CASSATION sur les pourvois formés par :
- X... Philippe,
- X... Pierre,
contre un arrêt de la cour d'appel de Caen, chambre correctionnelle, en date du 1er octobre 1986 qui les a condamnés, le premier, pour infraction à la police de la chasse et coups ou violences volontaires, à 2 mois d'emprisonnement et 2 000 francs d'amende ainsi qu'à la privation pendant 5 ans de son permis de chasser et a dit qu'il n'y avait pas lieu à dispense de révocation d'un sursis antérieur, le second, pour coups ou violences volontaires, à 1 mois d'emprisonnement avec sursis et 2 000 francs d'amende, et s'est prononcé sur les réparations civiles.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire personnel produit, commun aux demandeurs ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation de l'article 388 du Code de procédure pénale :
" en ce que la Cour a condamné les prévenus pour coups et blessures volontaires n'ayant pas entraîné d'incapacité de travail mais avec la circonstance prévue à l'article 309, alinéa 4, du Code pénal ;
" alors qu'elle n'était pas saisie des faits ayant motivé cette condamnation " ;
Et sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation de l'article 593 du Code de procédure pénale et 309, alinéa 4, du Code pénal, défaut de motifs :
" en ce que la Cour a condamné les prévenus pour coups et blessures volontaires sans incapacité mais avec l'une des circonstances de l'article 309, alinéa 4, du Code pénal sans préciser cette circonstance ;
" alors qu'aux termes de l'article 593 du Code de procédure pénale, les arrêts et jugements sont déclarés nuls s'ils ne contiennent pas de motifs " ;
Ces moyens étant réunis ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que les juges ne peuvent retenir une circonstance aggravante non visée à la poursuite, à moins que le prévenu n'ait accepté le débat sur cet élément nouveau de prévention ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite d'un incident qui avait opposé Foucault, garde de l'Office national de la chasse, à Philippe et Pierre X..., ceux-ci, qui, aux termes de la citation, étaient poursuivis pour coups ou violences volontaires ayant entraîné une incapacité de travail personnel pendant plus de huit jours ont été relaxés de ce chef par le Tribunal ; que la juridiction du second degré les a déclarés coupables de coups ou violences volontaires " n'ayant pas entraîné une telle incapacité ", commis " avec la circonstance prévue par l'alinéa 4 de l'article 309 du Code pénal " ;
Mais attendu qu'il ne résulte ni de l'arrêt attaqué ni des pièces de procédure que devant l'un ou l'autre des degrés de juridiction les prévenus aient été mis à même et aient accepté de s'expliquer sur la circonstance aggravante indiquée audit arrêt ; que de surcroît les termes imprécis voire inexacts de celui-ci ne permettent pas de déterminer de quelle disposition de l'article 309 précité, dont l'alinéa 4 ne prévoit aucune circonstance de cette nature, les juges d'appel ont entendu faire application ;
Qu'ainsi la Cour de Cassation n'est pas en mesure de s'assurer de la légalité de la décision, et que la cassation est encourue de ce chef ;
Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation de l'article 385 du Code rural :
" en ce que la Cour pour déclarer les prévenus coupables des infractions reprochées a déclaré que les procès-verbaux des gardes de l'Office national de la chasse font foi jusqu'à preuve contraire ;
" alors que cette force probante n'est attachée qu'aux délits visés par l'article 383 du Code rural " ;
Vu ledit article ;
Attendu qu'il résulte de l'article 385 du Code rural que les procès-verbaux des agents assermentés de l'Office national de la chasse ne font foi jusqu'à preuve contraire que pour les infractions à la police de la chasse ;
Attendu qu'à l'appui de leur décision qui condamnait l'un des prévenus pour infraction à la police de la chasse et coups ou violences volontaires, et l'autre du chef de ce dernier délit, dont la victime était un garde de l'Office national de la chasse, les juges du second degré ont énoncé qu'" aux termes de l'article 385 du Code rural les procès-verbaux des gardes de l'Office national de la chasse font foi jusqu'à preuve contraire " ;
Mais attendu que lesdits juges ont omis de préciser si ce motif concernait uniquement l'infraction à la police de la chasse ou s'étendait à l'ensemble de la poursuite ;
Qu'ainsi la Cour de Cassation n'est pas en mesure de s'assurer, sur ce point également, de la légalité de la décision et que la cassation est à nouveau encourue ;
Et sur le quatrième moyen de cassation propre à Philippe X... et pris de la violation de l'article 735 du Code de procédure pénale :
" en ce que la Cour a dit n'y avoir lieu à dispense de révocation de la peine de 1 mois avec sursis prononcée contre Philippe X... le 28 septembre 1982 ;
" alors que le prévenu absent à l'audience n'avait saisi la Cour d'aucune demande en ce sens " ;
Vu ledit article ;
Attendu qu'il résulte de l'article 735, alinéa 2, du Code de procédure pénale que dans le cas où la condamnation qu'ils prononcent entraîne la révocation d'un sursis simple antérieur, les juges sont autorisés à dire, par une décision spéciale et motivée, que ce sursis ne sera pas révoqué en raison de cette condamnation ;
Attendu que l'arrêt attaqué déclare " n'y avoir lieu à dispense de révocation " du sursis antérieurement accordé à Philippe X... pour une peine d'emprisonnement ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que ce sursis était révoqué par le simple effet de la loi et qu'elle n'était saisie d'aucune demande de dispense de révocation, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et que la cassation est derechef encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Caen, en date du 1er octobre 1986, et pour qu'il soit à nouveau statué conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Rouen.