué a violé le texte précité ;

Mais attendu que l'article 1458, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile ne doit recevoir application que dans le cas où une juridiction étatique est saisie du fond du litige, malgré l'existence d'une convention d'arbitrage ; que le juge des référés, dont les décisions ont un caractère provisoire et qui ne peuvent préjudicier au principal, peut, en application de l'article 809, alinéa 2, du même Code, connaître d'une demande de provision lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable ; que seule la saisine du tribunal arbitral fait obstacle à sa compétence ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

LE REJETTE ;

Mais sur le second moyen, pris en sa seconde branche :

Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que, pour retenir la compétence de la juridiction française des référés, l'arrêt attaqué énonce que la convention franco-égyptienne du 15 mars 1982 n'exclut pas cette compétence parce que son article 31 prévoit " qu'en cas d'urgence constatée, les tribunaux de chacun des deux Etats, quel que soit le tribunal compétent sur le fond du litige, ont la faculté d'ordonner des mesures de caractère provisoire ou conservatoire sur le territoire de leur Etat " ;

Attendu cependant que l'article 31 de la convention précitée, inclus sous le titre " Reconnaissance et exécution des décisions judiciaires ", est destiné au juge de l'exequatur ; que si, à défaut d'application de cette disposition, l'urgence peut justifier la compétence des tribunaux français pour ordonner des mesures provisoires ou conservatoires, notamment lorsque la sécurité des personnes ou la conservation de leurs biens est en péril, la cour d'appel qui, en l'espèce, n'a pas caractérisé l'urgence, a privé sa décision de motifs ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du second moyen :

CASSE ET ANNULE, en son entier, l'arrêt rendu, le 10 juin 1986, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 86-17204
Date de la décision : 20/03/1989
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

1° REFERE - Compétence - Provision - Arbitrage - Juridiction étatique saisie.

1° REFERE - Urgence - Provision - Attribution - Juridiction étatique saisie - Existence d'une convention d'arbitrage - Absence d'influence 1° ARBITRAGE - Tribunal arbitral - Saisine - Effet 1° REFERE - Applications diverses - Arbitrage - Clause compromissoire.

1° L'article 1458, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile ne doit recevoir application que dans le cas où une juridiction étatique est saisie du fond du litige, malgré l'existence d'une convention d'arbitrage ; il s'ensuit que seule la saisine du tribunal arbitral fait obstacle à la compétence du juge des référés pour allouer une provision lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable .

2° CONVENTIONS INTERNATIONALES - Convention franco-égyptienne du 15 mars 1982 - Article 31 - Mesures provisoires ou conservatoires en cas d'urgence - Pouvoir des tribunaux de chacun des deux Etats sur le territoire de leur Etat - Portée.

2° CONFLIT DE JURIDICTIONS - Compétence internationale des juridictions françaises - Compétence territoriale - Convention franco-égyptienne du 15 mars 1982 - Article 31 - Mesures provisoires ou conservatoires en cas d'urgence 2° REFERE - Compétence - Compétence territoriale - Urgence - Mesures provisoires ou conservatoires - Condition - Convention franco-égyptienne du 15 mars 1982 - Article 31 - Défaut d'application.

2° L'article 31 de la convention franco-égyptienne du 15 mars 1982 qui prévoit " qu'en cas d'urgence constatée, les tribunaux de chacun des deux Etats, quel que soit le tribunal compétent sur le fond du litige, ont la faculté d'ordonner des mesures de caractère provisoire ou conservatoire sur le territoire de leur Etat ", est destiné au juge de l'exequatur ; à défaut d'application de cette disposition, l'urgence peut justifier la compétence des tribunaux français pour ordonner des mesures provisoires ou conservatoires .


Références :

Convention franco-égyptienne du 15 mars 1982 art. 31
Nouveau Code de procédure civile 1458 al. 2

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 10 juin 1986

A RAPPROCHER : (1°). Chambre civile 2, 1953-12-04 , Bulletin 1953, II, n° 337, p. 208 (cassation)

arrêt cité ;

Chambre civile 3, 1979-06-07 , Bulletin 1979, III, n° 122, p. 93 (rejet)

arrêt cité ;

Chambre civile 2, 1986-06-18 , Bulletin 1986, II, n° 97, p. 67 (cassation), et les arrêts cités ;

Chambre civile 2, 1989-03-20 , Bulletin 1989, II, n° 84, p. 40 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 20 mar. 1989, pourvoi n°86-17204, Bull. civ. 1989 I N° 139 p. 92
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1989 I N° 139 p. 92

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Ponsard
Avocat général : Avocat général :M. Dontenwille
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Camille Bernard
Avocat(s) : Avocats :la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde, la SCP Delaporte et Briard .

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1989:86.17204
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award