CASSATION sur le pourvoi formé par :
- la Mutuelle assurance artisanale de France (MAAF), partie intervenante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 20e chambre A, en date du 15 décembre 1987 qui, dans une procédure suivie contre X... du chef de blessures involontaires, s'est prononcé sur les réparations civiles.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation et fausse application des articles L. 411-1 du Code de la sécurité sociale, L. 455-1 du même Code, 485 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a dit que l'accident dont a été victime Y... est un accident de trajet, donnant droit à la victime, en vertu de l'article L. 455-1 du Code de la sécurité sociale, d'agir conformément au droit commun contre l'auteur de l'accident, fût-il préposé de la même entreprise ;
" après avoir constaté que Y... et X... avaient pris en charge pour le compte de leur employeur, la société CGCT, un représentant d'un établissement bancaire avec lequel, revenant de Bretagne tardivement, ils avaient pris un repas dans un restaurant et s'étaient rendus dans une boîte de nuit et que l'accident s'était produit à l'issue de cette soirée alors que X...raccompagnait Y... à son domicile ;
" aux motifs qu'il est admis par tous que le dîner en commun et le passage dans la boîte de nuit entraient dans la mission des préposés de la société CGCT mais que les éléments de fait rapportés ci-dessus ne permettaient pas de retenir que la victime se trouvait toujours dans l'exercice de son travail au cours du parcours en voiture qui avait suivi puisque ce transport avait été organisé pour lui permettre de regagner son domicile ;
" alors qu'ayant constaté que les salariés étaient en mission pour le compte de leur employeur, la CGCT, et qu'après le dîner en commun et le passage dans une boîte de nuit qui entraient dans le cadre de cette mission, le transport, au cours duquel Y... a été blessé, avait été organisé pour lui permettre de regagner son domicile, la Cour aurait dû en déduire que constituait un accident de travail l'accident litigieux qui s'est produit alors que la mission des salariés, qui ne devait s'achever qu'avec le déplacement, n'était pas terminée ; que la Cour d'appel a violé par fausse application les textes visés au moyen " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que constitue un accident du travail proprement dit, et non un accident de trajet, celui dont est victime un salarié au cours d'un déplacement professionnel effectué sur l'ordre de son employeur et dans l'intérêt de l'entreprise, même si le sinistre survient alors que, le travail commandé étant achevé, l'envoyé en mission revient à son point de départ ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que X... et Y..., membres du personnel d'encadrement de la Compagnie générale de constructions téléphoniques (CGCT), se sont rendus en province sur l'ordre de leur employeur pour y accomplir, en compagnie d'un autre préposé et d'un client de la même entreprise, un travail déterminé ; qu'au retour à Paris, à une heure tardive, les quatre hommes ont pris un repas au restaurant, puis ont consommé dans un établissement voisin ; qu'ensuite, alors que X... raccompagnait Y... à son domicile, le premier a perdu le contrôle de son véhicule, causant au second des blessures ;
Attendu que Y..., constitué partie civile sur les poursuites engagées contre X... pour blessures involontaires, a demandé réparation de ses dommages en soutenant que l'accident dont il avait été victime constituait, non un accident du travail proprement dit, mais un accident de trajet ;
Attendu que pour accueillir cette demande la juridiction du second degré, après avoir cependant relevé que le repas et les consommations prises à sa suite " entraient dans la mission des préposés de la société CGCT ", énonce que " les éléments de fait ci-dessus rapportés ne permettent pas de retenir que la victime se trouvait toujours dans l'exercice de son travail au cours du parcours en voiture qui a suivi, puisque ce transport avait été organisé pour lui permettre de regagner son domicile " ;
Mais attendu qu'en se déterminant de la sorte la cour d'appel a méconnu le principe ci-dessus rappelé ; d'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt de la cour d'appel de Paris en date du 15 décembre 1987, et pour qu'il soit statué à nouveau conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Amiens.