Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Vu les articles 1341 et suivants du Code civil, ensemble l'article 1134 du même Code ;
Attendu que Madeleine Z..., qui avait d'un premier mariage un enfant, Bernard A..., a, en 1945, épousé en secondes noces, sous le régime de la communauté réduite aux acquêts, René X..., lui-même père d'un enfant, Jean-Claude X... ; que, par jugement du 3 janvier 1962, déclaré exécutoire en France le 9 janvier 1963, le tribunal de première instance de Casablanca a prononcé le divorce des époux Y... ; que Mme Z... a renoncé à la communauté le 5 février 1963 ; que les ex-époux se sont remariés le 30 avril 1964 sous le régime de séparation de biens ; que, dans l'intervalle, Madeleine Z... a, par acte notarié du 19 juillet 1963, acquis de la SCI Les Crêtes, dont René X... était associé, deux appartements dont le prix a été, en fait, réglé par le débit du compte courant d'associé de celui-ci ; que Madeleine Z... est décédée le 7 juin 1981, laissant son époux, René X..., et, pour unique héritier, son fils du premier lit, Bernard A... ; que René X... est lui-même décédé le 18 mai 1982, laissant pour héritier son fils, Jean-Claude X... ; que ce dernier a, le 22 septembre 1982, assigné M. Bernard A... pour faire déclarer nulle, en application de l'article 1099, alinéa 2, du Code civil, la donation qui serait déguisée sous la forme de l'acte de vente en date du 19 juillet 1963 ; que le défendeur a soutenu que cette vente était intervenue en exécution d'un accord conclu entre les époux le 12 août 1961, par lequel Mme Z... devait recevoir divers biens en contrepartie de sa renonciation à la communauté ;
Attendu que l'arrêt attaqué a dit que la vente du 19 juillet 1963 constitue une donation déguisée, aux motifs, notamment, qu'à supposer que la convention alléguée dont la preuve écrite n'est pas rapportée, ait existé, elle ne saurait servir de cause juridique à l'acte du 19 juillet 1963, comme étant à l'époque illicite et nulle d'ordre public, parce qu'ayant pour objet de procéder en cours de divorce et en vue de celui-ci, à la liquidation et au partage anticipé de la communauté ;
Attendu cependant que l'héritier réservataire étant admis à faire, par tous moyens, la preuve d'une donation déguisée entre époux de nature à porter atteinte à sa réserve, son contradicteur peut lui-même établir par tous moyens que l'acte litigieux ne présente pas un caractère gratuit parce qu'il comportait une contrepartie consistant dans l'abandon corrélatif de droits au profit du conjoint ;
Qu'ainsi, en statuant comme elle a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le deuxième moyen :
Vu les articles 1099 et 1099-1 du Code civil ;
Attendu que l'arrêt attaqué a estimé que la vente du 19 juillet 1963 constituait une donation déguisée, sans rechercher s'il y avait dans l'acte des affirmations mensongères relatives à l'origine des fonds, alors que la qualification de donation déguisée ne peut être retenue qu'en présence de cette dissimulation mensongère ;
Qu'ainsi, en statuant comme elle a fait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le troisième moyen,
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 1er octobre 1986, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier