CASSATION par voie de retranchement sans renvoi, partie avec renvoi sur le pourvoi formé par :
- l'administration des Impôts, partie poursuivante,
contre l'arrêt n° 361 / 87 de la cour d'appel de Chambéry, chambre correctionnelle, en date du 2 avril 1987, qui, du chef d'infractions à la législation sur les spectacles, jeux et divertissements, a condamné la société Romax et Robert X... à des pénalités fiscales et a dit n'y avoir lieu à confiscation des appareils saisis.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation proposé et pris de la violation des articles 564 septies et 564 octies (anciens), 1559, 1560, 1563, 1565, 1791 du Code général des impôts, 219 W et 219 X (anciens) de l'annexe III, 126 A à 126 E de l'annexe IV audit Code, R. 226-2 du Livre des procédures fiscales, 591 et 593 du Code de procédure pénale, refus d'application des règles concernant la confiscation en matière de contributions indirectes, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué n'a pas prononcé la peine de la confiscation des appareils automatiques incriminés pour les infractions dont les prévenus ont été reconnus coupables ;
" aux motifs que la saisie, préalable et régulière, est la condition de la confiscation ; qu'en l'espèce, ne s'étant pas rendus dans les lieux où se trouvaient les appareils non déclarés, les verbalisants n'ont effectué aucune constatation personnelle et directe et n'ont pu décrire les objets qu'ils prétendaient appréhender, comme leur en faisait obligation l'article R. 226-2 du Livre des procédures fiscales ; qu'en conséquence, le procès-verbal de saisie est dépourvu de valeur sur ce point ;
" alors que l'article 1791 du Code général des impôts ne fait pas obstacle à ce que soit prononcée la confiscation (ou, pour en tenir lieu, le paiement de la valeur) des objets de fraude saisis fictivement lorsque, par le fait du contrevenant, la saisie réelle est devenue impossible ; qu'en outre, il n'est pas nécessaire que les procès-verbaux contiennent la constatation directe et immédiate des faits constitutifs de l'infraction ; qu'aussi bien l'article R. 226-2 du Livre des procédures fiscales se borne-t-il à prévoir la description, dans le procès-verbal, des objets saisis, sans exiger que les verbalisants aient, à cet égard, personnellement procédé à des constatations matérielles ; qu'au surplus, il n'était pas davantage nécessaire qu'un gardien des objets fût désigné, la désignation d'un gardien n'étant qu'une mesure prévue dans le seul intérêt de l'Administration, et qu'il ne peut lui être reproché de ne pas avoir mis en oeuvre " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu qu'en matière d'infractions aux lois sur les contributions indirectes toute contravention légalement établie entraîne la confiscation des objets, produits et marchandises saisis ;
Attendu qu'il résulte du procès-verbal, base des poursuites, que X... ayant reconnu auprès des agents verbalisateurs qu'il avait omis en janvier 1984 d'effectuer la déclaration préalable de mise en service de 19 jeux et appareils automatiques, propriété de la société Romax dont il est le gérant, saisie a été déclarée de dix flippers et billards électriques et de neuf jeux vidéo en contravention, décrits et évalués d'après les renseignements fournis par le contrevenant ;
Attendu que pour dire qu'il n'y avait pas lieu à confiscation desdits appareils, l'arrêt attaqué énonce que faute de constatations personnelles et directes des agents verbalisateurs, nécessaires à la description des appareils et à la désignation d'un gardien, le procès-verbal de saisie était dépourvu de valeur au regard des dispositions de l'article R. 226-2 du Livre des procédures fiscales ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que, d'une part, la saisie fictive, justifiée en l'espèce par l'impossibilité où s'étaient trouvés les agents verbalisateurs d'accéder aux locaux où étaient déposés les objets saisis, a la même valeur que la saisie réelle et produit les mêmes effets et que d'autre part en l'absence de contestation élevée par le contrevenant quant à l'identification et à la valeur des appareils, celui-ci ne peut se faire grief de l'inobservation des prescriptions réglementaires, la cour d'appel a méconnu le principe ci-dessus rappelé ;
Que la cassation est encourue de ce chef ;
Et sur le moyen relevé d'office et pris de la violation de l'article 35-1 de la loi n° 86-1317 du 30 décembre 1986 ;
Vu ledit article ;
Attendu qu'en l'absence de dispositions contraires expresses, une loi nouvelle qui abroge une incrimination qui comporte des dispositions pénales ou fiscales plus douces, s'applique aux faits commis avant son entrée en vigueur et non définitivement jugés ;
Attendu que sur citation directe à la requête de l'administration des Impôts, Robert X... et la société Romax dont il était le gérant, ont été condamnés solidairement, notamment pour défaut de déclaration de mise en service de dix-neuf appareils automatiques, à deux fois dix-neuf amendes de 500 francs et à une pénalité proportionnelle de 23 800 francs ; que, d'une part, ces amendes ainsi doublées ont été prononcées une fois par application des dispositions des articles 1559, 1560 et 1565 du Code général des impôts relatifs à l'impôt sur les spectacles, jeux et divertissements et une fois en vertu des articles 564 septies et 564 octies du même Code et 219 W et 219 X de son annexe III, instituant une taxe spéciale sur les appareils automatiques ; que, d'autre part, la pénalité proportionnelle de 23 800 francs a été fixée à une fois le montant des droits fraudés, soit, en fonction des textes susvisés, respectivement à concurrence de 20 000 francs pour la taxe spéciale et de 3 800 francs pour l'impôt sur les spectacles ;
Mais attendu que les articles 564 septies et 564 octies précités ont été abrogés par l'article 35-1 de la loi du 30 décembre 1986 et que les articles 219 W et 219 X de l'annexe III, fixant les modalités d'application dudit article 564 octies sont devenus sans objet au regard de la taxe spéciale ; qu'il s'ensuit que les condamnations prononcées du chef de défaut de mise en service des dix-neuf appareils, afférentes à cette taxe, sont dépourvues de support légal ;
Que, dès lors, l'arrêt attaqué encourt également la cassation de ce chef ;
Attendu toutefois que la loi susvisée a maintenu les dispositions des articles 1559, 1560 et 1565 précités du Code général des impôts, qui soumettent les appareils automatiques à l'impôt sur les spectacles ; que demeure ainsi réprimé sous les sanctions des articles 1791, 1804 A et 1804 B dudit Code, outre le défaut de paiement de cet impôt, le défaut de déclaration de mise en service des appareils, prescrite, comme pour la taxe spéciale, par les articles 219 W et 219 X de l'annexe III ; qu'en effet, en matière de contributions indirectes, lorsqu'une déclaration unique est prévue pour deux impositions, la suppression de l'une est sans effet sur le défaut de déclaration qui reste punissable au regard de l'autre, dès lors que l'obligation de souscrire une déclaration est maintenue pour cette dernière ; qu'il s'ensuit que les amendes et la pénalité fiscales infligées au titre de l'impôt susvisé, sont justifiées et que la cassation encourue sur le moyen relevé d'office doit être limitée aux dispositions de l'arrêt attaqué prononçant des amendes et pénalité fiscales afférentes à la taxe spéciale sur les appareils automatiques ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé n° 361 / 87 de la cour d'appel de Chambéry, en date du 2 avril 1987, mais par voie de retranchement et sans renvoi en ce qui concerne ses dispositions portant condamnation solidaire des prévenus du chef de défaut de déclaration de mise en service de dix-neuf appareils automatiques, au regard de la taxe spéciale, à une fois dix-neuf amendes de 500 francs et à une pénalité proportionnelle fixée à une fois le montant de ladite taxe fraudée soit 20 000 francs, et pour qu'il soit, pour le surplus, à nouveau jugé conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Grenoble.