CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- V..., épouse X..., partie civile,
contre un arrêt de la cour d'appel de Riom, chambre correctionnelle, du 17 septembre 1986 qui, dans les poursuites par elle exercées contre Y..., épouse Z..., du chef d'injures publiques, a constaté l'extinction des actions publique et civile par l'effet de la prescription.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 65 de la loi du 29 juillet 1881, 6 et 593 du Code de procédure pénale et de la maxime " contra non valentem agere non currit praescriptio ", défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a constaté l'extinction de l'action publique en application des articles 6 du Code de procédure pénale et 65 de la loi du 29 juillet 1881, un délai de plus de trois mois s'étant écoulé entre les actes d'instruction des 10 mai 1985 et 1er octobre 1985 et, en conséquence, a constaté l'extinction de l'action civile ;
" aux motifs qu'il n'a été procédé à aucun acte de poursuite entre le 10 mai 1985, date de l'interrogatoire au fond, et le 1er octobre 1985, date de l'audition de partie civile ; que V...-X... soutient qu'elle ne disposait d'aucune voie de droit pour obliger le magistrat instructeur à faire un acte de poursuite ou pour le mettre en mesure de le faire ; que cependant, la partie poursuivante ne démontre pas qu'elle aurait été dans l'impossibilité absolue d'intervenir auprès du juge d'instruction afin que fût effectué un acte permettant de faire obstacle à l'accomplissement de la prescription et, moins encore, qu'il n'aurait été donné, par silence ou refus d'agir, aucune suite à sa démarche ; que son intervention s'est bornée en effet à déposer des conclusions en réponse à des observations de l'inculpée sur le caractère public ou non de l'injure ;
" alors que la partie civile ne dispose d'aucun moyen de droit pour obliger le juge d'instruction à accomplir un acte interruptif de la prescription ; qu'il s'ensuivait que la prescription avait nécessairement été suspendue à son profit, en raison de cet obstacle insurmontable " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu d'une part que la prescription de l'action publique est nécessairement suspendue lorsqu'un obstacle de droit met la partie poursuivante dans l'impossibilité d'agir ; qu'il en est ainsi au profit de la personne lésée par un crime ou un délit qui, ayant mis en mouvement ladite action par sa plainte avec constitution de partie civile, ne dispose d'aucun moyen de droit pour obliger le juge d'instruction à accomplir un acte interruptif de la prescription ;
Attendu que pour déclarer éteintes par prescription les actions publique et civile engagées par V...-X... sur sa plainte avec constitution de partie civile du chef du délit d'injures publiques prévu et réprimé par l'article 33 de la loi du 29 juillet 1881, l'arrêt attaqué constate qu'au cours de l'information préalable, il n'a été procédé à aucun acte d'instruction entre le 10 mai 1985, date de l'interrogatoire au fond de l'inculpée, et le 1er octobre 1985, date de l'audition de la plaignante, et énonce que cette dernière ne démontre pas qu'elle ait été dans l'impossibilité absolue d'intervenir auprès du magistrat instructeur afin que fût accompli un acte de poursuite et encore moins qu'il n'ait été donné par silence ou refus d'agir aucune suite à sa démarche ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi alors qu'elle ne pouvait sans se contredire déclarer que les actions publique et civile étaient prescrites après trois mois à compter du dernier acte de poursuite et reprocher à la partie poursuivante de ne pas être intervenue pour obliger le juge d'instruction à interrompre la prescription, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des dispositions visées au moyen ;
Que l'arrêt encourt dès lors la cassation ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt de la cour d'appel de Riom en date du 17 septembre 1986, mais seulement en ce qui concenre l'action civile, et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Toulouse.