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05/01/1988 | FRANCE | N°86-14735

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 05 janvier 1988, 86-14735


Sur le premier moyen du pourvoi principal :

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la société Transports Egetra a confié à la société Intrans route international (Instrans route), pour le compte de la société Franco-anglaise de pelleteries, le transport de peaux de marmotte vers l'Italie, que la société Transports Egetra a remis la marchandise à la société Intrans route, à La Courneuve, où elle a été chargée sur un camion de la société Urbaine de location et de transport industriel Sulti Derollez (société Sulti), que, le 10 juin 1981, le chauffeur a décl

aré au commissariat de police de La Courneuve que le camion avait été volé le m...

Sur le premier moyen du pourvoi principal :

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la société Transports Egetra a confié à la société Intrans route international (Instrans route), pour le compte de la société Franco-anglaise de pelleteries, le transport de peaux de marmotte vers l'Italie, que la société Transports Egetra a remis la marchandise à la société Intrans route, à La Courneuve, où elle a été chargée sur un camion de la société Urbaine de location et de transport industriel Sulti Derollez (société Sulti), que, le 10 juin 1981, le chauffeur a déclaré au commissariat de police de La Courneuve que le camion avait été volé le même jour alors qu'il se trouvait sur le parking des établissements Maury, que lorsque le véhicule a été retrouvé, le 19 juin 1981, le lot de pelleteries, qui constituait une part de son chargement, avait disparu, que la société Assurances générales de France (AGF) et le groupement d'intérêt économique La Réunion européenne (GIE), subrogés dans les droits de la réparation du préjudice à la société Intrans route et à la société Sulti, que la société Intrans route a formé un recours en garantie contre cette dernière qui s'est défendue contre les demandes dirigées contre elle en prétendant n'avoir pas agi en qualité de transporteur mais s'être bornée à donner un camion en location à la société Intrans route, que la société Sulti a elle-même sollicité la garantie de son assureur la société Hansa ;

Attendu que la société Sulti fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à réparer le préjudice causé par la perte des marchandises, alors, selon le pourvoi, que le contrat de transport de marchandises est un contrat par lequel le transporteur s'engage à déplacer d'un lieu à un autre, par lui-même ou par le préposé qu'il a sous ses ordres, des marchandises qui lui sont confiées et dont il a la maîtrise et la surveillance ; qu'en l'espèce, pour attribuer à la société Sulti Derollez la qualité de transporteur des peaux volées, la cour d'appel s'est bornée à déduire des considérations inopérantes et générales tirées du numéro d'activité principale de la société Sulti Derollez, des rapports " usuels " entre les parties, ou de la nature du contrat en vertu duquel avaient été transportées d'autres marchandises postérieurement à l'opération litigieuse ; qu'en s'en tenant à ces considérations inopérantes, sans rechercher concrètement si la société Sulti Derollez, dont il était constaté qu'elle n'avait pas délivré de lettre de voiture pour les peaux volées, avait été chargée de déplacer entre deux lieux précis une marchandise identifiée, si elle en avait eu la maîtrise, le contrôle et la surveillance, notamment si le chauffeur du camion était resté son subordonné pour cette opération et avait reçu d'elle ses instructions de route, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1779 du Code civil ;

Mais attendu qu'après avoir constaté que celles des marchandises qui avaient été retrouvées après le vol avaient été acheminées à destination sous une lettre de voiture internationale émise par la société Sulti la cour d'appel a relevé qu'il était manifeste que ces marchandises avaient été chargées au titre d'un contrat de transport et a énoncé que le même véhicule n'avait pu être utilisé par la société Intrans route, en qualité de locataire et par la société Sulti en qualité de transporteur ; qu'elle a pu déduire de ces constatations et énonciations que c'est l'ensemble des marchandises contenues dans le camion qui avait fait l'objet d'un contrat de transport ; que, dès lors, le moyen n'est pas fondé ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident formé par la société Hansa :

Attendu que cette société fait grief à l'arrêt d'avoir décidé qu'elle devait garantir la société Sulti en raison du vol de fourrures chargées sur l'un de ses camions, alors, selon le pourvoi, que, dans ses conclusions devant la cour d'appel la société Hansa avait fait valoir, très subsidiairement, que la preuve du chargement des 883 kilogrammes de peaux de marmotte n'était pas établie et qu'en conséquence il n'y avait pas lieu à garantie de sa part, que la cour d'appel a omis de répondre à ce chef clair et précis des conclusions, entachant ainsi sa décision d'un défaut de motif, en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'en constatant, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve, que les marchandises litigieuses avaient été chargées sur le camion de la société Sulti, la cour d'appel a, par là même, répondu, en les écartant, aux conclusions invoquées ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur l'irrecevabilité du second moyen du pourvoi principal :

Attendu que la société AGF et le GIE prétendent que le second moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche est irrecevable comme nouveau et mélangé de fait et de droit au motif que la société Sulti n'aurait pas soutenu devant les juges du second degré qu'elle et son préposé ignoraient la valeur de la marchandise ;

Mais attendu que la société Sulti a expressément soutenu devant la cour d'appel qu'elle n'avait agi qu'en qualité de loueur de véhicule, que le chauffeur de celui-ci ne pouvait connaître la nature et l'importance des marchandises transportées et que la déclaration de vol n'avait pu être établie que parce qu'un agent de la société Intrans route était présent ; que, dès lors, le moyen n'est pas nouveau ;

Mais, sur le second moyen du pourvoi principal, pris en ses deux branches :

Vu l'article 1150 du Code civil ;

Attendu que pour écarter la limitation de l'indemnisation prévue à l'article 23 de la convention relative au contrat de transport international de marchandises par route (CMR) l'arrêt énonce que le vol a eu lieu au parking des établissements Maury à La Courneuve et que le fait que le camion, fût-il muni d'un système antivol, ait été laissé sans surveillance, alors que la valeur des marchandises atteignait le montant de 625 948 francs, présentait le caractère d'une faute grave équivalente au dol ;

Attendu qu'en se prononçant de la sorte sans relever aucune circonstance constitutive d'une négligence ou d'une extrême gravité confinant au dol et dénotant l'inaptitude du transporteur, maître de son action, à l'accomplissement de la mission contractuelle qu'il avait acceptée, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, l'arrêt rendu, le 21 mars 1986, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Reims


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 86-14735
Date de la décision : 05/01/1988
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

TRANSPORTS TERRESTRES - Marchandises - Responsabilité - Clause limitative - Exclusion - Dol ou faute lourde - Définition

* RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Clause limitative de responsabilité - Déchéance - Dol ou faute lourde - Applications diverses - Nécessité

* RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Clause limitative de responsabilité - Application - Transports terrestres - Marchandises - Dol ou faute lourde - Définition

* TRANSPORTS TERRESTRES - Marchandises - Transport international - Convention de Genève du 19 mai 1956 (CMR) - Responsabilité - Limitation - Exclusion - Faute lourde - Constatations nécessaires

* CONVENTIONS INTERNATIONALES - Convention de Genève du 19 mai 1956 - Transport international de marchandises par route - Responsabilité - Clause limitative - Exclusion - Faute lourde - Constatation nécessaire

Ne donne pas de base légale à sa décision la cour d'appel qui, saisie d'une demande dirigée contre un transporteur et tendant à la réparation du préjudice résultant de la perte de la marchandise transportée à la suite du vol du camion, écarte la limitation d'indemnisation prévue à l'article 23 de la convention relative au contrat de transport international de marchandises par route (CMR) sans relever aucune circonstance constitutive d'une négligence d'une extrême gravité confinant au dol et dénotant l'inaptitude du transporteur, maître de son action, à l'accomplissement de la mission contractuelle qu'il avait acceptée .


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 21 mars 1986

A RAPPROCHER : Chambre commerciale, 1985-02-26 , Bulletin 1985, IV, n° 82, p. 71 (cassation), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 05 jan. 1988, pourvoi n°86-14735, Bull. civ. 1988 IV N° 8 p. 6
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1988 IV N° 8 p. 6

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Baudoin
Avocat général : Avocat général :M. Montanier
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Bodevin
Avocat(s) : Avocats :la SCP Desaché et Gatineau, Mme Baraduc-Bénabent, la SCP Le Prado, M. Cossa .

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1988:86.14735
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