Sur les deux moyens réunis :
Attendu qu'il résulte des énonciations du jugement attaqué (conseil de prud'hommes de Cergy-Pontoise, 14 mars 1984) que les conducteurs-receveurs de la société Stivo de transport effectuaient chaque semestre, pour des raisons comptables imposées par un contrat de régie avec la RATP, le comptage des voyageurs en fonction des titres de transport ; qu'un certain nombre de conducteurs-receveurs ayant, après un premier refus le 5 mai 1983 et une mise en garde, refusé de nouveau, le 9 mai, d'effectuer ce comptage, l'employeur leur a adressé un avertissement et s'étant opposé la seconde fois à ce qu'ils effectuent un autre travail, ne les a pas rémunéré pour cette journée ;
Attendu que la société Stivo fait grief au jugement de l'avoir condamnée à payer à vingt-et-un des intéressés, pour le 9 mai 1983, le montant d'une journée de travail, alors, d'une part, en premier lieu, que méconnaît les dispositions de l'article 16 du nouveau Code de procédure civile le jugement attaqué qui invoque d'office, sans appeler les parties à faire valoir leurs observations, le moyen selon lequel il n'est pas prévu par la convention collective nationale applicable que les conducteurs-receveurs doivent, dans le cadre de la définition de leur obligation contractuelle, effectuer le comptage des passagers ; en deuxième lieu, bien qu'ayant constaté que dans le cadre de leur fonction de conducteur-receveur les salariés avaient auparavant accepté d'effectuer le comptage des passagers sans recevoir de rémunération supplémentaire et qu'il s'était ainsi établi un accord entre l'employeur et les salariés sur ce point, méconnaît les dispositions de l'article 1134 du Code civil le jugement attaqué qui déclare que c'est à bon droit que lesdits salariés ont refusé d'effectuer ce travail non rémunéré le 9 mai 1983 ; et, en troisième lieu, que la convention collective nationale applicable définissant le " conducteur-receveur " comme " l'ouvrier chargé de la conduite d'un car et de la perception des recettes voyageurs, bagages et messageries ; manipule et surveille les colis et dépêches postales transportés ; veille à l'application des règlements ; doit être capable d'assurer le dépannage courant (carburateur, bougie, changement de roue, etc...), ainsi que de signaler dans un rapport le mauvais fonctionnement de certains organes et les accidents survenus ; est obligatoirement titulaire du permis de conduire " transports en commun ", et ladite convention collective n'interdisant nullement aux parties d'ajouter à ces fonctions, du moment que l'adjonction ne fait pas passer l'intéressé dans une autre qualification professionnelle et correspond seulement à un accessoire de la fonction du conducteur-receveur, méconnaît ces dispositions de ladite convention collective le jugement attaqué qui déduit de la définition d'emploi précité qu'un accord particulier entre l'employeur et ses conducteurs-receveurs ne pourrait ajouter aux fonctions imposées par la convention collective au conducteur-receveur, l'obligation accessoire, au cours de deux jours de travail tous les six mois, de faire un comptage des passagers ; et alors, d'autre part, que méconnaît les dispositions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile le jugement qui affirme que l'employeur ne pouvait s'opposer à la prise de service, le 9 mai 1983
par les salariés défendeurs au présent pourvoi, sans répondre au moyen des conclusions de la société Stivo faisant justement valoir que face au mouvement revendicatif illicite des salariés qui refusaient d'exécuter parties de leurs fonctions et entendaient exécuter leur travail dans des conditions autres que celles prévues à leur contrat, l'employeur était en droit, du fait de cette inexécution par les salariés de leurs obligations contractuelles, à savoir l'exécution de tâches dont ils avaient la charge depuis plusieurs années, de suspendre elle-même ses propres obligations contractuelles, à savoir de fournir aux conducteurs concernés du travail en contrepartie de leurs prestations partiellement et irrégulièrement inexécutées ;
Mais attendu qu'ayant relevé que les opérations de comptage des passagers ne faisaient pas partie des obligations de leur emploi tel que défini par la convention collective des transports routiers, et constatant que l'employeur avait voulu, alors qu'il avait la possibilité de conclure un accord d'entreprise, imposer un travail supplémentaire aux conducteurs-receveurs, le conseil de prud'hommes, qui n'a pas méconnu le principe du contradictoire et a répondu aux conclusions de la société, en a exactement déduit que l'employeur ne pouvait unilatéralement imposer ce surcroît de travail aux intéressés ; que les deux moyens, en leurs diverses branches, ne sont pas fondés ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi