REJET du pourvoi formé par :
- X... Claude,
contre un arrêt de la cour d'appel de Douai, 4e chambre, en date du 19 mars 1987, qui, pour infraction à l'arrêté du 1er juillet 1985 et à l'article 374 du Code rural, l'a condamné à 1 000 francs d'amende.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 38 à 47 et 235 du traité de Rome du 25 mars 1957, 4, 5, 6, 7, 9 et 18 de la Directive n° 79 / 409 CEE du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages, de l'article 7. 1 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ensemble l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, des articles 34 et 55 de la Constitution du 4 octobre 1958, des articles 3, 4, 5 et 32 de la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature, des décrets n° 77-1295 et 77-1296 du 25 décembre 1977 pris pour l'application des articles 3 et 4 et de l'article 5 de la loi de 1976, de l'arrêté ministériel du 17 avril 1981 modifié portant liste des oiseaux protégés sur l'ensemble du territoire et de l'arrêté ministériel du 20 décembre 1983 sur la commercialisation de certaines espèces d'animaux, des articles 372, 373 et 374, alinéa 3, du Code rural, de l'arrêté du 28 février 1962 modifié par l'arrêté du 24 janvier 1964 et l'arrêté du 1er juillet 1985 relatif à la mise en vente, vente, achat, transport et colportage des animaux de mêmes espèces que les différents gibiers, nés et élevés en captivité ; 388, 427, 429, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a condamné X... à une amende de 1 000 francs assortie d'une mesure de contrainte par corps pour avoir contrevenu à la règlementation en vendant des oiseaux interdits à la vente par application de la loi du 10 juillet 1976 et de ses textes d'application ensemble l'article 1er de l'arrêté du 1er juillet 1985 pris pour l'application de l'article 374, alinéa 3, du Code rural et d'avoir en conséquence alloué divers dommages-intérêts à la partie civile qui a été déclarée recevable ;
" aux motifs adoptés des premiers juges suivant lesquels X... a vendu quatre canards pilets d'Europe, six canards siffleurs d'Europe et huit sarcelles d'hiver ; qu'aux termes de la loi du 10 juillet 1976 et du décret du 17 avril 1981 (sic) fixant la liste des espèces dont la vente est interdite, la commercialisation des oiseaux susvisés est interdite ;
" qu'un décret du 20 décembre 1983 (sic) a étendu l'interdiction de vente des espèces d'oiseaux non domestiques à toutes celles considérées comme gibiers dont la chasse est autorisée, à l'exception seulement du canard colvert, de l'étourneau, du faisan, de la perdrix grise, de la perdrix rouge et du pigeon ramier ; que Claude X... soutient que l'ensemble de cette règlementation ne concerne que les oiseaux non domestiques alors que les oiseaux dont la vente lui est reprochée doivent être considérés comme des oiseaux domestiques par application de l'article 1er de l'arrêté ministériel du 28 février 1962 réglementant l'élevage des oiseaux en ce que, d'une part, ils sont des produits d'élevage et ne comportent pas de géniteurs prélevés dans le milieu naturel français dont les pouvoirs publics ont entendu assurer la préservation, et, d'autre part, ils sont nés et ont été élevés en captivité ; qu'en effet la loi du 10 juillet 1976 et l'arrêté ministériel du 20 décembre 1983 tendent exclusivement à la protection du patrimoine français et ne concernent pas les géniteurs prélevés dans le milieu naturel français ; qu'en l'espèce l'élevage du prévenu n'est pas alimenté par de tels prélèvements et que les oiseaux litigieux ont fait l'objet d'autorisation d'importation ; mais attendu que le décret du 1er juillet 1985 (sic) modifiant le décret du 28 février 1962 (sic) réglementant l'élevage des oiseaux domestiques est venu limiter cet élevage initialement libre aux seules espèces canard colvert, étourneau, sansonnet, faisan, perdrix grise, perdrix rouge et pigeons ramiers ; qu'il résulte de la combinaison de ces deux textes que tous les autres animaux de même espèce que les différents gibiers même nés et élevés en captivité ne sont plus considérés par la loi comme des animaux domestiques et voient leur élevage interdit, les dispositions du décret du 28 février 1962 (sic) réglementant l'élevage, demeurant uniquement pour les sept espèces précitées ; que l'infraction est constituée et qu'elle a causé un préjudice à la Fédération des chasseurs dès lors que les oiseaux litigieux sont de la même espèce que les différents gibiers (jugement p. 3 et 4 analyse ; adde : arrêt p. 3) ;
" alors que, d'une part, les canards pilets, les canards siffleurs et les sarcelles d'hiver ne figurent pas dans la liste des espèces protégées résultant de l'arrêté du 17 avril 1981 pris pour l'application des articles 3 et 4 de la loi du 10 juillet 1976 ; que l'arrêté interministériel du 20 décembre 1983 sur la commercialisation de certaines espèces d'animaux pris pour l'application de l'article 5 de la loi de 1976 autorise la vente de tous les oiseaux de même espèce que les différents gibiers dès lors qu'ils sont nés et élevés en captivité, ceci par référence expresse aux dispositions de l'arrêté du 28 février 1962 pris pour l'application de l'article 373 du Code rural et dans sa rédaction alors applicable ; que l'arrêté ministériel du 1er janvier 1985- qui sert de base aux poursuites pénales intentées contre X...-pris sous le visa de l'article 373 du Code rural, n'a pu modifier la composition de la liste limitative résultant de l'arrêté interministériel du 20 décembre 1983 dès lors qu'il n'a pas été pris en application de l'article 5 de la loi de 1976 et de l'article 1er du décret n° 77-1296 du 25 novembre 1977 ; qu'il suit de là que les poursuites dirigées à l'encontre de X... sur le fondement d'un arrêté étranger au champ d'application de la loi de 1976 manquent de base légale ;
" alors que, d'autre part, la liste limitative des espèces dont la commercialisation est autorisée sur le fondement de l'article 5 de la loi du 10 juillet 1976 est établie, suivant l'article 1er du décret n° 77-1296 du 25 novembre 1977, après avis du Conseil national de la Protection de la nature par arrêtés conjoints du ministre chargé de la protection de la nature et soit du ministre de l'Agriculture, soit, lorsqu'il s'agit d'espèces marines, du ministre chargé des Pêches maritimes ; que l'arrêté du 1er juillet 1985 pris sur le seul avis du Conseil national de la chasse et par subdélégation irrégulière du seul ministre chargé de l'Environnement pour l'application de l'article 373 du Code rural, n'a pu légalement modifier la liste limitative résultant de l'arrêt interministériel du 20 décembre 1983 dans sa rédaction alors en vigueur pour l'application de l'article 5 de la loi de 1976 ; qu'il suit de là que les poursuites dirigées à l'encontre de X... n'ont aucune base légale en tant qu'elles sont fondées sur l'arrêté du 1er juillet 1985 manifestement entaché d'un vice d'incompétence au regard de la loi de 1976 ;
" alors que, de troisième part, l'arrêté ministériel du 1er juillet 1985 pris pour l'application de l'article 373 du Code rural, ne saurait avoir pour effet de sanctionner pénalement la vente d'oiseaux régulièrement importés d'un pays membre de la Communauté conformément à l'article 6. 3 de la directive n° 79 / 409 CEE du 2 avril 1979 et dont la commercialisation en France-s'agissant d'oiseaux d'ornement nés et élevés en captivité-est autorisée par les textes réglementaires légalement pris pour l'application de l'article 5 de la loi du 10 juillet 1976 ;
" alors que, de quatrième part, la commercialisation régulière en France d'espèces importées d'un pays membre du marché commun par application de l'article 6. 3 de la directive n° 79 / 409 CEE du 2 avril 1979 et de l'article 5 de la loi du 10 juillet 1976 ne saurait en tant que telle être incriminée par la règlementation propre au droit de la chasse et pour des motifs étrangers à la police de la chasse ; qu'il est, en effet, contradictoire d'incriminer une activité qui n'est pas interdite ; que la contradiction susceptible d'exister sur ce point au sein de l'ordre juridique interne est incompatible avec la nécessaire prévisibilité de la loi pénale exigée par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et l'article 7. 1 de la Convention européenne de sauvegarde ;
" alors que, de cinquième part, et en tout état de cause le champ d'application de l'article 374 alinéa 3, du Code rural est limité aux actes de chasse portant sur des gibiers prélevés sur le territoire national ; que les juges du fond ont d'une part, observé que les oiseaux incriminés avaient fait l'objet d'une importation régulière et n'ont pas précisé en quoi la commercialisation reprochée à X... pût être assimilée à un acte de chasse ; qu'ainsi la déclaration de culpabilité manque de base légale " ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que X... a, en novembre 1985, vendu quatre canards pilets d'Europe, six canards siffleurs d'Europe, et huit sarcelles d'hiver, provenant de son élevage ; que pour ces faits la juridiction du second degré l'a déclaré coupable d'infractions à l'article 374-3° du Code rural et à l'arrêté ministériel du 1er juillet 1985, punies de la peine prévue à l'alinéa 1er dudit article 374 ;
Attendu, d'une part, que l'arrêté précité et l'arrêté du 28 février 1962 qu'il modifie, relatifs notamment à la vente et au transport d'oiseaux de mêmes espèces que les différents gibiers, nés et élevés en captivité, procèdent de l'article 373 alinéa 4-1°, du Code rural qui habilite le ministre chargé de la Chasse à prévenir, par voie d'arrêtés, la destruction des oiseaux et de toutes espèces de gibier et à favoriser leur repeuplement ; qu'il découle de l'abrogation, par l'arrêté du 1er juillet 1985, de l'article 3 de l'arrêté du 28 février 1962, que les oiseaux, nés et élevés en captivité, de mêmes espèces que le gibier, ne sont plus considérés comme des animaux domestiques et que leur commercialisation est désormais interdite ; qu'échappent à cette interdiction les seules espèces dont ledit arrêté de 1985 donne une liste au demeurant identique à celle figurant à l'arrêté interministériel du 20 décembre 1983 pris en application, à la fois, des articles 372 et 373 du Code précité et de la loi du 10 juillet 1976 sur la protection de la nature ;
Attendu, d'autre part, que cette réglementation, à défaut de dispositions contraires, s'applique en tous temps et aux espèces aussi bien de souche nationale qu'étrangère ; qu'elle n'est nullement en contradiction avec la réglementation européenne relative à la protection de la nature, particulièrement avec la directive n° 79 / 409 CEE du 2 avril 1979 ;
Attendu en conséquence que, dès lors qu'elle a constaté que les spécimens incriminés, loin d'être des oiseaux d'ornement, appartenaient à des espèces classées comme gibiers par l'arrêté ministériel du 12 juin 1979, en vigueur au moment des faits, dont les dispositions ont été reprises par l'arrêté du 26 juin 1987, et qu'ils n'entraient pas dans la liste susvisée, la cour d'appel a donné une base légale à sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.