Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Attendu que, selon arrêt du 13 juillet 1969, rendu sur renvoi de cassation, la cour d'appel d'Amiens, chambre correctionnelle, a condamné MM. X... et Y..., du chef de détournement de 631 tonnes de luzerne, au préjudice de la société France Luzerne, à diverses peines ainsi qu'au remboursement de la somme de 319 650 francs ; que 408 de ces 631 tonnes ayant été revendues à M. Vincent, la cour d'appel, chambre civile, a, par l'arrêt attaqué (Reims, 10 juillet 1985), condamné ce dernier à payer à la même société la somme de 517 641 francs représentant leur valeur au jour de la décision ;
Attendu que M. Vincent fait grief audit arrêt d'avoir déclaré l'action recevable alors que, disposant déjà d'un titre exécutoire lui permettant d'obtenir réparation de l'intégralité de son préjudice, la société France Luzerne n'avait plus qualité à agir devant la juridiction civile en indemnisation du même préjudice ;
Mais attendu que l'action est ouverte à tous ceux qui justifient d'un intérêt légitime ; que celui qui a obtenu réparation d'une personne a la faculté d'agir contre une autre personne qu'elle estime responsable ; qu'ayant relevé que la société France Luzerne n'avait pu percevoir qu'une partie des dommages-intérêts alloués par la juridiction pénale, l'arrêt attaqué a pu déclarer recevable l'action intentée contre M. Vincent par la même société devant la juridiction civile en paiement d'un complément d'indemnité ;
Et sur la seconde branche du même moyen :
Attendu qu'il est également reproché à la cour d'appel de ne pas avoir répondu à l'offre de rapporter la preuve que la société France Luzerne avait autorisé M. X... à éteindre sa dette par versements mensuels de 4 000 francs et d'avoir ainsi violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel n'était pas tenue de suivre le demandeur au pourvoi dans le détail de son argumentation, alors surtout que la preuve ainsi offerte concernait la dette d'un tiers, et non sa propre dette ;
Qu'il s'ensuit que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;
Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches :
Attendu qu'il est enfin fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir statué par un ensemble de motifs laissant incertain le fondement de sa condamnation et privant ainsi la décision de base légale, et d'avoir accueilli l'action en revendication de choses fongibles, alors qu'une telle action se trouverait exclue du champ d'application des articles 2279 et 2280 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel précise " que l'action de la société France Luzerne est fondée sur le droit de revendication à l'encontre du possesseur de mauvaise foi " ; qu'une telle action peut s'exercer sur toutes les catégories de choses, notamment sur les choses fongibles ; que c'est seulement à titre surabondant, et pour répondre aux conclusions d'appel évoquant l'éventualité d'une action fondée sur les articles 1382 et 1383 du Code civil, que l'arrêt attaqué a examiné cette hypothèse ; que la décision se trouve légalement justifiée ;
Qu'ainsi, pris en ses deux branches, le deuxième moyen n'est pas davantage fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi