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16/07/1987 | FRANCE | N°86-94554

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 16 juillet 1987, 86-94554


CASSATION sur le pourvoi formé par :
- la Mutuelle assurance artisanale de France (MAAF), partie intervenante,
contre un arrêt de la cour d'appel de Douai (6e chambre), en date du 8 juillet 1986 qui, dans une procédure suivie contre X... du chef d'homicide et blessures involontaires, l'a déclarée tenue à garantie.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 113-3 et R. 113-1 du Code des assurances, 485 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base lég

ale :
" en ce que l'arrêt attaqué a dit que la MAAF devait être tenue de ...

CASSATION sur le pourvoi formé par :
- la Mutuelle assurance artisanale de France (MAAF), partie intervenante,
contre un arrêt de la cour d'appel de Douai (6e chambre), en date du 8 juillet 1986 qui, dans une procédure suivie contre X... du chef d'homicide et blessures involontaires, l'a déclarée tenue à garantie.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 113-3 et R. 113-1 du Code des assurances, 485 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a dit que la MAAF devait être tenue de garantir X... des conséquences dommageables de l'accident du 23 décembre 1983 ;
" aux motifs que, en l'absence de tout règlement par l'assuré des primes dues par lui, l'assureur a adressé à X..., qui conteste l'avoir reçue, le 9 août 1983, une lettre recommandée reprenant cette somme de 4 425 francs valant mise en demeure, avec résiliation en cas de non-paiement, rappelant les dispositions de l'article L. 113-3 du Code des assurances, accompagnée d'une lettre explicative ; que certes, du côté de la MAAF, la procédure a été exécutée conformément à la loi qui n'a prévu que l'envoi d'une mise en demeure par pli recommandé, sans exiger qu'il soit assorti d'un avis de réception ; que cependant, le respect de cette règle ne peut avoir eu d'effet que si la lettre recommandée a été effectivement reçue, ou à la limite refusée, par son destinataire, et qu'il ne peut entraîner un renversement de la charge de la preuve et que, dès lors, faute par la MAAF de rapporter la preuve que la lettre recommandée aurait été reçue ou refusée, la MAAF doit être tenue des conséquences dommageables de l'accident du 23 décembre 1983 ;
" alors que la mise en demeure, à défaut de paiement d'une prime, visée par l'article L. 113-3 du Code des assurances, résulte selon l'article R. 113-1 du même Code du seul envoi d'une lettre recommandée sans qu'il soit exigé un accusé de réception et que l'expéditeur n'a, dès lors, pas à faire la preuve de sa réception par le destinataire et qu'en l'espèce, en exigeant que la MAAF établisse que son assuré X... avait bien reçu ou avait connaissance de l'envoi de la lettre recommandée, la cour d'appel a violé, par fausse application, lesdits articles L. 113-3 et R. 113-1 du Code des assurances " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que, selon l'article R. 113-1 du Code des assurances, lorsque l'assuré est domicilié en France métropolitaine, la mise en demeure prévue à l'article L. 113-3 du même Code résulte du seul envoi d'une lettre recommandée à son domicile, l'assureur n'ayant pas à administrer la preuve de la réception de cette lettre par le destinataire ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que Rabah X... a souscrit auprès de la MAAF un contrat d'assurance couvrant sa responsabilité civile pour la conduite d'une automobile ; que l'intéressé n'ayant pas payé la cotisation du second semestre de 1983 l'assureur lui a envoyé le 9 août 1983 une lettre recommandée reproduisant les dispositions de l'article L. 113-3 du Code des assurances et contenant mise en demeure de payer ladite cotisation, sous peine de suspension de la garantie à l'expiration d'un délai de trente jours ; que X... n'a pas déféré à cette mise en demeure dans le délai imparti ; qu'il a, le 23 décembre 1983, provoqué un accident dont il a été déclaré responsable, et que la MAAF a refusé de prendre en charge le sinistre ;
Attendu que pour déclarer l'assureur tenu à garantie la juridiction du second degré retient que X... a contesté avoir reçu la lettre recommandée précitée et que, si la MAAF a adressé la mise en demeure dans les formes prévues à l'article R. 113-1 du Code des assurances, il lui appartenait néanmoins, eu égard à cette contestation, d'apporter la preuve que la lettre avait été reçue ou refusée par son destinataire ;
Mais attendu qu'en se prononçant ainsi la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Et sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 2221 du Code civil, 1134 du même Code, 485 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a dit que la MAAF était tenue de garantir X... des conséquences dommageables de l'accident du 23 décembre 1983 ;
" aux motifs qu'un contractant est parfaitement libre de renoncer à un droit, que cette renonciation peut être tacite et qu'en l'espèce, en dehors de l'envoi de la lettre recommandée du 9 août 1983, tout s'est passé pour X... comme si la MAAF continuait à le couvrir de sa garantie, à savoir réception par X... le 5 septembre 1983 d'un relevé de compte faisant ressortir un solde débiteur mais ne comportant aucune menace de résiliation, réception par l'assuré de deux attestations d'assurance le couvrant théoriquement pour la période du 1er avril 1983 au 31 mars 1984 et visite de l'expert technique de la MAAF pour un autre accident survenu le 18 décembre 1983 ;
" alors que la renonciation ne se présume pas et doit résulter d'actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer ;
" et alors qu'en l'espèce, d'une part, en se bornant à constater que dans l'esprit de l'assuré tout s'est passé comme si la MAAF continuait de le couvrir de sa garantie, sans rechercher ni constater que par les actes rappelés ci-dessus, l'assureur avait manifesté l'intention de renoncer à la résiliation de la police, la Cour a entaché sa décision d'une insuffisance de motifs caractérisée ;
" et alors, d'autre part, et en tout état de cause, qu'en déduisant une renonciation de la MAAF à se prévaloir de la résiliation de la police de faits, tels que l'envoi d'un relevé de compte, celui d'une attestation d'assurance internationale et la visite d'un expert technique, qui ne sont pas susceptibles de révéler une intention non équivoque de l'assureur de renoncer à ses droits, la Cour a violé l'article 2221 du Code civil et les textes visés au moyen " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que la renonciation à un droit ne résulte que d'actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer ;
Attendu que pour rejeter l'exception soulevée par la MAAF, les juges retiennent encore que celle-ci a tacitement renoncé à se prévaloir de la suspension de la garantie liée au défaut de paiement de la cotisation d'assurance, en envoyant à X... le 5 septembre 1983 un relevé de compte qui ne comportait ni menace de résiliation ni délai de paiement, en le laissant en possession d'attestations d'assurance valables à la date du sinistre, enfin en lui dépêchant un expert à la suite d'un accident survenu le 18 décembre 1983 ;
Mais attendu qu'en se déterminant par ces seuls motifs, sans relever aucun acte manifestant sans équivoque la volonté de l'assureur de renoncer aux effets de la mise en demeure, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que l'arrêt doit être également censuré de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt de la cour d'appel de Douai en date du 8 juillet 1986,
Et pour qu'il soit statué à nouveau conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Rouen.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 86-94554
Date de la décision : 16/07/1987
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° ASSURANCE - Primes - Non-paiement - Mise en demeure - Lettre recommandée - Assureur - Preuve de la réception par le destinataire (non).

1° Selon l'article R. 113-1 du Code des assurances, lorsque l'assuré est domicilié en France métropolitaine, la mise en demeure prévue à l'article L. 113-3 du même Code résulte du seul envoi d'une lettre recommandée à son domicile, l'assureur n'ayant pas à administrer la preuve de la réception de cette lettre par le destinataire

2° ASSURANCE - Primes - Non-paiement - Mise en demeure - Acte manifestant la volonté non équivoque de renoncer - Constatations nécessaires.

2° La renonciation à un droit ne résulte que d'actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer ; Méconnaît ce principe et encourt la cassation l'arrêt qui, pour déclarer qu'un assureur avait renoncé aux effets d'une mise en demeure, se fonde sur des actes de l'assureur dont aucun ne manifestait sans équivoque sa volonté de renonciation.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 08 juillet 1986

CONFER : (1°). Chambre civile 1, 1975-11-18 Bulletin 1975, I, n° 329, p. 272 (rejet). (2°). Chambre mixte, 1974-04-26 Bulletin 1974, n° 1, p. 1 (cassation partielle).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 16 jui. 1987, pourvoi n°86-94554, Bull. crim. criminel 1987 N° 295 p. 788
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1987 N° 295 p. 788

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Ledoux
Avocat général : Avocat général :M. Robert
Rapporteur ?: Rapporteur :M. de Bouillane de Lacoste
Avocat(s) : Avocats :la SCP Le Prado, MM. Vincent et Coutard.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1987:86.94554
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