REJET du pourvoi formé par :
- X... René,
contre un arrêt de la cour d'assises du Haut-Rhin, en date du 11 juin 1986 qui, pour homicides volontaires, l'a condamné à 20 ans de réclusion criminelle.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 151, 152, 156, 310 du Code de procédure pénale, ensemble violation de l'oralité des débats et des droits de la défense ;
" en ce qu'il résulte du procès-verbal des débats que le président après avoir entendu en vertu de son pouvoir discrétionnaire et sans prestation de serment le témoin Bernard Y..., a d'une part chargé le témoin de procéder à une mesure d'investigation portant sur le fond de l'affaire et a d'autre part entendu le compte rendu oral de l'exécution de la mission confiée sans avoir auparavant fait prêter serment à son auteur ;
" alors que si le président de la cour d'assises est investi, aux termes de l'article 310 du Code de procédure pénale, d'un pouvoir discrétionnaire lui permettant de prendre toutes mesures qu'il croit utiles pour découvrir la vérité, ce pouvoir ne peut faire échec aux règles concernant les mesures d'instruction et assurant le respect des droits de la défense ; qu'un témoin ne pouvait pas être chargé d'une mission d'expertise ou en tous les cas d'une mission d'instruction touchant au fond de l'affaire, et qu'à tout le moins il devait prêter serment avant de rendre compte de ses investigations " ;
Attendu que le procès-verbal des débats constate que le président de la cour d'assises, après avoir entendu, en vertu de son pouvoir discrétionnaire, Bernard Y..., inspecteur de police, l'a chargé de " faire établir, au moyen d'un renseignement à prendre au siège strasbourgeois du pari mutuel urbain, la date exacte de validation d'un bordereau de pari mutuel (tiercé) dont l'accusé était porteur au moment de son incarcération à la maison d'arrêt de Colmar " ;
Qu'aucune observation n'a été faite par les parties ;
Attendu que le même procès-verbal mentionne qu'à la fin de l'interrogatoire de l'accusé, le président " a recueilli à titre de renseignement, le compte rendu oral de l'inspecteur Y... fait en exécution de la mission qu'il lui avait confiée... " ;
Qu'aucune observation n'a été faite par les parties ;
Attendu qu'en procédant ainsi, en l'absence de tout incident contentieux, le président a régulièrement usé du pouvoir discrétionnaire qu'il tient de l'article 310 du Code de procédure pénale ;
Qu'en effet les mesures tendant à vérifier des éléments de faits débattus au cours du débat contradictoire, que dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, le président peut être amené à prendre parce qu'il les estime utiles à la manifestation de la vérité, ne sont pas soumises aux règles de l'expertise définies par les articles 156 et suivants du Code de procédure pénale ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 315, 316, 593 du Code de procédure pénale, ensemble violation de l'oralité des débats et des droits de la défense, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que la Cour a refusé de faire droit aux conclusions de la défense sollicitant une mesure de transport sur les lieux ;
" aux motifs que " l'examen attentif par tous les membres de la Cour et du jury de nombreux plans et photographies des lieux figurant au dossier n'ont révélé aucun élément nouveau permettant de penser que la mesure de transport sur les lieux sollicitée soit nécessaire " ;
" alors que, d'une part, la Cour ne pouvait sans violer le principe de l'oralité des débats et préjuger au fond, rejeter la demande d'instruction sollicitée en s'appuyant sur l'existence au dossier de procédure écrite, de plans et de photographies des lieux ;
" alors que, d'autre part, le conseil de l'accusé avait fait valoir dans ses conclusions qu'aucun transport n'avait été effectué lors de l'instruction et que celui-ci était donc indispensable pour " vérifier sur place les hypothèses échafaudées à l'encontre de René X... " ; que, dès lors, l'arrêt devait obligatoirement statuer sur cette articulation essentielle de nature à justifier le bien-fondé de la demande " ;
Attendu qu'il résulte des énonciations du procès-verbal des débats qu'après la lecture de l'arrêt de renvoi, le conseil de l'accusé a saisi la Cour de conclusions écrites lui demandant " d'ordonner un transport de la Cour et du jury sur les lieux du crime... " ;
Que par un premier arrêt, inséré audit procès-verbal, la Cour a sursis à statuer sur les conclusions de la défense jusqu'à la clôture des débats ;
Que par un autre arrêt également inséré au procès-verbal des débats et intervenu à la fin de l'instruction orale à l'audience, la Cour, pour rejeter la mesure sollicitée, énonce " que le déroulement des débats, ainsi que l'examen attentif par tous les membres de la Cour et du jury des nombreux plans et photographies des lieux figurant au dossier n'ont révélé aucun élément nouveau permettant de penser que la mesure de transport sur les lieux sollicitée soit nécessaire ; qu'au surplus, les faits se sont déroulés à la fin du mois de novembre 1982, c'est-à-dire pratiquement en hiver, alors que les lieux, notamment les extérieurs, présentaient un aspect très différent de celui qu'ils peuvent avoir à la mi-juin 1986, soit en été " ;
Attendu que cette décision, intervenue à la fin de l'instruction à l'audience, ne porte pas atteinte à l'oralité des débats, ne contient aucune appréciation de la culpabilité de l'accusé, ne préjuge pas le fond et répond aux conclusions du demandeur en s'expliquant sur l'absence d'intérêt du transport sur les lieux sollicité ;
Que, dès lors, le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la Cour et le jury ;
REJETTE le pourvoi.