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18/04/1988 | FRANCE | N°87-80387

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 18 avril 1988, 87-80387


CASSATION PARTIELLE par voie de retranchement sans renvoi sur le pourvoi formé par :
- X... Marvin,
contre un arrêt de la chambre correctionnelle de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 26 novembre 1986 qui, pour infraction à la législation et à la réglementation des relations financières avec l'étranger, l'a condamné à la peine de 3 mois d'emprisonnement avec sursis ainsi qu'à des pénalités douanières.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 60, 64, 65 du Code

des douanes, 76, 591, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et man...

CASSATION PARTIELLE par voie de retranchement sans renvoi sur le pourvoi formé par :
- X... Marvin,
contre un arrêt de la chambre correctionnelle de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 26 novembre 1986 qui, pour infraction à la législation et à la réglementation des relations financières avec l'étranger, l'a condamné à la peine de 3 mois d'emprisonnement avec sursis ainsi qu'à des pénalités douanières.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 60, 64, 65 du Code des douanes, 76, 591, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré valable le procès-verbal en date du 9 mai 1983 établi par l'administration des Douanes à l'encontre de Marvin X... ;
" aux motifs que le Tribunal, qui s'est fondé sur un arrêt rendu le 15 octobre 1984 par la chambre criminelle et dont il déduit en termes généraux que la fouille d'un agenda doit être assimilée à une perquisition et demeure de ce fait soumise au droit commun de la procédure pénale, a fait une inexacte application des dispositions du Code des douanes, le principe dégagé par la Cour de Cassation devant être limité à l'espèce soumise alors à l'examen des juges ; que dans la présente procédure l'intervention des douaniers a eu lieu auprès d'un particulier se présentant en un lieu public au contrôle douanier mis au point de passage de la frontière ; que cette intervention apparaît ainsi régie par l'article 60 du Code des douanes qui permet la visite par les agents de cette administration tant des marchandises que des moyens de transport ou des personnes ;
" alors que la fouille d'un agenda contenu dans le sac de voyage d'un individu se présentant à la frontière constitue une perquisition en vue de se procurer des documents échappant aux dispositions des articles 60, 64 et 65 du Code des douanes et restant soumise en l'absence de texte spécial applicable au droit commun de la procédure pénale, la Cour ne pouvait sans violer les textes susvisés déclarer valable le procès-verbal de constat dressé par les agents des Douanes " ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et de l'examen des pièces de procédure que lors de son passage au poste des Douanes françaises implanté à l'aéroport de Genève-Cointrin, Marvin X... a fait l'objet d'un contrôle par les agents de cette administration, auxquels il a répondu n'avoir rien à déclarer ; que la visite de son sac de voyage a permis la découverte d'un agenda sur lequel figurait, entre autres, la mention " SBS CS 739654 58 " ; qu'interpellé sur ce point, l'intéressé a indiqué que l'annotation correspondait à un numéro de compte ouvert dans une banque à Genève ; qu'un procès-verbal de constat a été dressé le 9 mai 1983 sur le fondement duquel Marvin X... a été cité, à la requête de l'administration des Douanes, directement devant la juridiction correctionnelle du chef d'infraction à la législation et à la réglementation des relations financières avec l'étranger ;
Attendu que pour annuler le jugement ayant déclaré nul ledit procès-verbal des Douanes et ayant relaxé le prévenu des fins de la poursuite, au motif que l'opération constatée s'analysait en une perquisition irrégulièrement effectuée, la cour d'appel relève que l'intervention des douaniers, qui en l'espèce s'est opérée auprès d'un particulier se présentant, en un lieu public, au contrôle douanier mis en place au passage de la frontière, est régie par l'article 60 du Code des douanes qui autorise la visite, par les agents de cette administration, des marchandises, des moyens de transport et des personnes ; que dès lors, selon la cour d'appel, en visitant les bagages de X..., lorsque celui-ci s'est présenté au poste frontière pour pénétrer sur le territoire national, en provoquant les explications de l'intéressé sur une mention manuscrite figurant sur un agenda qui s'y trouvait, en recueillant ses déclarations et en annexant le document au procès-verbal dressé, les agents de l'administration des Douanes, qualifiés pour procéder à ces investigations, se sont conformés à la loi ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a donné une base légale à sa décision ; qu'en effet, les agents douaniers habilités qui opèrent en vertu des dispositions de l'article 60 du Code des douanes, en vue de la recherche de la fraude douanière ou cambiaire, ont la faculté de procéder à la visite des marchandises et des moyens de transport et à celle des personnes ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 3 et 6 du décret du 24 novembre 1968, 101 et 11 de la loi de finances de 1982, 459 du Code des douanes, 591, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré X... coupable du délit de détention d'une somme de 104 000 francs à l'étranger et de défaut de rapatriement ;
" aux motifs que si le prévenu soutient que les fonds litigieux seraient la seule propriété d'un tiers Y... pour le compte duquel il les détenait en Suisse, le seul fait que ce dernier, qui est à l'origine de l'alimentation du compte suisse ait eu procuration sur ce même compte, avait dans les jours qui ont suivi l'établissement du procès-verbal viré cette somme sur un compte lui appartenant, ne suffit pas à établir qu'il en était le seul propriétaire ;
" alors, d'une part, que les articles 3 et 6 du décret du 24 novembre 1968 qui ne prohibent que la constitution d'avoirs à l'étranger ne créant de ce fait aucune présomption de propriété des fonds déposés sur un compte ouvert au nom de l'intéressé, l'administration des Douanes et le ministère public ont la charge de démontrer que les fonds détenus à l'étranger sont bien la propriété de la personne poursuivie ; que la cour d'appel qui, pour retenir X... dans les liens de la prévention, a décidé que celui-ci ne rapportait pas la preuve qu'il n'en était pas propriétaire a violé les textes susvisés et la présomption d'innocence ;
" alors, d'autre part, que la cour d'appel qui a constaté que le compte en Suisse ouvert au nom de X... était alimenté par un tiers non résident, lequel avait procuration sur ce compte et avait viré la somme détenue à un autre compte lui appartenant peu de temps après l'établissement du procès-verbal litigieux ayant par là même établi que le tiers était propriétaire des fonds détenus à l'étranger ou ayant à tout le moins relevé des éléments de nature à faire naître le doute sur la propriété de ceux-ci a, en condamnant X... du chef de détention irrégulière d'avoirs à l'étranger, violé les textes susvisés et la présomption d'innocence ;
" alors, enfin, que la cour d'appel qui constate que les fonds déposés sur le compte ouvert au nom de X... appartenaient à l'origine de l'opération à Y... ne pouvait retenir X... dans les liens de la prévention sans rechercher au préalable s'il avait existé une opération de nature à transférer à X... la propriété ou au moins la possession des fonds litigieux ; qu'en s'abstenant de procéder à cette recherche la Cour a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés " ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et du procès-verbal des Douanes, dressé le 9 mai 1983, base des poursuites que pour déclarer Marvin X... coupable de détention irrégulière d'avoirs à l'étranger et de non-rapatriement de revenus, la cour d'appel, après annulation du jugement entrepris et évocation, constate que le prévenu, résident français, a reconnu que la mention manuscrite chiffrée figurant sur son agenda correspondait à un compte ouvert à son nom en Suisse, sur lequel était déposée courant 1981 une somme de 20 000 francs suisses, prétendument virée par un tiers non résident-français ; que la cour d'appel retient qu'aux termes des articles 3 et 6 du décret du 24 novembre 1968, sont prohibés, sauf autorisation du ministre de l'Economie et des Finances, tous transferts tendant à la constitution d'avoirs à l'étranger, les résidents étant tenus de rapatrier tous les revenus ou produits encaissés à l'étranger ou versés par un non-résident ; qu'ainsi, selon les juges, l'infraction poursuivie est bien constituée ;
Attendu qu'en l'état de ces seuls motifs, la cour d'appel qui a caractérisé en tous ses éléments constitutifs le délit retenu à la charge du demandeur, a, sans encourir les griefs du moyen, donné une base légale à sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Mais sur le moyen relevé d'office et pris de la violation des articles 343-1 et 451 du Code des douanes ;
Vu lesdits articles ;
Attendu qu'il résulte des dispositions combinées des textes susvisés que l'action pour l'application des peines, en répression des infractions à la législation et à la réglementation des relations financières avec l'étranger, est exercée par le ministère public ;
Attendu qu'il appert des pièces de procédure que devant les premiers juges, si l'Administration poursuivante, représentée par son directeur interrégional à Lyon, a bien exercé l'action fiscale par une citation à prévenu délivrée le 9 janvier 1986, en revanche, il n'est établi par aucune desdites pièces que le ministère public ait fait citer, à sa requête, Marvin X... en vue de voir exercer à l'encontre de l'intéressé l'action pour l'application des peines, ni que celui-ci ait expressément accepté d'être jugé sur l'action publique ;
Que dès lors, par l'arrêt attaqué, en déclarant recevable et bien fondé l'appel du ministère public et en condamnant le prévenu notamment à une sanction pénale, la cour d'appel a méconnu, par fausse application, les textes susvisés et a privé sa décision de base légale ;
Que la cassation est encourue de ce chef et doit être limitée aux dispositions pénales de l'arrêt attaqué ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt susvisé du 26 novembre 1986 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, mais en ses seules dispositions pénales et ce par voie de retranchement, toutes autres dispositions dudit arrêt étant expressément maintenues ;
Et attendu qu'il ne reste rien à juger ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 87-80387
Date de la décision : 18/04/1988
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° DOUANES - Agent des Douanes - Pouvoirs - Droit de visite des marchandises - des moyens de transport et des personnes - Article 60 du Code des douanes - Domaine d'application - Examen d'un agenda.

1° DOUANES - Agent des Douanes - Pouvoirs - Droit de visite des marchandises - des moyens de transport et des personnes - Article 60 du Code des douanes - Etendue.

1° Les agents douaniers habilités qui opèrent en vertu des dispositions de l'article 60 du Code des douanes, en vue de la recherche de la fraude tant douanière que cambiaire, ont la faculté de procéder à la visite des marchandises et des moyens de transport et à celle des personnes. Dès lors, est régulière l'intervention des agents douaniers qui, à l'occasion du contrôle d'un particulier se présentant au poste-frontière pour pénétrer sur le territoire national, ont procédé à la visite de ses bagages, à l'examen des mentions manuscrites figurant sur un agenda qui s'y trouvait et, consécutivement aux explications fournies, à la saisie dudit document annexé au procès-verbal de constat dressé.

2° CHANGES - Relations financières avec l'étranger - Infraction à la législation - Constitution illicite d'avoirs à l'étranger - Rapatriement des revenus ou produits versés par un non-résident - Omission - Délit constitué.

2° Aux termes des articles 3 et 6 du décret du 24 novembre 1968, sont prohibés, sauf autorisation du ministre de l'Economie et des Finances, tous transferts tendant à la constitution d'avoirs à l'étranger, les résidents étant tenus de rapatrier tous les revenus ou produits encaissés à l'étranger ou versés par un non-résident. Donne une base légale à sa décision de condamnation fiscale pour infraction aux textes susvisés, la cour d'appel qui relève notamment que le prévenu a reconnu être titulaire d'un compte bancaire ouvert à son nom en Suisse sur lequel étaient déposés des fonds prétendument virés par un tiers, non-résident français.

3° CHANGES - Procédure - Action publique - Mise en mouvement - Ministère public - Citation - Défaut - Portée.

3° CHANGES - Procédure - Action fiscale - Douanes - Action publique - Mise en mouvement - Ministère public - Citation - Défaut - Portée.

3° Il résulte des dispositions combinées des articles 343-1 et 451 du Code des douanes que l'action pour l'application des peines, en répression des infractions à la législation et à la réglementation des relations financières avec l'étranger, est exercée par le ministère public exclusivement. En conséquence, doit être cassé en ses seules dispositions pénales, et ce sans renvoi, rien ne restant alors à juger, l'arrêt d'une cour d'appel qui, après avoir déclaré recevable et bien fondé l'appel du ministère public a condamné le prévenu, reconnu coupable d'infraction cambiaire, à une sanction pénale, alors qu'il n'est établi par aucune pièce de procédure que, concurremment à l'action fiscale régulièrement introduite par l'administration des Douanes, le ministère public ait fait citer à sa requête le prévenu en vue de voir exercer à l'encontre de l'intéressé l'action pour l'application des peines, ni que celui-ci ait expressément accepté d'être jugé sur ce point.


Références :

Code des douanes 343-1, 451
Code des douanes 60
Décret 68-1022 du 24 novembre 1968 art. 3, art. 6

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre correctionnelle), 26 novembre 1986

CONFER : (2°). A comparer : Chambre criminelle, 1984-10-15 , Bulletin criminel 1984, n° 298, p. 793 (rejet) ;

A rapprocher : Chambre criminelle, 1981-01-12 , Bulletin criminel 1981, n° 11, p. 44 (cassation : arrêt n° 1 ;

rejet : arrêt n° 2). (1) CONFER : (4°). A rapprocher : Chambre criminelle, 1975-01-14 , Bulletin criminel 1975, n° 12, p. 37 (cassation). (2)


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 18 avr. 1988, pourvoi n°87-80387, Bull. crim. criminel 1988 N° 162 p. 415
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1988 N° 162 p. 415

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Ledoux
Avocat général : Avocat général :M. Robert
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Bayet
Avocat(s) : Avocats :la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Liard, la SCP Boré et Xavier

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1988:87.80387
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