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26/05/1987 | FRANCE | N°85-18811

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 26 mai 1987, 85-18811


Attendu que l'arrêt attaqué (Poitiers, 23 octobre 1985) a condamné solidairement MM. Pierre et Marcel X..., le premier en tant que gérant de la société à responsabilité limitée Saintonge Bâtiment, en liquidation des biens, le second comme dirigeant de fait de celle-ci, à payer au syndic une partie des dettes sociales en application des dispositions de l'article 99 de la loi du 13 juillet 1967 ; .

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que M. Pierre X... fait grief à l'arrêt d'avoir statué comme il l'a fait, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu

'il résulte du dernier alinéa de l'article 99 de la loi du 13 juillet 196...

Attendu que l'arrêt attaqué (Poitiers, 23 octobre 1985) a condamné solidairement MM. Pierre et Marcel X..., le premier en tant que gérant de la société à responsabilité limitée Saintonge Bâtiment, en liquidation des biens, le second comme dirigeant de fait de celle-ci, à payer au syndic une partie des dettes sociales en application des dispositions de l'article 99 de la loi du 13 juillet 1967 ; .

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que M. Pierre X... fait grief à l'arrêt d'avoir statué comme il l'a fait, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'il résulte du dernier alinéa de l'article 99 de la loi du 13 juillet 1967 que pour dégager leur responsabilité, les dirigeants impliqués doivent faire la preuve qu'ils ont apporté à la gestion des affaires sociales toute l'activité et la diligence nécessaires ; que l'activité et la diligence susceptibles d'être exigées du gérant d'une société à responsabilité limitée sont celles qui pèsent sur un mandataire salarié ; que l'obligation du mandataire salarié chargé de diriger une entreprise n'est pas une obligation de résultat mais une obligation de prudence et de diligence ; que sa responsabilité doit être appréciée en fonction de son activité et de ses efforts et non en fonction du seul résultat accusé par les comptes sociaux, et ce, sous peine d'aboutir à une impossibilité pour les dirigeants de fait de faire la preuve mise à leur charge par l'article 99 de la loi du 13 juillet 1967 ; qu'en se contentant, pour décider que Pierre X... n'avait pas rapporté la preuve qui lui incombait, d'affirmer que l'importance du passif traduisait une négligence et une méconnaissance certaines de ses devoirs, la cour a violé l'article 99 de la loi du 13 juillet 1967 et alors, d'autre part, qu'il ne peut être reproché à un dirigeant de droit d'une société de ne pas avoir arrêté l'activité de celle-ci que si sa situation était définitivement compromise ; qu'en décidant que M. Pierre X... n'avait pas rapporté la preuve qui lui incombait, en vertu de l'article 99, dernier alinéa, parce qu'il aurait dû mettre fin plus tôt à l'activité de la société sans constater que la situation de la société était définitivement compromise à une date antérieure au dépôt de bilan, la décision attaquée n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle sur l'application de l'article 99 de la loi du 13 juillet 1967 ;

Mais attendu qu'il ressort des constatations de l'arrêt que M. Pierre X..., dirigeant de droit de la société débitrice n'a pas justifié devant les juges du fond qu'il ait apporté à la gestion des affaires sociales toute l'activité et la diligence nécessaires ; que, dès lors, en le condamnant à payer une partie des dettes sociales, la cour d'appel n'a fait qu'user des pouvoirs qu'elle tient des dispositions de l'article 99 de la loi du 13 juillet 1967 ; qu'il suit de là que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu qu'il est encore reproché à l'arrêt d'avoir déclaré M. Marcel X..., dirigeant de fait de la société Saintonge Bâtiment, et de l'avoir condamné en conséquence à payer une partie des dettes sociales au syndic de la liquidation des biens en vertu de l'article 99 de la loi du 13 juillet 1967, alors, selon le pourvoi, que toute décision doit être motivée, que l'insuffisance de motifs équivaut au défaut de motifs, et que la décision attaquée, qui ne constate aucun fait de direction à la charge de M. Marcel X..., mais seulement l'exploitation de son fonds de commerce par la société Saintonge Bâtiment et la location de matériels par lui à cette société, ainsi que la détention d'un certain nombre de parts de la société qu'il aurait pris l'initiative de fonder, encourt la cassation par application de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain que la cour d'appel a retenu par une décision motivée que M. Marcel X... dirigeait en fait la société Saintonge Bâtiment ; que le moyen est sans fondement ;

Sur le troisième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que le pourvoi reproche enfin à l'arrêt d'avoir statué comme il l'a fait, alors, d'une part, qu'il résulte de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, que l'article 99 de la loi du 13 juillet 1967 qui crée une présomption de responsabilité et inverse la charge de la preuve est contraire au principe du procès équitable et alors, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1er du protocole additionnel à la Convention européenne précitée, toute personne physique ou morale a le droit au respect de ses biens, nul ne pouvant être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ; que l'article 99 de la loi du 13 juillet 1967, en aboutissant en fait à un système de responsabilité sans faute, a pour résultat une violation du principe du droit de propriété tel que garanti par l'article 1er du protocole additionnel ;

Mais attendu que les dispositions de l'article 99 de la loi du 13 juillet 1967 ne sont contraires ni à celles de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni à celles de l'article 1er du protocole additionnel à cette Convention ; que le moyen n'est donc fondé en aucune des ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 85-18811
Date de la décision : 26/05/1987
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

REGLEMENT JUDICIAIRE, LIQUIDATION DES BIENS (loi du 13 juillet 1967) - Personne morale - Dirigeants sociaux - Paiement des dettes sociales - Article 99 de la loi du 13 juillet 1967 - Action introduite sur son fondement - Action contraire à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (non)

* CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Interprétation - Article 6 - Règlement judiciaire ou liquidation des biens - Personnes morales - Dirigeants sociaux - Paiement des dettes sociales - Action fondée sur l'article 99 de la loi du 13 juillet 1967

* CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Premier protocole additionnel - Article 1er - Interprétation - Droit au respect de ses biens - Règlement judiciaire ou liquidation des biens - Personne morale - Responsabilité pécuniaire des dirigeants sociaux - Action fondée sur l'article 99 de la loi du 13 juillet 1967

Les dispositions de l'article 99 de la loi du 13 juillet 1967 ne sont contraires ni à celles de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni à celles de l'article 1er du protocole additionnel à cette convention


Références :

Loi 67-563 du 13 juillet 1967

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 23 octobre 1985

A RAPPROCHER : Chambre commerciale, 1984-11-20 Bulletin 1984, IV, n° 315 (2), p. 255 (rejet)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 26 mai. 1987, pourvoi n°85-18811, Bull. civ. 1987 IV N° 125 p. 95
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1987 IV N° 125 p. 95

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Baudoin
Avocat général : Avocat général :M. Jeol
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Vincent
Avocat(s) : Avocat :M. Ryziger .

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1987:85.18811
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