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22/11/1988 | FRANCE | N°86-15858

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 22 novembre 1988, 86-15858


Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :

Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que la société Union commerciale immobilière (U.C.I), administrateur de biens, agissant pour le compte de Mme Leverdier, propriétaire, a donné à bail en 1978 aux époux Mares-Starck un appartement sur le fondement de l'article 3 quinquies de la loi du 1er septembre 1948 modifiée ; qu'un constat des lieux, annexé au bail, a été dressé par M. X..., huissier de justice ; qu'en 1983, les locataires ont assigné devant le tribunal d'instance Mme Leverdier pour faire juger que le

s conditions requises par le décret du 30 décembre 1964 pour la con...

Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :

Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que la société Union commerciale immobilière (U.C.I), administrateur de biens, agissant pour le compte de Mme Leverdier, propriétaire, a donné à bail en 1978 aux époux Mares-Starck un appartement sur le fondement de l'article 3 quinquies de la loi du 1er septembre 1948 modifiée ; qu'un constat des lieux, annexé au bail, a été dressé par M. X..., huissier de justice ; qu'en 1983, les locataires ont assigné devant le tribunal d'instance Mme Leverdier pour faire juger que les conditions requises par le décret du 30 décembre 1964 pour la conclusion d'un bail au titre de l'article 3 quinquies n'étaient pas réunies, le constat d'huissier ne portant aucune mention relative aux peintures de la cage d'escalier, à l'état des menuiseries extérieures et à celui des descentes d'eau pluviale ; qu'un premier jugement a dit que la location était soumise aux dispositions générales de la loi du 1er septembre 1948, que Mme Leforestier, venant aux droits de Mme Leverdier, décédée, devait restituer le trop perçu sur les loyers, et a ordonné une expertise ; que Mme Leforestier a assigné en garantie sa mandataire, la société U.C.I, qui, pour sa part, a appelé en garantie M. X... ; que, par un second jugement, le tribunal d'instance a dit que la société U.C.I avait commis une faute dans l'exécution de son mandat et l'a condamnée à verser une provision à Mme Leforestier, mais l'a déboutée de son action en garantie contre l'huissier de justice ;

Attendu que M. X... reproche à l'arrêt attaqué (Paris, 26 mai 1986), infirmatif de ce chef, de l'avoir condamné à payer à la société U.C.I la somme de 10 000 francs à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen, d'une part, que, selon les articles 1er et 2 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers de justice, leurs constats sont limités à des constatations purement matérielles exclusives de tout avis sur leurs conséquences de fait et de droit et qu'ils ne sont responsables de la rédaction de leurs actes que pour les indications matérielles qu'ils ont par eux-mêmes vérifiées ; qu'il appartenait donc à la société U.C.I, professionnelle de l'immobilier et syndic de co-propriété de l'immeuble, de définir avec précision la mission de l'huissier, d'attirer son attention sur les points à relever dans le constat et de demander éventuellement un constat complémentaire, de sorte qu'en déduisant la responsabilité de l'huissier d'une insuffisance des constatations effectuées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ; alors, d'autre part, qu'il n'a pas été répondu au moyen des conclusions tiré de ce que M. X... n'avait aucun devoir de conseil envers la société U.C.I ; alors, de troisième part, que l'arrêt attaqué ne s'est pas expliqué sur les motifs des premiers juges, repris dans les conclusions de M. X..., d'après lesquels les omissions du constat portent précisément sur des éléments non conformes et ne sauraient donc constituer la cause de l'irrégularité du bail, de sorte qu'en statuant comme elle a fait la cour d'appel n'a pas caractérisé le lien de causalité entre la prétendue faute de l'huissier et le préjudice allégué par la société U.C.I, et alors, enfin, qu'il n'a pas été répondu aux conclusions faisant valoir que le constat n'était pas lacunaire, qu'il permettait à la bailleresse

ou à sa mandataire, de le compléter par tous éléments de preuve possibles, mais que le silence du constat sur l'état de la cage d'escalier n'est pas la cause d'irrégularité du bail, puisque cet état était défectueux à l'époque ;

Mais attendu que, selon l'article 2, 3° alinéa, de l'ordonnance du 2 novembre 1945 et contrairement à ce qu'allègue le moyen en sa première branche, les huissiers de justice sont, en principe, responsables de la rédaction de leurs actes ; qu'en l'espèce, la cour d'appel relève, par motifs adoptés du premier juge, que M. X... est intervenu à la demande de la société U.C.I qui l'a chargé de dresser constat des lieux qu'elle envisageait de donner à bail en vertu de l'article 3 quinquies et, par motifs propres, que ce constat était incomplet, ne comportant aucune indication sur l'état du gros oeuvre de l'immeuble, des descentes d'eaux pluviales, des menuiseries extérieures et des peintures de la cage d'escalier ; qu'elle a justement retenu le caractère fautif des omissions relevées dès lors que l'étendue de la mission de l'huissier de justice était précisément définie par le décret n° 64-1355 du 30 décembre 1964 ; qu'ayant souverainement estimé que ces omissions avaient " surpris l'attention de la société UCI ", mise ainsi dans l'impossibilité de remédier à ces insuffisances avant la location, la juridiction du second degré a pu en déduire l'existence d'un lien de causalité entre le manquement professionnel retenu et le dommage allégué par la cliente ;

Que, non tenue de répondre aux conclusions visées par la seconde branche dès lors qu'elles étaient demeurées inopérantes, la cour d'appel a ainsi légalement justifié sa décision ; d'où il suit qu'en aucune de ses quatre branches le moyen n'est fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 86-15858
Date de la décision : 22/11/1988
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

OFFICIERS PUBLICS OU MINISTERIELS - Huissier de justice - Responsabilité civile - Faute - Rédaction des actes - Constat - Etat des lieux dressé pour la conclusion d'un bail conclu en application de l'article 3 quinquies de la loi du 1er septembre 1948 - Mentions insuffisantes pour permettre de vérifier la régularité du bail

RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Lien de causalité - Huissier de justice - Constat incomplet - Etat des lieux dressé pour la conclusion d'un bail - Impossibilité pour le bailleur de remédier à l'insuffisance des conditions d'entretien du local - Restitution d'un trop perçu sur les loyers

BAIL A LOYER (loi du 1er septembre 1948) - Domaine d'application - Exclusion - Article 3 quinquies - Conditions d'application - Constat des lieux - Insuffisance - Portée

Selon l'article 2, 3e alinéa, de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative à leur statut, les huissiers de justice sont, en principe, responsables de la rédaction de leurs actes . Spécialement, l'huissier de justice requis par le propriétaire d'un local d'habitation désireux de conclure un bail soumis à l'article 3 quinquies de la loi du 1er septembre 1948, et dont la mission est, à ce titre, définie par le décret du 30 décembre 1964, commet une faute lorsqu'il omet dans son constat de mentionner certaines caractéristiques du local ou de l'immeuble - tels, que l'état des menuiseries extérieures et celui de la peinture de la cage d'escalier - qui permettent de vérifier la conformité du bail aux conditions prévues par la loi précitée . Et les juges du fond qui relèvent que le bailleur a été ainsi mis dans l'impossibilité de remédier à l'insuffisance des conditions d'entretien du local ont pu retenir l'existence d'un lien de causalité entre ce manquement professionnel et le dommage subi par le client qui, assigné par le preneur pour faire juger que les conditions requises pour la conclusion d'un bail au titre de l'article 3 quinquies n'étaient pas réunies, a dû restituer un trop perçu sur les loyers .


Références :

Décret 64-1355 du 30 décembre 1964
Loi 48-1360 du 01 septembre 1948 art. 3-quinquies
Ordonnance du 02 novembre 1945 art. 2 al. 3

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 26 mai 1986


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 22 nov. 1988, pourvoi n°86-15858, Bull. civ. 1988 I N° 327 p. 222
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1988 I N° 327 p. 222

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Fabre, président maintenu en qualité de conseiller faisant fonction . -
Avocat général : Avocat général :Mme Flipo
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Viennois
Avocat(s) : Avocats :M. Célice, Mme Baraduc-Bénabent, la SCP Boré et Xavier .

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1988:86.15858
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