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10/06/1987 | FRANCE | N°86-93700

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 10 juin 1987, 86-93700


REJET du pourvoi formé par :
- X... Bernard,
contre un arrêt de la cour d'appel de Nîmes, chambre correctionnelle, en date du 25 avril 1986, qui l'a condamné à la peine de 10 000 francs d'amende pour infraction aux règles de la facturation.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 46 et 49 de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945, des articles 1er, 5e alinéa, 39- II, 51 et 56 de l'ordonnance n° 45-1484 du 30 juin 1945, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base lég

ale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le demandeur coupable d'avoir d...

REJET du pourvoi formé par :
- X... Bernard,
contre un arrêt de la cour d'appel de Nîmes, chambre correctionnelle, en date du 25 avril 1986, qui l'a condamné à la peine de 10 000 francs d'amende pour infraction aux règles de la facturation.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 46 et 49 de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945, des articles 1er, 5e alinéa, 39- II, 51 et 56 de l'ordonnance n° 45-1484 du 30 juin 1945, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le demandeur coupable d'avoir de novembre 1980 à avril 1982 effectué des achats sans factures pour les besoins de son exploitation et en répression l'a condamné à une peine d'amende de 10 000 francs ;
" aux motifs que l'information avait relevé qu'en sa qualité de commerçant, il avait fait des achats sans factures, pour les besoins de son exploitation, ce qu'il niait ; que ses achats portaient sur des produits alimentaires, avaient été effectués auprès de la société Soca pendant la période non prescrite pour un montant de 21 500 francs ; qu'à bon droit les premiers juges l'avaient retenu dans les liens de prévention en raison des charges graves, précises et concordantes contenues dans le dossier ; que, sans qu'il fût besoin de tenir compte du procès-verbal dont le demandeur sollicitait la nullité (cote D. 23), il résultait de l'ensemble de la procédure, des déclarations du gérant de la société Soca et de celles du chauffeur de cet établissement que les opérations effectuées pour plusieurs commerçants dont le " Français " figuraient sur des documents que le chauffeur tenait lui-même, en l'espèce des cahiers d'écolier, sur lesquels il notait, au jour le jour, les livraisons, leur montant et la manière dont elles avaient été réglées en chèque ou en espèces ; certaines, en ce cas n'étant pas facturées, donc non comptabilisées, en tout ou en partie ; que du rapprochement des livres d'achats présentés par le demandeur avec les documents de la société Soca (cahiers de livraison et doubles des facturiers) il ressort que le montant des achats effectués sans factures s'élevait pour la période litigieuse qui s'étend sur dix-sept mois à une somme de 21 500 francs pour 159 livraisons ; que l'ensemble de ces achats a été réglé, de l'aveu même du prévenu, en espèces, au regard des sommes modiques que la plupart d'entre eux représentaient ;
" alors que, d'une part, est insuffisamment motivé l'arrêt attaqué qui, se bornant à reproduire les termes de la loi, affirme que le demandeur aurait fait les dix achats sans factures pour les besoins de son exploitation (et non pour sa consommation personnelle), sans préciser les éléments de preuve sur lesquels il se fondait pour affirmer l'existence de cet élément constitutif du délit ;
" alors que, de seconde part, est entaché de contradiction, l'arrêt attaqué qui, d'une part, constate que le demandeur nie avoir fait des achats sans factures pour les besoins de son exploitation, tout en relevant que le demandeur aurait avoué avoir réglé en espèces les achats sans factures, objet du litige " ;
Attendu que X... a été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour avoir, de novembre 1980 à avril 1982, en tant que propriétaire d'une brasserie, effectué des achats de produits alimentaires sans facture, pour les besoins de son exploitation, auprès de la société Soca ;
Attendu que pour déclarer le prévenu coupable d'infraction aux règles de la facturation, l'arrêt attaqué et le jugement qu'il confirme relèvent qu'il résulte des déclarations du gérant de la société Soca que plusieurs clients, dont X..., réglaient leurs commandes en numéraire et ne désiraient pas de factures, que le chauffeur-livreur notait au jour le jour sur des " cahiers d'écolier " les livraisons faites, leur montant et la manière dont elles avaient été réglées ;
Que les juges soulignent que du rapprochement des livres d'achat présentés par X... et des documents tenus par la société Soca, il ressort que le montant des achats sans facture s'élève pour la période concernée à 21 500 francs ; qu'ils déduisent des aveux du prévenu que l'ensemble de ces achats a été réglé en espèces ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs exempts d'insuffisance et de contradictions, et qui relèvent de leur pouvoir souverain d'appréciation des circonstances de la cause, les juges ont caractérisé en tous ses éléments le délit reproché, lequel était alors prévu et puni par les articles 46 de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 et 1er-5°, 39- II, 51 et 56 de l'ordonnance n° 45-1484 du 30 juin 1945 ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Attendu, par ailleurs, que l'ensemble des textes susvisés a été abrogé à compter du 1er janvier 1987, par l'effet des articles 1er, alinéa 1er, 57 et 62 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 et de la publication du décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986 ; que cependant l'ordonnance précitée a maintenu en son article 31, pour toute activité professionnelle, la nécessité pour l'acheteur de réclamer une facture et a prévu pour toute infraction aux dispositions dudit article une peine d'amende de 5 000 à 100 000 francs ;
Qu'en l'absence de dispositions contraires une loi nouvelle, même de nature économique, qui pour des incriminations pénales prévoit des peines correctionnelles plus douces, s'applique aux faits commis avant son entrée en vigueur et non définitivement jugés ;
Que, dès lors, l'arrêt attaqué, qui a prononcé une peine d'amende inférieure au maximum prévu par la loi nouvelle n'est pas aujourd'hui dépourvu de base légale ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 86-93700
Date de la décision : 10/06/1987
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° LOIS ET REGLEMENTS - Réglementation économique - Rétroactivité - Loi plus douce - Loi modifiant les peines applicables à une infraction - Effet - Pourvoi en cours.

1° En l'absence de dispositions contraires expresses, une loi nouvelle, même de nature économique, qui abroge une ou des incriminations pénales ou qui institue des pénalités plus douces, s'applique aux faits commis avant son entrée en vigueur et non définitivement jugés. C'est ainsi que les ordonnances n°s 45-1483 et 45-1484 du 30 juin 1945 ayant été abrogées, à compter du 1er janvier 1987, par l'effet des articles 1er, alinéa 1er, 57 et 62 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 et de la publication du décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986, l'ordonnance précitée est applicable aux procédures pénales en cours.

2° REGLEMENTATION ECONOMIQUE - Factures - Achat et vente - Ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence - Application dans le temps - Loi plus douce - Loi modifiant les peines applicables à une infraction - Effet - Pourvoi en cours.

2° Voir le sommaire suivant.

3° PEINES - Peine justifiée - Loi pénale nouvelle - Incrimination ancienne susceptible de tomber sous le coup des dispositions nouvelles - Peine prononcée entrant dans les prévisions des deux textes.

3° Au regard de l'infraction aux règles de la facturation, prévue et punie par les articles 46 de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 et 1er-5°, 39-II, 51 et 56 de l'ordonnance n° 45-1484 du 30 juin 1945, les poursuites conservent un fondement légal, nonobstant l'abrogation de ces textes par l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986, dès lors que l'ordonnance précitée a maintenu en son article 31, pour toute activité professionnelle, la nécessité pour l'acheteur de réclamer une facture et a prévu pour toute infraction aux dispositions dudit article une peine d'amende. Il s'ensuit que la peine prononcée est justifiée si elle entre, comme en l'espèce, dans les prévisions de l'ancienne et de la nouvelle loi.


Références :

Ordonnance 45-1483 du 30 juin 1945 art. 46
Ordonnance 45-1484 du 30 juin 1945 art. 1 al. 5, art. 39 al. 2, art. 51, art. 56
Ordonnance 86-1243 du 01 décembre 1986 art. 1 al. 1, art. 31, art. 57

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 25 avril 1986


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 10 jui. 1987, pourvoi n°86-93700, Bull. crim. criminel 1987 N° 240 p. 655
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1987 N° 240 p. 655

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Tacchella, conseiller le plus ancien faisant fonction .
Avocat général : Avocat général :M. Rabut
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Gondre
Avocat(s) : Avocat :la SCP Nicolas, Massé-Dessen et Georges.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1987:86.93700
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