REJET du pourvoi formé par X... (Jean), Y... (François), contre un arrêt de la cour d'appel d'Amiens, chambre correctionnelle, du 18 juin 1984, qui, dans les poursuites exercées contre eux par Jean-Claude Z..., Jacques A..., Gérard B..., Jean-Paul C..., Hubert D..., Gilles E..., Michel F..., Jean G..., Yves H..., Isabelle I... épouse J..., Nicole K...épouse L... pour inscription indue sur une liste électorale à l'aide de déclarations frauduleuses ou de faux certificats et complicité, a déclaré recevable l'action desdites parties civiles, et renvoyé l'affaire à une audience ultérieure.
LA COUR,
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle en date du 10 décembre 1986 portant admission du pourvoi à un examen immédiat ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 1, 2, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré recevable l'action des parties civiles intentée à l'encontre de X... et Y... par voie de citation directe ;
" aux motifs qu'en prétendant que Jean X..., à supposer qu'il n'ait eu aucune vocation à être inscrit au rôle des contributions directes, n'a pu se rendre éligible qu'en obtenant frauduleusement la qualité d'électeur, les parties civiles, à tout le moins en tant qu'électeurs inscrits sur la liste électorale d'Amiens, sinon en tant que candidats élus, justifient suffisamment de la possibilité d'un préjudice personnel en relation directe avec l'infraction alléguée ; qu'en effet, ainsi que l'a justement énoncé le tribunal, tout citoyen est en droit d'invoquer un intérêt légitime et direct à voir se dérouler régulièrement les opérations électorales dans le collège auquel il appartient ; qu'il en résulte qu'en raison de leur seule qualité d'électeurs inscrits, qualité qui ne leur est pas contestée, Z... et autres sont recevables à poursuivre comme parties civiles, les infractions commises à l'occasion d'élections qui ont eu lieu dans leur collège ;
" alors que les infractions au Code électoral, ayant pour objet fondamental et exclusif la répression d'agissements qui, en portant atteinte à la sincérité du scrutin, violent les principes de la démocratie et nuisent à l'ordre social, ne sont dès lors susceptibles d'engendrer qu'un préjudice social subi collectivement par l'ensemble des électeurs dont seul le ministère public, défenseur de l'intérêt général, est habilité à poursuivre la réparation à l'exclusion de tout particulier auquel de tels agissements n'ont pu, en aucune manière, causer un préjudice personnel et direct distinct de ce préjudice social " ;
Attendu que par les motifs repris au moyen l'arrêt attaqué a déclaré recevable l'action civile exercée par voie de citation directe à la requête de Z... et autres contre X... et Y... du chef de délit d'inscription indue sur une liste électorale et complicité ;
Attendu qu'en statuant ainsi la cour d'appel a, à bon droit, admis l'action civile à raison d'une des infractions à l'article L. 88 du Code électoral à la supposer établie ; que, loin d'être exclue en la matière, une telle action est au contraire expressément prévue par l'article L. 114 dudit Code dont le caractère limitatif ne concerne que le domaine de la prescription spéciale instituée par cette disposition ; que tout électeur inscrit sur les listes électorales d'une circonscription, tenant de l'article L. 21 du même Code le droit de réclamer l'inscription ou la radiation d'un électeur omis ou indûment inscrit, possède, à raison de cette seule qualité, le droit de poursuivre, comme partie civile, les crimes ou délits commis à l'occasion des élections qui ont eu lieu dans son collège ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.