Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Attendu qu'à la suite du divorce des époux Z..., le droit d'exploitation d'un domaine agricole dépendant de la communauté a été attribué préférentiellement au mari ; que, par un arrêt du 23 mai 1979, devenu irrévocable sur ce point, la cour d'appel de Paris a évalué ce droit compte tenu, notamment, " des indemnités de gestion et de travail dues à M. Y... " ; que, par un jugement du 28 février 1984, le tribunal de grande instance, après avoir actualisé en 1982, en fonction de l'indice des prix du blé fermier, la valeur de ce droit d'exploitation, a fixé à 150 000 francs le montant de l'indemnité due au mari pour la mise en valeur de ce fonds du 21 mai 1981 à la date du jugement ; que l'arrêt attaqué a confirmé cette décision ;
Attendu que Mme A... fait grief à la cour d'appel d'avoir ainsi statué alors que la valeur du droit d'exploitation du fonds rural avait été fixée en 1979, déduction faite de la rémunération de l'activité de son mari, de sorte que la valeur actualisée retenue par l'arrêt attaqué était elle aussi, calculée déduction faite de l'indemnité de gestion due ; que, dès lors, en allouant à nouveau au mari une indemnité de gestion, l'arrêt l'aurait comptée deux fois, violant ainsi l'article 815-12 du Code civil ;
Mais attendu que l'évaluation faite en vue du partage de la communauté de la valeur du droit d'exploitation de la ferme attribuée préférentiellement à M. Y... est sans incidence sur le montant de la rémunération à laquelle il a droit en raison de sa gestion de ce bien pendant l'indivision post-communautaire ; que le moyen est sans fondement ;
LE REJETTE ;
Mais sur la seconde branche du premier moyen :
Vu l'article 815-12 du Code civil ;
Attendu que l'indemnité à laquelle a droit l'indivisaire qui gère seul un bien indivis cesse d'être due à compter de la date de la jouissance divise ;
Attendu que l'arrêt attaqué a fixé à 150 000 francs le montant de l'indemnité due à M. Y... pour la période allant du 21 mai 1981 au jour du jugement du tribunal de grande instance, rendu le 28 février 1984, alors que ce tribunal avait déterminé la valeur du droit d'exploitation du fonds agricole attribué à M. Y... en 1982, date à laquelle a été fixée la jouissance divise ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Sur le deuxième moyen :
Vu l'article 1402, alinéa 1er, du Code civil, ensemble l'article 1134 du même Code ;
Attendu qu'il résulte du premier de ces textes que la communauté qui prétend avoir droit à récompense n'a pas à établir le caractère commun des deniers qui ont servi à acquitter une dette personnelle à l'un des époux, lesdits deniers étant, en application de ce texte, réputés communs, sauf preuve contraire ;
Attendu que le tribunal de grande instance a estimé, inversant ainsi la charge de la preuve, que la récompense réclamée par Mme A..., pour le compte de la communauté, en raison du règlement des frais de la donation-partage faite par Mme Y... mère à son fils, n'était pas justifiée, faute de preuve d'acquittement de ces frais par la communauté, le mari disposant de fonds propres consécutifs à l'héritage de son père sur lequel ils ont pu être prélevés ;
Attendu qu'en approuvant le raisonnement ainsi suivi par le tribunal tout en énonçant par une dénaturation des termes du jugement, que la juridiction du premier degré avait admis que la preuve était faite de ce que les frais de donation-partage avaient été réglés par M. Y... de ses deniers personnels, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le troisième moyen :
Vu l'article 1433 du Code civil ;
Attendu que, pour estimer qu'il était dû récompense au mari pour le règlement des frais de séjour en maison de repos de Mme X..., l'arrêt attaqué énonce que ce règlement a été fait en exécution du versement de la rente viagère stipulée lors de la vente consentie par cette dame aux époux Z... ;
Attendu qu'en statuant ainsi, sans rechercher si les deniers ayant servi au paiement étaient propres à M. Y..., ce qu'il lui appartenait de prouver, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en ce qu'il a fixé à 150 000 francs le montant de l'indemnité d'exploitation due à M. Y... et en ce qu'il a débouté Mme A... de sa demande de récompense et accordé une récompense à M. Y..., l'arrêt rendu le 26 février 1986, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles