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28/04/1987 | FRANCE | N°85-17302

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 28 avril 1987, 85-17302


Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que Roger X. est décédé, le 4 avril 1982, laissant Mme X., son épouse commune en biens, avec laquelle il était en instance de divorce et les deux enfants issus de son mariage, Marie et Laurent, et en l'état d'un testament authentique en date du 25 mars 1981 aux termes duquel il a légué la quotité disponible de sa succession à Mme Y. ; que la mère de cette dernière, Mme Z., était sa maîtresse depuis 1976 ; que les consorts X. ont formé contre Mme Z. et Mme Y. une action tendant à faire prononcer la nullité pour cause d'immoral

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Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que Roger X. est décédé, le 4 avril 1982, laissant Mme X., son épouse commune en biens, avec laquelle il était en instance de divorce et les deux enfants issus de son mariage, Marie et Laurent, et en l'état d'un testament authentique en date du 25 mars 1981 aux termes duquel il a légué la quotité disponible de sa succession à Mme Y. ; que la mère de cette dernière, Mme Z., était sa maîtresse depuis 1976 ; que les consorts X. ont formé contre Mme Z. et Mme Y. une action tendant à faire prononcer la nullité pour cause d'immoralité du testament du 25 mars 1981, comme contenant un legs fait à la maîtresse par interposition de la personne de la fille de celle-ci et à faire condamner Mme Z. à restituer, avec les intérêts au taux légal, diverses sommes qu'elle avait perçues, en capital-décès, par l'effet de plusieurs contrats d'assurance souscrits par le de cujus qui l'avait désignée en qualité de bénéficiaire ; que de leur côté, Mme Z. et Mme Y. avaient formé une demande reconventionnelle en dommages et intérêts en réparation du préjudice moral causé par l'évocation, au cours de la procédure, de faits ayant donné lieu à une condamnation pénale prononcée en 1954 contre Mme Z. et suivie d'une réhabilitation ; que l'arrêt attaqué a rejeté la demande principale des consorts X. et, accueillant la demande reconventionnelle, a condamné lesdits consorts à payer un franc à titre de dommages et intérêts à Mme Z. et à Mme Y. ; .

Sur le premier moyen :

Attendu que les consorts X. reprochent à l'arrêt attaqué (Paris, 8 juillet 1985) de les avoir déboutés de leur demande en annulation du testament du 25 mars 1981, alors que la cour d'appel, qui avait constaté le lien d'étroite parenté existant entre la concubine et la personne gratifiée et qui avait retenu qu'au moment de la rédaction du testament, Mme Z. était la concubine adultère du testateur, ne pouvait nier l'interposition de personne, ni écarter l'immoralité du legs dont l'objet était, selon le moyen, de maintenir ces relations illicites ;

Mais attendu que l'arrêt énonce que la libéralité litigieuse avait bien été faite à Mme Y. elle-même que le testateur considérait comme sa fille et à laquelle il s'était attaché par reconnaissance pour l'avoir soigné et assisté avec persévérance au cours de sa maladie et lui avoir témoigné dévouement, affection et amitié jusqu'à sa mort ; qu'en écartant, par cette appréciation souveraine des faits de la cause, l'interposition de personne qui, en l'espèce, n'aurait pu valoir que comme présomption du fait de l'homme et l'immoralité du legs, la cour d'appel a légalement justifié sa décision et que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu qu'il est encore reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté les consorts X. de leur demande en annulation des libéralités découlant des contrats d'assurance-décès souscrits par le de cujus au profit de Mme Z., au motif qu'il n'était pas établi que la cause impulsive et déterminante de ces libéralités ait été la rémunération ou la prolongation de relations immorales, alors que la cour d'appel n'aurait pas répondu aux conclusions par lesquelles les consorts X. faisaient valoir que leur auteur ne pouvait, en vertu de l'article 1422 du Code civil, pour le paiement des primes d'assurance, disposer seul des biens de la communauté ;

Mais attendu que, contrairement à ce qui est soutenu, la juridiction du second degré n'a, dans les conclusions invoquées, été saisie que d'une demande en annulation de libéralités fondée sur l'immoralité de la cause et non sur le dépassement des pouvoirs du mari sur les biens communs ; que le moyen doit donc être écarté ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que les consorts X. reprochent enfin à l'arrêt attaqué de les avoir condamnés à payer à Mme Z. et à Mme Y. la somme d'un franc à chacune d'elles, à titre de dommages-intérêts, en réparation du préjudice que leur a causé le rappel dans la procédure de faits anciens sur la vie privée de Mme Z., ayant entraîné une condamnation pénale suivie d'une réhabilitation, alors que ce rappel, de nature à servir de renseignement, avait pour seul objet, selon le moyen, de mettre en lumière la moralité douteuse de Mme Z. et son emprise affective excessive sur ses amants et qu'il ne présentait aucun caractère fautif ;

Mais attendu qu'il résulte de l'article 799 du Code de procédure pénale que le fait de faire état d'une condamnation atteinte par la réhabilitation est illicite, quels qu'en puissent être les motifs ; que la cour d'appel a retenu que les consorts X. avaient fait état, dans la procédure et à l'audience publique, de faits qui avaient entraîné la condamnation de Mme Z. suivie d'une réhabilitation, que ces faits étaient de nature à nuire à sa réputation et à celle de sa fille et à révéler à cette dernière des faits pénibles pour sa mère et pour elle-même ; que les juges du fond ont pu déduire de ces constatations que les consorts X. avaient commis une faute ayant causé un préjudice moral auxdites dames et qu'ils ont légalement justifié leur décision ; d'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 85-17302
Date de la décision : 28/04/1987
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

1° TESTAMENT - Nullité - Cause immorale - Concubinage - Motif déterminant - Legs à l'enfant de la concubine - Sentiment de reconnaissance envers la légataire - Appréciation souveraine.

DONATION - Nullité - Cause immorale - Concubinage - Motif déterminant - Legs à l'enfant de la concubine - Sentiment de reconnaissance envers la légataire - Appréciation souveraine * CONCUBINAGE - Donation entre concubins - Nullité - Legs à l'enfant de la concubine - Interposition de personne - Appréciation souveraine.

1° S'agissant d'une libéralité faite par le testateur à la fille de sa concubine, c'est par une appréciation souveraine des faits de la cause que les juges ont écarté l'interposition de personne, qui n'aurait pu valoir que comme présomption du fait de l'homme, en retenant que le testateur considérait la personne gratifiée comme sa fille et avait envers elle un sentiment de reconnaissance pour son affection et son dévouement .

2° RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASIDELICTUELLE - Faute - Débats - Rappel d'une condamnation éteinte par la réhabilitation.

2° Il résulte de l'article 799 du Code de procédure pénale que le fait de faire état d'une condamnation éteinte par la réhabilitation est illicite, quels qu'en puissent être les motifs


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 08 juillet 1985


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 28 avr. 1987, pourvoi n°85-17302, Bull. civ. 1987 I N° 135 p. 104
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1987 I N° 135 p. 104

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Camille Bernard, conseiller le plus ancien faisant fonctions . -
Avocat général : Avocat général :M. Charbonnier
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Barat
Avocat(s) : Avocats :M. Choucroy et la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Liard .

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1987:85.17302
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