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21/02/1989 | FRANCE | N°86-16240

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 21 février 1989, 86-16240


Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que, le 9 juillet 1982, M. X... a confié la garde de meubles meublants et d'objets mobiliers divers à une société de garde-meuble (la société) ; qu'en septembre 1984, il restait débiteur, au titre des frais de garde, d'une somme de 13 730 50 francs ; que la société l'a assigné devant le juge d'instance sur le fondement des dispositions de la loi du 31 décembre 1903 relative à la vente de certains objets abandonnés ; que, sans contester sa dette, M. X... a sollicité un délai de paiement, et par ordonnance du 26 octobre 1984, obt

enu un tel délai jusqu'au 31 décembre suivant ; que, par ordonn...

Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que, le 9 juillet 1982, M. X... a confié la garde de meubles meublants et d'objets mobiliers divers à une société de garde-meuble (la société) ; qu'en septembre 1984, il restait débiteur, au titre des frais de garde, d'une somme de 13 730 50 francs ; que la société l'a assigné devant le juge d'instance sur le fondement des dispositions de la loi du 31 décembre 1903 relative à la vente de certains objets abandonnés ; que, sans contester sa dette, M. X... a sollicité un délai de paiement, et par ordonnance du 26 octobre 1984, obtenu un tel délai jusqu'au 31 décembre suivant ; que, par ordonnance du 7 février 1985, la vente aux enchères publiques du mobilier a été fixée au 25 février 1985, Mme Y..., commissaire-priseur, étant désignée pour y procéder ; que le commissaire-priseur a informé M. X... de la date de la vente par lettre recommandée du 15 février 1985, reçue le 18 du même mois ; que la vente a produit une somme de 176 720 francs ; que, reprochant diverses irrégularités au commissaire-priseur, M. X... l'a assigné en paiement de la somme de 1 544 430 francs, montant, selon lui, de son préjudice, outre celle de 20 000 francs au titre du préjudice moral ;

Sur le premier moyen, pris en ses quatre branches :

Attendu que M. X... reproche à l'arrêt attaqué (Orléans, 23 avril 1986) de l'avoir débouté de sa demande, alors, selon le moyen, d'une part, que la présomption d'abandon instaurée par la loi du 31 décembre 1903 modifiée ne s'applique qu'aux biens de peu de valeur et qu'il appartenait au commissaire-priseur, qui avait constaté, comme l'ont relevé les juges du fond " la grande valeur du mobilier mis en vente " de faire toutes observations appropriées au juge d'instance et, le cas échéant, de refuser de prêter son concours à une atteinte au droit de propriété ; alors, d'autre part, que la loi du 31 décembre 1903 ne déroge pas au principe selon lequel les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés qu'après leur avoir été notifiés ; qu'en l'espèce, M. X... faisait valoir que la lettre du commissaire-priseur ne comportait pas la copie de l'ordonnance du 7 février 1985 et qu'il avait attiré l'attention de l'officier ministériel sur l'absence de notification de l'ordonnance ; qu'en considérant que celui-ci devait procéder à la vente à la date fixée par le juge d'instance, la cour d'appel a violé l'article 503 du nouveau Code de procédure civile ; alors, de troisième part, que l'article 22 du décret du 21 novembre 1956 fixant le tarif des commissaires-priseurs ne tend qu'à assurer le paiement par le vendeur des frais de l'expertise et de la publicité spéciale et ne dispense pas le commissaire-priseur d'aviser le juge qui le commet de l'utilité de recourir à l'assistance d'un expert ou à une publicité spéciale ; et alors, de quatrième part, que le principe général dont s'inspire l'article 622 du Code de procédure civile s'applique notamment aux ventes prévues par la loi du 31 décembre 1903 et qu'il en est spécialement ainsi lorsque, comme en l'espèce, les objets déposés en garde-meuble sont de grande valeur et que le propriétaire manifeste son intention de ne pas les abandonner ;

Mais attendu, d'abord, que la loi du 31 décembre 1903 relative à la vente de certains objets abandonnés, modifiée par la loi n° 68-1248 du 31 décembre 1968 qui étend ses dispositions aux objets mobiliers déposés en garde-meuble, ne fait aucune distinction quant à la valeur des objets abandonnés ;

Attendu, ensuite, que l'article 2 de la loi précitée prévoit seulement, lorsque l'ordonnance du juge d'instance n'a pas été rendue en présence du propriétaire, que l'officier public commis le préviendra huit jours francs à l'avance, par lettre recommandée, des lieu, jour et heure de la vente dans le cas où son domicile sera connu ; que l'article 503 du nouveau Code de procédure civile n'est pas applicable à cette procédure ;

Attendu, enfin, que c'est à bon droit que la cour d'appel a estimé que l'article 622 du Code de procédure civile était sans application en l'espèce, la vente en question n'étant pas poursuivie pour cause de saisie mais sur le fondement de la loi du 31 décembre 1903 qui, au demeurant, ne fait expressément référence, en son article 6, qu'aux articles 624 et 625 du Code de procédure civile ; que c'est, dès lors, sans violer les textes invoqués que la cour d'appel a retenu que le commissaire-priseur était tenu par les termes de l'ordonnance le commettant qui n'avait pas limité la vente à concurrence du montant de la créance ;

D'où il suit qu'en aucune de ses quatre branches le moyen n'est fondé ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu qu'il est encore fait grief à la cour d'appel d'avoir statué ainsi qu'il a été dit, alors, selon le moyen, d'une part, qu'il importe peu que, par le paiement de sa dette, le débiteur ait eu la possibilité d'empêcher la vente ; que les fautes commises par le commissaire-priseur constituent la cause adéquate de la réalisation de celle-ci, et alors, d'autre part, que l'inobservation des formalités de rédaction du procès-verbal de vente ne mentionnant pas le nom et le domicile déclaré des acheteurs privait le propriétaire des biens vendus de la possibilité de revendiquer ceux-ci en temps utile de sorte qu'en déniant l'existence d'un lien de causalité entre la faute retenue à l'encontre du commissaire-priseur et le préjudice subi par le propriétaire dépossédé, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel a pu estimer qu'aucun lien de causalité n'existait entre les fautes retenues à l'encontre du commissaire-priseur et le préjudice allégué par M. X..., dès lors que celui-ci savait son obligation constante et n'avait pas offert de régler sa dette avant la vente ;

Attendu, ensuite, que M. X... n'a pas soutenu dans ses conclusions d'appel qu'il avait été privé, du fait de l'inobservation des formalités de rédaction du procès-verbal de vente, de la possibilité de revendiquer les objets vendus ;

D'où il suit que le moyen qui est irrecevable comme nouveau et mélangé de fait et de droit en sa seconde branche, n'est pas fondé en sa première ;

Et sur le troisième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu, enfin, qu'il est soutenu, d'une part, que le fait d'être privé de sa propriété hors des cas prévus par la loi constitue par lui-même un fait dommageable et qu'en décidant le contraire la cour d'appel a violé les articles 1382 et 545 du Code civil, et alors, d'autre part, que les dépens afférents aux actes et procédures d'exécution injustifiés sont à la charge des auxiliaires de justice qui les ont fait, de sorte qu'en refusant l'indemnisation de ces frais frustratoires, la cour d'appel a violé les articles 1382 du Code civil et 698 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que le rejet des premier et deuxième moyens rend inopérants les griefs formulés dans le troisième ; d'où il suit qu'il ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 86-16240
Date de la décision : 21/02/1989
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

1° ADJUDICATION - Vente d'objets abandonnés ou déposés en garde-meuble - Loi du 31 décembre 1903 modifiée - Valeur des objets - Prise en considération (non).

1° La loi du 31 décembre 1903 relative à la vente de certains objets abandonnés, modifiée par la loi n° 68-1248 du 31 décembre 1968, qui étend ses dispositions aux objets mobiliers déposés en garde-meuble, ne fait aucune distinction quant à la valeur des objets abandonnés .

2° ADJUDICATION - Vente d'objets abandonnés ou déposés en garde-meuble - Loi du 31 décembre 1903 modifiée - Procédure - Article 503 du nouveau Code de procédure civile - Application (non).

2° JUGEMENTS ET ARRETS - Exécution - Conditions - Notification - Article 503 du nouveau Code de procédure civile - Application - Vente poursuivie sur le fondement de la loi du 31 décembre 1903 modifiée.

2° L'article 503 du nouveau Code de procédure civile est inapplicable à la procédure instituée par l'article 2 de la loi du 31 décembre 1903, qui prévoit, lorsque l'ordonnance du juge d'instance fixant la date de la vente aux enchères publiques n'a pas été rendue en présence du propriétaire, que l'officier public le préviendra huit jours francs à l'avance, par lettre recommandée, des lieu, jour et heure de la vente dans le cas où son domicile sera connu .

3° ADJUDICATION - Vente d'objets abandonnés ou déposés en garde-meuble - Loi du 31 décembre 1903 modifiée - Procédure - Article 622 du Code de procédure civile - Application (non).

3° SAISIES - Saisie-exécution - Vente - Limites - Montant de la créance - Article 622 du Code de procédure civile - Application - Vente poursuivie sur le fondement de la loi du 31 décembre 1903 modifiée (non) 3° OFFICIERS PUBLICS OU MINISTERIELS - Commissaire-priseur - Vente aux enchères publiques d'objets mobiliers - Vente poursuivie sur le fondement de la loi du 31 décembre 1903 modifiée - Article 622 du Code de procédure civile - Application (non).

3° L'article 622 du Code de procédure civile est sans application dès lors que la vente n'est pas poursuivie pour cause de saisie mais sur le fondement de la loi du 31 décembre 1903 ; le commissaire-priseur n'est donc tenu que par les termes de l'ordonnance le commettant qui n'avait pas limité la vente à concurrence du montant de la créance .

4° OFFICIERS PUBLICS OU MINISTERIELS - Commissaire-priseur - Responsabilité - Lien de causalité - Vente - Vente d'objets mobiliers - Procès-verbal - Nom de l'acheteur - Omission - Portée.

4° RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASIDELICTUELLE - Lien de causalité avec le dommage - Commissaire-priseur - Vente - Vente d'objets mobiliers - Procès-verbal - Nom de l'acheteur - Omission - Portée.

4° Il n'existe aucun lien de causalité entre la faute du commissaire-priseur qui n'a pas mentionné le nom des acheteurs sur le procès-verbal de vente et le préjudice allégué par le propriétaire, dès lors que celui-ci savait son obligation constante et n'avait pas offert de régler sa dette avant la vente .


Références :

Code de procédure civile 622
Loi du 31 décembre 1903 art. 2
Loi 68-1248 du 31 décembre 1968
nouveau Code de procédure civile 503

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 23 avril 1986


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 21 fév. 1989, pourvoi n°86-16240, Bull. civ. 1989 I N° 85 p. 54
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1989 I N° 85 p. 54

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Ponsard
Avocat général : Avocat général :M. Dontenwille
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Viennois
Avocat(s) : Avocats :MM. Ryziger, Vuitton .

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1989:86.16240
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