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01/10/1987 | FRANCE | N°86-96858

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 01 octobre 1987, 86-96858


REJET du pourvoi formé par :
- X... Thierry,
contre un arrêt de la cour d'appel de Versailles (7e chambre) en date du 9 décembre 1986 qui, dans une procédure suivie contre lui du chef de blessures involontaires, s'est prononcé sur les réparations civiles.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur les demandes de mise hors de cause :
Attendu que Claude Y... et la Mutuelle générale française accidents (MGFA) sollicitent à bon droit leur mise hors de cause dès lors que pareille mesure a été ordonnée par les juges du fond dont le demand

eur ne critique pas la décision de ce chef ;
Sur le premier moyen de cassation p...

REJET du pourvoi formé par :
- X... Thierry,
contre un arrêt de la cour d'appel de Versailles (7e chambre) en date du 9 décembre 1986 qui, dans une procédure suivie contre lui du chef de blessures involontaires, s'est prononcé sur les réparations civiles.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur les demandes de mise hors de cause :
Attendu que Claude Y... et la Mutuelle générale française accidents (MGFA) sollicitent à bon droit leur mise hors de cause dès lors que pareille mesure a été ordonnée par les juges du fond dont le demandeur ne critique pas la décision de ce chef ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation et fausse application des articles 1134 du Code civil, 485 et 593 du Code de procédure pénale, dénaturation de la police d'assurance multigarantie " vie privée " de la MACIF, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a mis hors de cause la compagnie MACIF ;
" aux motifs que " la mise en jeu du contrat d'assurance souscrit par le père de Thierry X... auprès de la MACIF (dont seul est produit à la Cour, le document intitulé : police d'assurance multigarantie " vie privée ", mais aucune pièce contractuelle) est paralysée par la clause (article 4) traditionnelle, d'exclusion de garantie des dommages causés par des véhicules terrestres soumis à l'obligation d'assurance prévue en l'article L. 211 du Code des assurances ; que l'application de l'extension de garantie figurant dans l'article 5 de la même police, déjà réduite par les exclusions de l'article 4, est rendue encore plus douteuse par l'incertitude sur la garantie du fils majeur de M. X... père (dont la Cour ignore s'il était " assuré comme il est dit au contrat ", selon les termes de l'article 5, paragraphe d, ou s'il était, étant majeur, à charge de son père, et " ou de son conjoint ", autre condition figurant dans ledit article), alors qu'il semble acquis que Thierry X... a utilisé la voiture de Mme Y... à la connaissance, et même avec l'autorisation de Claude Y..., dont la Cour n'a pas mission de dire, comme elle l'a déjà indiqué plus haut, s'il était propriétaire ou, surtout, gardien du véhicule " ;
" alors, en premier lieu, qu'en se déterminant par de tels motifs dont le caractère dubitatif et hypothétique est flagrant, la Cour a entaché sa décision d'un grave défaut de motif ;
" alors, en deuxième lieu, qu'en refusant de faire application de la police d'assurance litigieuse qui prévoit une extension de garantie en cas d'utilisation d'un véhicule à moteur dont le sociétaire n'a ni la propriété ni la garde lorsqu'un enfant assuré comme il est dit au contrat conduit à son insu et que l'utilisation n'a pas été faite à la connaissance du propriétaire ou du gardien du véhicule, bien qu'il ne résulte pas des énonciations et constatations de l'arrêt que ces conditions n'étaient pas remplies, la Cour a violé par refus d'application la police litigieuse ;
" alors, en troisième lieu et en tout état de cause, qu'en énonçant que l'incertitude demeurait sur la qualité d'assuré au sens de la police de Thierry X... bien qu'aucune des parties, et notamment la MACIF, n'ait contesté ce point, la Cour a méconnu les termes du litige ;
" et alors, enfin, qu'en ne recherchant pas, comme elle y était d'ailleurs invitée par les conclusions des parties, si M. Y... avait (ou non) la qualité de gardien du véhicule conduit, au moment de l'accident, par Thierry X..., la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motif caractérisé " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme partiellement que Claude Y... a emprunté à sa mère l'automobile de cette dernière pour donner à Thierry X..., qui n'était pas titulaire du permis de conduire, une leçon de conduite ; qu'au cours de cette leçon, X..., par suite d'une fausse manoeuvre, a heurté et blessé le piéton Michel Z... ; que, par un jugement devenu définitif, X... et Y... ont été condamnés, le premier pour blessures involontaires et conduite sans permis, le second pour complicité de cette dernière infraction, X... étant en outre, sur la constitution de partie civile de Z..., déclaré entièrement responsable des conséquences dommageables de l'accident ;
Attendu que, son père ayant souscrit auprès de la Mutuelle assurance des commerçants et industriels de France (MACIF) une police d'assurance " responsabilité civile chef de famille ", X... a, à l'occasion de l'instance en liquidation du préjudice de la victime, appelé en cause cet assureur ; que ce dernier a soulevé une exception de non-garantie tirée des dispositions de l'article 5 du contrat, selon lesquelles la garantie s'étendait, sous certaines conditions, aux dommages provenant du fait d'un véhicule terrestre à moteur n'appartenant pas à l'assuré et conduit par un de ses enfants, mais seulement " dans la mesure où l'utilisation n'a pas été faite à la connaissance du propriétaire ou du gardien du véhicule " ;
Attendu que pour accueillir cette exception et mettre la MACIF hors de cause la juridiction du second degré énonce notamment qu'il " semble acquis que Thierry X... a utilisé la voiture de Mme Y... à la connaissance et même avec l'autorisation de Claude Y..., dont la Cour n'a pas pour mission de dire (...) s'il était propriétaire ou, surtout, gardien du véhicule " ;
Attendu que ces motifs sont justement critiqués par le demandeur en ce que leur caractère dubitatif ne permettait pas aux juges de conclure que la condition prévue par le contrat pour que la garantie soit écartée était réalisée en l'espèce ;
Mais attendu que la Cour de Cassation a le pouvoir de substituer un motif de pur droit à un motif erroné ou inopérant sur lequel se fonde la décision attaquée, et de justifier ainsi ladite décision ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations souveraines et non contestées des juges du fond que Claude Y..., emprunteur de l'automobile de sa mère, y avait pris place à côté de X... auquel il donnait une leçon de conduite, circonstance impliquant nécessairement, d'une part, qu'il était investi de la garde du véhicule au moment de l'accident, et d'autre part, qu'il savait que X... utilisait ladite automobile, toutes constatations d'où il se déduit que, la clause d'extension de garantie ne pouvant jouer, la MACIF était fondée en son exception ;
Attendu que par ces motifs substitués à ceux des juges du fond la décision est justifiée ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 8 et 47 de la loi du 5 juillet 1985, 485 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a mis hors de cause la compagnie d'assurances MACIF, appelée en garantie par X... ;
" aux motifs que celui-ci qui n'avait pas demandé aux premiers juges, de déclarer immédiatement applicable à la cause, à la charge de cet assureur, l'article 8 de la loi du 5 juillet 1985, ne saurait présenter subsidiairemnt pareille demande à la Cour et ce, d'autant moins, que " contrairement à ce qu'il affirme en ses conclusions d'appel, ledit texte ne prévoit nullement que les compagnies d'assurances doivent également couvrir la responsabilité civile des conducteurs non autorisés, et ne vise nullement, en tout cas, pas expressément, le cas des conducteurs sans permis, mais prévoit l'obligation, pour les contrats d'assurance de responsabilité légale, de couvrir la responsabilité civile de toute personne ayant la garde ou la conduite, même non autorisée, du véhicule, sauf exception précisée aussitôt, concernant les professionnels de la vente, de la réparation ou du contrôle de l'automobile ; que ses conclusions doivent être écartées sur ce point " ;
" alors, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 47, alinéa 1er, de la loi du 5 juillet 1985, les dispositions de la loi autres que celles visées aux alinéas 2 et 3 du même texte, et notamment les dispositions des articles 7 à 11 relatifs au contrat d'assurance s'appliquent à partir du 1er janvier 1986 et qu'en se fondant sur le motif que X... s'était abstenu devant les premiers juges, dont la décision avait été rendue le 8 octobre 1985, d'invoquer ledit article 8 bien que ce texte ait été alors inapplicable, la cour d'appel a violé par fausse application l'article 47, alinéa 1er, de la loi du 5 juillet 1985 ;
" et alors, en second lieu, que l'article 8 de la loi de 1985 modifiant l'article L. 211-1 du Code des assurances, prévoit que l'assureur doit couvrir la responsabilité civile de toute personne ayant la garde ou la conduite, même non autorisée, du véhicule et s'applique nécessairement à la personne dépourvue de permis de conduire et qu'en refusant de faire jouer la garantie de la MACIF au profit de X..., conducteur démuni de permis de conduire au prétexte que le texte ne trouvait pas application, la Cour a violé par fausse application l'article 8 de la loi du 5 juillet 1985 " ;
Attendu que le moyen, qui fait justement grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable, comme présentée pour la première fois en cause d'appel, une demande qui n'aurait pu l'être en première instance, et d'avoir en outre procédé à une analyse erronée de l'article 8 de la loi du 5 juillet 1985, doit néanmoins être écarté par ce motif de pur droit, substitué à ceux des juges d'appel, que ledit texte, entré en vigueur sans rétroactivité le 1er janvier 1986, ne saurait régir les conséquences d'un accident antérieur à cette date ;
Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles 1382 du Code civil, 485 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt, réformant le jugement entrepris sur le montant des dommages-intérêts, a fixé à 168 021, 57 francs le préjudice global subi par la victime Michel Z... et a condamné Thierry X... à lui verser la somme de 91 554 francs et à payer à la CPAM des Hauts-de-Seine celle de 76 467, 57 francs ainsi qu'aux intérêts de droit des sommes dues en principal à compter du jour du jugement ;
" alors qu'une créance délictuelle ou quasi-délictuelle ne peut produire des intérêts moratoires qu'à compter du jour où la décision qui en consacre l'existence est devenue exécutoire et qu'en condamnant X... aux intérêts de droit des sommes dont le montant a été fixé en appel à compter du jugement, la Cour a violé les textes visés au moyen " ;
Attendu que l'arrêt attaqué, après avoir évalué le préjudice de Z... à une somme inférieure à celle qui avait été déterminée par les premiers juges, a fixé à la date du jugement déféré le point de départ des intérêts légaux des sommes dues par X... ;
Attendu que le demandeur critique vainement cette disposition dès lors qu'elle est conforme à l'article 1153-1 du Code civil, texte entré en vigueur le 1er janvier 1986 et s'appliquant à toutes les décisions judiciaires rendues depuis cette date ;
D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
MET hors de cause Claude Y... et la MGFA ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 86-96858
Date de la décision : 01/10/1987
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° CASSATION - Moyen - Moyen pris d'un motif de l'arrêt attaqué - erroné ou inopérant - Substitution d'un motif de pur droit - Portée.

1° La Cour de Cassation a le pouvoir de substituer un motif de pur droit à un motif erroné ou inopérant sur lequel se fonde la décision attaquée et de justifier ainsi ladite décision

2° LOIS ET REGLEMENTS - Application dans le temps - Loi relative à l'indemnisation des victimes d'accidents de la circulation - Loi du 5 juillet 1985 - Article 8 - Assurance automobile obligatoire - Conducteur non autorisé - Application aux accidents antérieurs au 1er janvier 1986 (non).

ASSURANCE - Véhicules terrestres à moteur - Obligation - Conducteur non autorisé - Loi du 5 juillet 1985 - Application dans le temps.

2° L'article L. 211-1 du Code des assurances, tel que modifié par l'article 8 de la loi du 5 juillet 1985, est entré en vigueur le 1er janvier 1986 et ne régit pas les conséquences des accidents antérieurs à cette date

3° ACTION CIVILE - Préjudice - Réparation - Intérêts - Point de départ - Date du jugement de première instance.

INTERETS - Point de départ - Date du jugement de première instance.

3° L'article 1153-1 du Code civil, entré en vigueur le 1er janvier 1986, permet aux juges d'appel, lorsqu'ils modifient l'évaluation du préjudice retenue par les premiers juges, de fixer à la date du jugement déféré le point de départ des intérêts légaux des indemnités allouées


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 09 décembre 1986

CONFER : (1°). Chambre criminelle, 1971-11-16 , Bulletin criminel 1971, n° 308, p. 775 (cassation) ;

Chambre criminelle, 1983-01-31 , Bulletin criminel 1983, n° 38, p. 77 (rejet). (2°). Chambre criminelle, 1987-01-08 , Bulletin criminel 1987, n° 7, p. 23 (cassation partielle).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 01 oct. 1987, pourvoi n°86-96858, Bull. crim. criminel 1987 N° 321 p. 860
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1987 N° 321 p. 860

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Bonneau, conseiller le plus ancien faisant fonction
Avocat général : Avocat général :M. Robert
Rapporteur ?: Rapporteur :M. de Bouillane de Lacoste
Avocat(s) : Avocats :la SCP Le Prado, la SCP Boré et Xavier, M. Choucroy.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1987:86.96858
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